Moins de huit mois après sa validation définitive par les autorités espagnoles, la fusion de Bankia avec CaixaBank entame en cette fin de semaine sa phase la plus périlleuse, qui est également celle qui permettra d'achever l'intégration des deux banques et de commencer à en engranger les bénéfices : l'unification des systèmes d'information.
En l'occurrence, la stratégie retenue consiste, sans surprise, à rapatrier les 7,6 millions de clients de Bankia – avec, naturellement, tout leur historique, leurs comptes, leurs actifs, leurs dettes… – sur les infrastructures existantes de CaixaBank. À l'issue de la migration, planifiée entre ce vendredi 12 novembre après-midi et lundi 15 à l'aube, les utilisateurs concernés, particuliers et entreprises, devraient pouvoir retrouver tous leurs services financiers sur les plates-formes web et mobile de l'établissement à l'étoile.
Quelques informations quantitatives donnent une idée de l'ampleur considérable de l'exercice, dont il faut espérer qu'il a été maintes fois répété avant le saut dans le vide. Ce sont, par exemple 2,5 milliards de documents et un volume global de plus de 10 pétaoctets (l'équivalent d'un million de milliards de caractères) qui vont être transférés vers leur nouveau site d'hébergement, moyennant, naturellement, quelques conversions et autres ajustements de manière à les rendre compatibles avec les applications cibles.
Afin de compliquer encore la tâche, les fonctions essentielles – banque oblige ! – resteront disponibles pendant toute la durée de l'intervention pour les clients historiques de Bankia (de leur côté, ceux de CaixaBank ne devraient subir aucun impact). Les retraits d'espèces sur les automates, l'encaissement (pour les commerçants) et les paiements par carte, en boutique comme en ligne, la consultation des comptes (sans actualisation des soldes durant la période, toutefois) seront donc assurés sans interruption.
Au vu des expériences passées et du nombre de désastres qu'elles ont provoquées au fil des ans (TSB, au hasard) on peut s'étonner de la décision du groupe espagnol d'adopter une approche « big bang » pour une manipulation extraordinairement risquée, puisque couvrant simultanément le cœur bancaire et les capacités de distribution. Certes, ces composants sont robustes et éprouvés par des années d'usage, mais leur adaptation aux particularités de plusieurs millions de situations supplémentaires n'est pas garantie.
Peut-être CaixaBank aura-t-elle réussi l'exploit inédit de peaufiner un projet d'une telle ambition en moins d'un an ou peut-être aura-t-elle de la chance dans son exécution et parviendra-t-elle à éviter la catastrophe, à moins qu'elle ne dispose d'une option de retour en arrière infaillible. Ce n'en est pas moins un pari très dangereux qu'elle fait là, dans lequel elle embarque des clients qui n'ont pas été consultés au préalable. À se demander s'il est impossible d'envisager une autre démarche, plus progressive.
En tout état de cause, et même s'il ne s'agit pas cette fois d'un chantier de modernisation à proprement parler, voilà encore un épisode critique qui va s'inscrire dans la longue histoire des migrations de systèmes d'information financiers. Il marquera probablement les stratégies à venir, selon son déroulement. Un échec, en particulier, pourrait encourager les acteurs européens à maintenir le statu quo pour quelques années de plus et à s'enfoncer de la sorte dans une impasse dont ils ne pourront bientôt plus sortir.
Excellente nouvelle pour les clients, la migration se termine plus tôt que prévu et les clients de Bankia pourront bientôt accéder, avec un jour d'avance à leurs comptes dans les applications de CaixaBank.
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