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C'est pas mon idée !

samedi 8 février 2025

Le malaise du conseiller bancaire

France Inter
L'émission « On n'arrête pas l'éco » de ce matin, sur France Inter, était consacrée en grande partie à l'évolution de la banque et plus particulièrement celle du métier de conseiller. Elle fournissait une occasion rare de mieux appréhender les terribles contradictions qui l'affectent… et l'absence de perspective réaliste à long terme.

Aujourd'hui, plus personne ne le conteste, la banalisation et la généralisation des outils électroniques ont totalement transformé la relation des institutions financières avec leurs clients, imposant une nécessaire transition du rôles des collaborateurs de première ligne vers le conseil à valeur ajoutée. Or le besoin se fait essentiellement ressentir lors de trois moments clés de l'existence : l'achat de la résidence principale, la séparation (divorce) et le décès. Ce qui laisse peu d'occasions d'exercer son expertise.

Ce constat, qui semble caricatural mais reflète une indiscutable réalité, entraîne, d'une part, une remise en question profonde du dimensionnement des réseaux d'agences et de leur effectifs et, d'autre part, et les principaux intéressés en ont pleinement conscience, la perte de connaissance du client, de sa situation, de ses préférences, de ses projets, de ses difficultés… sans laquelle il est très difficile d'être pertinent.

Les discours prennent ensuite une tournure ubuesque, quand les responsables affirment que, à l'avenir, le conseiller restera indispensable dans la mesure où il sera capable d'apporter un service personnalisé. Mais comment un employé pourra-t-il respecter une telle injonction sans savoir qui est son client et quelles sont ses attentes implicites ? Les conditions sont évidemment réunies pour exacerber l'insatisfaction de tous, entre un conseiller qui ne peut que proposer des recommandations (produits) génériques et un client qui se sent incompris dans les moments où il a besoin d'aide.

Dans un registre anecdotique, le reportage sur une formation spécialisée, inclus dans l'émission, laisse entrevoir le décalage entre les promesses et leur déclinaison sur le terrain. Dans un exercice, un « élève » se voit suggérer de désamorcer une crise avec un client, matérialisée par un courriel de ce dernier, en le rappelant au téléphone, sous prétexte qu'une communication écrite envenimera le conflit. Triste exemple de réflexe préhistorique, alors que le monde moderne impose d'apprendre à communiquer efficacement sur tous les médias, dont, surtout, celui privilégié par son interlocuteur.

Au milieu de ce paysage dévasté, surgit l'utopie de l'intelligence artificielle résolvant tous les problèmes. Ce serait elle qui donnerait – sans le remplacer, nous garantit-on – au pauvre humain submergé les moyens de maîtriser un catalogue trop riche, de prendre en compte des réglementations pléthoriques (qui le handicapent dans son travail, bien sûr) et d'adapter ses conseils à l'individu à qui il a affaire. Mais d'où prétend-elle extraire l'information nécessaire pour accomplir ce miracle ? Nul ne sait.

Si les banques traditionnelles tiennent absolument à conserver leur modèle historique d'interactions personnelles, elles devront d'abord réconcilier ces discordances. Il leur faudra, entre autres, accepter de changer radicalement leurs pratiques de recrutement, en choisissant des profils de coachs plutôt que commerciaux, à l'aise sur tous les médias et pas exclusivement dédiés aux échanges en face à face (ou au téléphone), leur offrir une formation réellement adaptée. Surtout, elles devront mettre en place une vraie stratégie de connaissance du client qui soutienne leur nouvelle (?) mission.

France Inter – On n'arrête pas l'éco

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