Malgré son inutilité patente, la carte de paiement biométrique est désormais commercialisée par quelques grandes enseignes (en France, BNP Paribas, alors que SG ne semble pas avoir été plus loin que l'expérimentation). Afin de prolonger encore la caricature, un fournisseur propose désormais de lui ajouter des capacités d'intelligence artificielle.
Techniquement parlant, rien d'extraordinaire : SmartMetric, comme ses concurrents sur ce créneau, intègre deux processeurs différents au sein de ses cartes, l'un dédié aux fonctions de paiement classiques et le second, plus générique, à la reconnaissance de l'empreinte digitale du porteur (qui sert ainsi de moyen d'authentification forte). Comme il a toujours été évoqué par les fabricants, ce dernier est suffisamment puissant pour accueillir d'autres logiciels. Alors, pourquoi ne pas y intégrer un peu d'IA ?
La directrice générale de l'entreprise est enthousiaste, estimant que c'est un nouvel univers de possibilités qui s'ouvre de la sorte aux émetteurs. Malheureusement, il faut vite se rendre à l'évidence, nulle part dans la communication officielle n'est suggéré le moindre cas d'usage, pertinent ou non, pour cet ajout. Au contraire, dans un sens, elle met essentiellement l'accent sur l'exploit réalisé (ou en cours de réalisation ?) par les ingénieurs, qui, naturellement, ne se préoccupent guère des applications de leur bébé.
La question vaut pourtant d'être posée : pour quoi faire ? Les institutions financières ont déjà souvent quelques réticences à adopter l'IA dans les solutions mises à la disposition de leurs clients, y compris, parfois, pour des raisons légitimes (l'exigence d'explicabilité, par exemple). Il est difficile d'imaginer qu'elles vont se ruer sur l'opportunité que leur offre SmartMetric, alors que de multiples scénarios de mise en œuvre dans leurs applications web et mobiles leur tendent les bras et méritent de capter toute leur énergie.
Il faudrait en outre s'attarder sur le flou de l'annonce sur les détails opérationnels, dont l'absence d'indications sur ce que pourrait effectivement inclure les cartes, le terme d'IA couvrant potentiellement tellement de notions différentes, dont certaines totalement triviales. Enfin, si le fabricant vante l'efficacité de modèles embarqués (par opposition à ceux qui sont hébergés dans l'infonuagique), il passe sous silence la difficulté que constituerait leur actualisation, pourtant critique dans la plupart des applications.
Soyons sérieux, SmartMetric se rend ici coupable d'« IA-washing » à un niveau rarement atteint jusqu'à maintenant. Son objectif prioritaire semble être de faire parler de soi en surfant sur la mode du moment sans même tenter d'y introduire un minimum de vraisemblance ou d'en démontrer le bien-fondé. Le pire serait que les adeptes aveuglés de la carte biométrique se laissent maintenant séduire par cette nouvelle option…
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