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C'est pas mon idée !

vendredi 28 février 2025

Yomoni x Pretto : le projet immobilier étendu

Yomoni
Parce que la gestion des finances personnelle est un tout indissociable, Pretto intègre désormais dans son parcours d'emprunteur les offres d'investissement de Yomoni, autorisant de la sorte ses utilisateurs à préparer leur projet immobilier, de manière transparente, avant même d'être en position de souscrire un crédit.

Bien sûr, le besoin se fait d'autant plus ressentir dans la période actuelle où les difficultés croissantes d'accès aux financements combinées aux prix élevés des logements éloigne la perspective de devenir propriétaire pour beaucoup de ménages, en France comme ailleurs dans le monde. Au lieu de les abandonner et les laisser se décourager, Pretto choisit donc de les embarquer dans un parcours, certes plus sinueux et plus long, mais qui leur permettra malgré tout d'atteindre leurs objectifs… un jour.

Concrètement, aux visiteurs du spécialiste du prêt immobilier qui, lors d'une simulation de leur acquisition rêvée, aboutissent à une impasse, l'outil propose directement, sans quitter le site, les produits d'épargne de la plate-forme d'investissement, dont, en priorité, les mieux adaptés à leur contexte (notamment dans le registre de la minimisation des risques), dans l'optique de les aider à renforcer leur apport personnel et leur donner toutes les chances de décrocher, à terme, un crédit à des conditions optimales.

Yomoni x Pretto

Je ne suis pas certain que l'implémentation aille aussi loin mais, idéalement, le service devrait se transformer en un accompagnement dans la durée. En partant des attentes exprimées lors de l'évaluation initiale, il est possible d'estimer le montant de réserve nécessaire pour que le projet devienne réaliste. Dès lors, il serait intéressant d'assurer un suivi de l'évolution de l'épargne (peut-être assorti d'une prise en compte des tendances du marché immobilier), de manière à matérialiser le rapprochement de l'échéance, ne serait-ce que comme une incitation à poursuivre les efforts.

Il fut une époque, lointaine, dans laquelle l'individu qui envisageait d'acheter une première résidence se rendait dans son agence bancaire, où son conseiller analysait sa situation et était en mesure de lui recommander de telles stratégies personnalisées. Mais, aujourd'hui, même si les professionnels ont les compétences requises pour ce genre d'exercice (ce qui resterait à vérifier, je le crains), les changements de comportement apportés par la révolution numérique rendent l'approche caduque.

En effet, la méthode « normale » qu'adoptent désormais une grande partie (la majorité ?) des consommateurs afin d'explorer leur capacité à devenir propriétaire consiste à réaliser une simulation en ligne (auprès de leur banque ou ailleurs) et si celle-ci leur fournit une réponse négative, la probabilité est grande qu'ils s'en tiennent là, quels que soient les éventuels messages invitant à échanger avec un représentant en vue d'affiner l'étude. Le meilleur moyen de ne pas perdre le contact et, potentiellement, d'embrayer sur une autre opportunité, est évidemment de présenter celle-ci dans la foulée !

jeudi 27 février 2025

La communication impacte l'expérience client

Forrester
Le meurtre du directeur général de UnitedHealthCare, aux États-Unis, semble entraîner une vague d'examens de conscience dans le domaine de l'assurance santé, à la recherche d'explications de sa mauvaise réputation. Forrester propose une piste intéressante, dans le registre de la communication, applicable à tout le secteur financier.

Le cœur de la problématique considérée par les analystes réside dans le langage employé avec les clients, en particulier dans la présentation des conditions contractuelles et, surtout, des couvertures effectives des polices commercialisées. Son lien avec la confiance inspirée et la qualité de la relation devrait être évident : la moindre discordance entre la réalité de la protection offerte par l'assureur et la perception qu'en a le souscripteur constitue une source potentielle de conflit et de défiance.

Or, alors que les compagnies tendent à estimer que leurs documentations et les informations transmises par leurs représentants sont limpides, une enquête révèle que seule une moitié des adultes américains confirment comprendre facilement les clauses de leurs contrats, ce qui en laisse donc autant qui, d'une manière ou un autre, ont des doutes sur ce à quoi ils peuvent prétendre. La situation est en outre en forte dégradation depuis deux ans, le taux ayant déjà baissé de 59% en 2022 à 57% en 2023.

