Enquête après enquête, les dérives et travers du paiement différé deviennent toujours plus préoccupants. À l'approche des fêtes de fin d'année, la dernière en date, produite par le spécialiste de l'accompagnement financier OpenMoney, donne un bon aperçu des principaux risques qui mériteraient d'être mieux surveillés et contrôlés.
Si les statistiques présentées concernent les consommateurs britanniques, il est fort probable que la tendance, internationale, affecte les autres marchés de manière similaire. Parmi les chiffres les plus marquants : 57% des adultes ont déjà utilisé une solution de BNPL, 22% prévoient d'y recourir pour leurs achats de Noël (contre une proportion identique puisant dans son épargne), pour, notamment, des appareils technologiques (micro-ordinateurs, smartphones…), des vêtements, des voyages, des meubles…
Sur le volet des inducteurs et des impacts psychologiques des offres, les résultats sont particulièrement éclairants : 43% des personnes interrogées se débattent avec leurs dettes, 89% se sentent encouragés à vivre au-dessus de leurs moyens, 41% choisissent le fractionnement parce qu'elles n'ont pas la somme nécessaire à un règlement comptant. Puis, après avoir plongé, 43% admettent se trouver en difficulté face à leurs échéances, causant directement anxiétés (41%), troubles du sommeil (37%) et dépressions (28%).
Pour ces derniers, la réponse aux impératifs de remboursement passe par la carte de crédit ou le prêt à la consommation. Les principales promesses du BNPL – coût réduit ou nul (généralement pris en charge par les commerçants) et absence de conséquences sur le score de crédit – deviennent alors caduques (sans aucune incidence pour les fournisseurs, qui s'en lavent les mains), ce qui entraîne presque automatiquement une entrée dans la spirale du surendettement pour une forte proportion d'utilisateurs.
Au vu de la taille du marché, des investissements colossaux qui s'y engouffrent, de la concurrence féroce qui l'agite (conduisant dernièrement Klarna à s'infiltrer dans les navigateurs web), il faut désormais se rendre à la triste évidence : la plupart de ses acteurs ne feront rien qui pourrait nuire au développement de leur volume d'affaire. Il ne faut donc guère compter sur eux pour tenter d'accompagner les individus dans une réflexion rationnelle sur les dangers de l'accumulation de charges sur leur budget.
Certes, les régulateurs du monde entier commencent à s'emparer du sujet. La CFPB, organisme fédéral américain de protection financière des consommateurs, vient ainsi de lancer une investigation auprès des 5 plus grands pourvoyeurs de paiement différé aux États-Unis (Affirm, AfterPay, Klarna, PayPal et Zip), afin d'évaluer précisément leurs pratiques en matière d'augmentation de l'endettement, de conformité aux exigences d'information… et de collecte et d'exploitation de données personnelles.
Toutefois, une autre manière d'aborder la question consisterait pour les entreprises sensibles aux enjeux du bien-être financier – banque traditionnelle ou jeune pousse de la FinTech – à la transformer en opportunité. Pour ce faire, il « suffirait » en effet de prendre en compte cette nouvelle menace sur l'équilibre des comptes des citoyens, d'en identifier les signaux, entre autres à travers l'analyse des transactions, et de leur apporter une solution concrète, préventive dans la mesure du possible, palliative s'il est trop tard.
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