Au premier abord, Giraffe, qui vient de lever une ronde d'amorçage de 10,5 millions de dollars, semblerait n'être qu'une entrée supplémentaire dans la liste de plus en plus longue des plates-formes « digitales » d'investissement responsable. Elle introduit toutefois plusieurs idées originales dans le concept, qui méritent certainement notre attention.
Le point de départ de sa démarche est sans surprise, absolument identique à celui de ses paires. Les citoyens désireux de se constituer une épargne, en particulier parmi les jeunes générations, expriment aujourd'hui deux exigences majeures vis-à-vis de leurs fournisseurs : d'une part, une simplicité absolue dans la gestion de leurs opérations et de leur portefeuille et, d'autre part, une prise en compte de leurs valeurs personnelles, lesquelles sont fréquemment alignées sur des enjeux de développement durable.
À partir de ce cahier des charges élémentaire, Giraffe élabore une solution radicale. Son seul produit – du moins à ce jour – consiste en un fonds de base indexé sur l'indice phare S&P 500, que chacun de ses clients a la possibilité d'adapter à sa philosophie en en retirant les entreprises qui ne respectent pas ses convictions, par exemple en matière d'hygiène alimentaire (donc sans les géants du fast-food, des boissons sucrées…), de climat (écartant les compagnies polluantes), d'égalité des sexes, de vente d'armes…
Des options complémentaires sont peut-être proposées aux utilisateurs avertis (le site n'est pas clair sur ce point) mais la facilité de sélection d'un panier d'actions engagé et le recours à un support classique, reposant sur une référence reconnue, sont bien les principes directeurs de l'offre. Par ailleurs, la transparence n'est pas oubliée : le suivi de performances de la combinaison personnalisée permet une comparaison avec l'indice brut dont elle est issue, mesurant de la sorte l'incidence des préférences intégrées.
Son positionnement est la deuxième spécificité importante de Giraffe. Outre son ciblage direct des consommateurs, la jeune pousse distribue son service auprès des employeurs qui souhaitent à la fois renforcer leurs propres actions de responsabilité sociale et environnementale et répondre aux attentes croissantes de leurs salariés dans ce domaine, que ce soit afin de stimuler leur fidélité, de leur procurer une occasion d'être fiers de leur appartenance ou de propager une culture d'entreprise éthique.
Présenté comme un programme d'avantages exclusif, le dispositif incite l'entreprise à distribuer des coupons d'investissement à ses collaborateurs en guise de primes. Les bénéficiaires les utilisent ensuite sur la plate-forme pour acquérir des parts de fonds, en appliquant leurs critères individuels. Ces allocations donnent lieu à une synthèse des impacts positifs générés par leurs choix (ou plutôt d'impacts négatifs évités, en pratique), que la structure peut (quoique un peu artificiellement) inclure dans son bilan RSE.
Inédite, à ma connaissance, dans le registre de l'investissement, l'approche de Giraffe à l'intention des employés constitue aussi une tendance en vogue, probablement parce qu'elle offre aux startups une voie de commercialisation relativement facile à emprunter dans un contexte où la compétition globale pour les talents atteint des sommets. Avec son angle d'attaque par les enjeux sociétaux, pour toutes les parties prenantes, elle possède cependant un argument susceptible de la distinguer de la concurrence.
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