Mais, en creusant la question, le paysage s'assombrit encore puisque, nonobstant leur opinion sur la communication actuelle, 9 personnes sur 10 aimeraient plus de clarté et, en particulier, avoir des certitudes quant aux prestations auxquelles elles ont accès, ainsi que tous les coûts associés. Dans une autre étude réalisée l'an dernier, il ressortait également que la lisibilité des contenus partagés sur les sites web représentait le deuxième facteur de confiance pour les entreprises de l'assurance santé.

Forrester – Health Insurers Communication

Face à un problème d'une telle ampleur, nos amis de Forrester recommandent de prêter attention aux requêtes des clients, quand ils interagissent avec les services de support ou lors de leurs demandes de prise en charge. Non seulement sont-ils susceptibles de souligner les termes, expressions et/ou thématiques qui restent obscurs pour eux mais, plus largement, il s'agirait d'entendre et d'enregistrer (en quelque sorte) le vocabulaire qu'eux utilisent… et qui devrait donc être adopté pour plus de transparence. À mon avis, des campagnes de sondage dédiées devraient même être envisagées.

Naturellement, ce qui est vrai pour l'assurance santé l'est aussi dans d'autres métiers, depuis l'assurance dommages – où les mêmes questions sur la compréhension des garanties et des exclusions invitent les mêmes risques de différends – jusqu'à la banque – où, par exemple, la description de certains produits peut être interprétée à tort comme une promesse et le jargon financier manipulé à outrance agit en repoussoir. L'enjeu n'est d'ailleurs pas seulement de faire en sorte que la communication soit claire, l'adaptation du discours à son interlocuteur est d'abord un simple geste de respect.

mercredi 26 février 2025

PayPal s'affirme dans le commerce de proximité

PayPal
Pionnière des paiements en ligne depuis le siècle dernier, PayPal a aussi, depuis longtemps (2012), adopté une vision omni-canal de son métier, incluant donc les transactions de proximité. Aujourd'hui, à travers un partenariat avec Verifone, elle complète son approche plutôt centrée sur les PME avec une solution pour les (plus) grands groupes.

L'évolution est plus importante qu'il n'y paraît. En effet, jusqu'à maintenant, l'ancêtre de la FinTech proposait ses propres plates-formes d'encaissement aux commerçants « en dur », d'abord sous la forme d'un logiciel pour smartphone (avec son accessoire de lecture de carte, à la manière de Square) puis avec une gamme entière de matériels adaptée à tous les besoins. Elle ouvre dorénavant une autre voie, consistant à embarquer ses capacités au cœur des terminaux d'un spécialiste (international).

La démarche est portée par la branche Braintree de PayPal, dédiée aux grandes entreprises, plus particulièrement celles qui opèrent exclusivement en ligne. De toute évidence, elle est plus difficile à vendre aux enseignes maintenant un réseau de points de vente physiques, dont la plupart ont des exigences que seuls les industriels historiques prennent en charge. C'est pourquoi le recours (classique) à la collaboration avec les distributeurs de terminaux est une obligation en vue d'attaquer ce marché.

Une des grandes forces des deux acteurs réside dans leur couverture géographique, l'un avec sa présence locale, permettant d'assurer un accompagnement des clients dans la mise en œuvre et l'exploitation de ses technologies et l'autre avec son support natif des instruments spécifiques à différents pays ou régions. L'offre, qui constitue une brique de la future plate-forme unifiée PayPal Open, sera ainsi déployée initialement aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne, avant extension, à partir de 2026.

Alors que ses récents efforts portaient plutôt sur les transferts entre proches, notamment avec sa solution Venmo, PayPal réaffirme ici sa volonté de traiter toutes les dimensions des paiements, loin de ses origines, dans le commerce « digital » et de proximité, pour les petites structures et pour les groupes internationaux, en apportant toujours les mêmes services de facilité de pilotage, d'excellence de l'expérience client, de protection avancée contre la fraude, d'optimisation des modalités de règlement…

PayPal x Verifone

lundi 24 février 2025

L'Australie redistribue les responsabilités de la fraude

Australie
L'Australie devient la première nation à céder à la demande pressante des institutions financières en adoptant une loi qui assigne des responsabilités spécifiques dans la lutte contre la fraude à trois secteurs : banques, opérateurs téléphoniques et plates-formes sociales. Ce sont évidemment les deux derniers qui en font les frais.

Face à la progression constante des escroqueries, qui coûtent des milliards de dollars aux ménages, le texte vise à ne pas laisser ces derniers se défendre seuls. Les entités concernées sont donc formellement appelées à « prévenir, détecter, perturber, riposter (aux) et signaler » les tentatives d'arnaque, de manière à éviter qu'elles atteignent leur cible. Chaque catégorie d'entreprises sera soumise à des exigences précises dans ce but, assorties de sanctions, jusqu'à 50 millions de dollars, en cas de défaut.

Pour les banques, il s'agira de déployer un système d'identification des destinataires de virement, à la manière de celui qui sera imposé cet automne en Europe. En première approche, elles sont de la sorte plutôt épargnées, d'autant plus que ces dispositifs devraient avoir été mis en place depuis longtemps (et tant pis pour ceux qui s'insurgent de la sur-réglementation, elle constitue visiblement le seul moyen de faire avancer des sujets pourtant extrêmement sensibles dans des délais raisonnables).

Du côté des réseaux de télécommunication, la démarche paraît similaire puisqu'ils seront contraints de repérer et condamner les numéros qui émettent des appels ou des SMS frauduleux. La tâche sera toutefois difficile car elle comprend une dimension subjective qui, outre la complexité potentielle de sa mise en œuvre, l'expose à un excès de zèle générateur d'insatisfaction que le niveau d'amende prévu rend plausible.

Enfin, les réseaux sociaux seront les plus impactés car la loi requiert de leur part un contrôle préalable de leurs annonceurs afin d'interdire la propagation de publicités problématiques. L'idée semble de bon sens mais elle va à l'encontre du modèle 100% automatisé de ces services et leur origine étrangère (américaine, en particulier) risque de faire obstacle à son entrée en vigueur, dans le contexte politique actuel.

Par ailleurs, l'organisme désigné pour gérer les conflits (l'AFCA) indique qu'un mécanisme obligatoire de partage d'information entre les acteurs sera développé afin d'assurer des réactions rapides aux attaques. Il sera certainement ardu de mettre au point un tel outil, ne serait-ce qu'en raison des enjeux de protection des données, mais il représentera aussi probablement un effort conséquent pour tous les participants.

La date n'est pas encore fixée mais l'application opérationnelle du texte interviendra au mieux en 2026, ce qui laisse (heureusement ou hélas, selon les points de vue) le temps aux parties prenantes de se mettre en ordre de marche. En conséquence, on ne saura pas avant longtemps si la méthode coercitive du gouvernement australien porte ses fruits. Cependant, l'absence de retour d'expérience n'empêchera vraisemblablement pas les autres pays tentés par ce genre d'initiative de se lancer sans attendre.

Fraudeur

dimanche 23 février 2025

Comment relancer la finance participative ?

Caisse d'Épargne
Quelques jours après la publication par France FinTech de son baromètre du « crowdfunding », je découvrais au hasard d'une communication officielle la (déjà ancienne) plate-forme Kiwaï Normandie de la Caisse d'Épargne locale, qui illustre tristement le développement poussif de la finance participative dans l'hexagone.

Je ne m'attarderai pas outre mesure sur l'état des lieux du marché français à la fin de 2024 mais il faut bien parler des chiffres qui dérangent : si le cap des 10 milliards d'euros apportés en une décennie représente un seuil symbolique fort, il n'en reste pas moins que ce montant est infime par rapport à la masse de l'épargne de nos compatriotes. Par ailleurs, la baisse de 17% constatée sur un an, suivant celle de 11% observée en 2023, est de mauvais augure pour l'avenir du secteur même après la prise en compte des explications conjoncturelles (sur la crise de l'immobilier, notamment).

Je ne sais pas si elle est représentative de ses consœurs, mais l'exemple de Kiwaï, qui est membre de France FinTech, peut fournir un aperçu des opportunités manquées. Voilà en effet une initiative qui, à première vue, coche toutes les cases de la pépite : une solution et une équipe ancrées dans leur territoire, pour proposer aux internautes d'investir – sous forme de prêt (à taux fixe) – dans des projets locaux à vocation exclusivement environnementale, avec une garantie totale du capital et des intérêts.

Ouverte en 2018, elle n'a pourtant qu'une quarantaine d'opérations (réussies) à son actif et aucune n'a été lancée depuis cinq mois. Entre les rémunérations attractives, entre autres par rapport au Livret A favori des français, la faculté pour les participants de s'engager concrètement pour la transition écologique, la confiance implicite accordée à une initiative portée par un établissement bancaire et l'assurance de ne pas perdre d'argent, tout porte à croire que les particuliers sont prêts à se ruer sur les offres.

Kiwaï Normandie

Alors qu'est-ce qui manque à Kiwaï (et probablement à d'autres) pour devenir un standard de l'épargne ou, à tout le moins pour atteindre un niveau de réussite susceptible de pérenniser le modèle ? J'imagine deux hypothèses, toutes deux relatives à un problème de notoriété. D'une part, le grand public n'est peut-être pas suffisamment informé de l'existence de cette catégorie d'épargne, interdisant tout développement exponentiel. D'autre part, les entreprises seraient trop rarement guidées vers ces mécanismes de financement, qu'elles connaissent probablement mal, elles aussi.

Le deuxième point pourrait représenter un sérieux échec pour Kiwaï, puisque, logiquement, ce sont les conseillers de la Caisse d'Épargne qui devraient suggérer le recours au « crowdlending », en principe en complément d'un crédit classique. N'assument-ils donc pas ce rôle de relais (faute de formation adéquate, par exemple) ? Ou bien finit-elle par apparaître comme une concurrente de la banque ? À moins que la niche « verte » retenue soit trop étroite pour générer du volume ?

Côté investisseurs, le même raisonnement pourrait être appliqué, lors de leurs échanges sur leurs options d'épargne avec leur conseiller. Mais, plus généralement, il faudrait également populariser le concept de finance participative, aujourd'hui trop marginal en France, afin de lui donner un statut incontournable dans l'éventail des solutions disponibles et le sortir du cercle d'initiés auquel il s'adresse jusqu'à maintenant. Quoi qu'il en soit, au vu de la situation actuelle, une réaction énergique est nécessaire si on ne veut pas voir disparaître un des rares instruments innovants nés de la FinTech.

samedi 22 février 2025

Des conseillers formés au soutien des clients

Virgin Money
Dans le sillage des nouvelles obligations réglementaires pour les banques britanniques de respecter un corpus de « devoirs » vis-à-vis des consommateurs, Virgin Money déploie un vaste programme de formation à l'intention de ses quelques 4 000 collaborateurs en contact avec la clientèle, focalisé sur le bien-être financier et mental.

Selon une enquête, qui rejoint en cela de nombreuses études sur le sujet, environ quatre personnes sur cinq déclare être plus préoccupées par les questions d'argent qu'il y a cinq ans. Pour beaucoup, les inquiétudes reflètent une situation réellement difficile mais, pour d'autres, les angoisses sont plus liées aux incertitudes face à l'avenir qu'à des problèmes budgétaires. Quoi qu'il en soit, il existe désormais, même dans les banques, des solutions pour les aider… encore faut-il qu'elles soient proposées au bon moment.

Voilà, en gros, l'objectif des nouveaux efforts pédagogiques orchestrés par Virgin, en collaboration avec des organismes à but non lucratif opérant dans le domaine de la santé mentale. Ils se composent de cinq modules, consacrés respectivement à la compréhension des enjeux, aux manières d'engager des conversations sur des thèmes délicats, aux bonnes pratiques à adopter lors de ces échanges, au devoir d'assistance dans les cas de fragilité et, enfin, au bien-être des conseillers eux-mêmes.

En arrière-plan, il s'agit pour l'établissement de garantir que ses employés se placent véritablement à l'écoute de leurs clients, en sachant décrypter leur état d'esprit, puis établir une relation de confiance qui permette d'aborder les questions épineuses, préalable indispensable à, ensuite, pouvoir prodiguer les recommandations les plus appropriées, qu'elles consistent en mesures d'accompagnement opérationnelles pour ceux qui rencontrent de vraies difficultés ou de réassurance pour tous les autres.

Virgin Money Training Program

On est loin, dans cette démarche, des formations classiques orientées sur la connaissance des produits et les techniques de vente (y compris la gestion des conflits, de plus en plus importante). Et elle montre une voie qui devrait relever de l'évidence, car elle porte sur un territoire immense – touchant principalement à la psychologie – où les outils numériques restent aujourd'hui incapables de remplacer l'humain et procure de la sorte une légitimité (devenue rare) aux interactions en face à face.

Naturellement, les empêcheurs de tourner en rond s'inquièteront de la rentabilité d'une telle initiative, qui n'est bien sûr pas immédiate. Pourtant la capacité à restaurer la sérénité des clients, voire à les aider à prendre soin de leur santé mentale – dont on sait dorénavant combien les inquiétudes suscitées par l'argent l'affecte –, est un gage de confiance et de fidélité qui révèlera sa valeur au long cours quand les suggestions formulées afin de réduire leur anxiété les conduiront à souscrire de nouvelles offres.

vendredi 21 février 2025

Comment combler la pénurie de conseillers ?

McKinsey
Selon McKinsey, la demande croissante d'accompagnement de la part d'une population américaine dont l'aisance financière progresse régulièrement engendrera à terme (d'ici 2034) un déficit d'environ 100 000 conseillers en patrimoine. Comment combler ce manque, qui concerne aussi, sous d'autres formes, le reste de l'industrie ?

Selon l'analyse des auteurs, le nombre de personnes éligibles aux services d'un professionnel – fixé à un seuil de 500 000 dollars de capital à investir – devrait augmenter de 4 à 5% par an sur la prochaine décennie. À ce premier facteur s'ajoute un désir de plus en plus marqué d'assistance humaine dans le pilotage de son argent, motivé, entre autres, par le surcroît de complexité et de diversité des besoins ainsi que par l'impératif toujours plus ancré de préparer la retraite via l'épargne individuelle.

La préférence pour une interaction personnelle, par rapport à une relation « digitale », s'exprime notamment à travers les frais que les intéressés sont prêts à payer dans ce but (près de 80% d'entre eux accepteraient un supplément de commission de 0,5% ou plus, par exemple). Les pionniers du robot-conseil (WealthFront, Betterment…) ont d'ailleurs depuis longtemps confirmé cette tendance, en introduisant des options dédiées à leurs offres qui, à l'origine, reposaient exclusivement sur un modèle en ligne.

En parallèle, le nombre de conseillers stagne, ce qui conduit donc vers une impasse si des mesures correctives ne sont pas prises. McKinsey préconise en premier lieu, évidemment, de renforcer le recrutement, en mettant en valeur des perspectives attractives d'évolution de carrière. Un deuxième axe à envisager consiste à optimiser la productivité, les suggestions allant ici de la mutualisation de certaines activités (prospection, niches de spécialité…) à… un appui par la technologie et l'IA générative.

McKinsey – La Pénurie de Conseillers

Sur ce dernier volet, on retrouve malheureusement une manifestation du mirage de la nouveauté. Or l'impact des outils à la mode sur l'efficacité opérationnelle de la gestion de patrimoine risque d'être bien en deçà des espérances, parce que, pour l'avenir prévisible, leur mise en œuvre ne concernera, en raison de la prudence extrême des acteurs et de leur conservatisme, que des tâches périphériques (administratives, principalement), où les gains, même s'ils sont réels, resteront marginaux.

En revanche, ce que n'explore pas McKinsey dans son article, ce sont les causes profondes pour lesquelles les consommateurs privilégient un interlocuteur humain face à une plate-forme numérique, pourtant plus économique. Certes, une partie de la population est intrinsèquement réticente, mais la majorité est désormais familière avec internet et n'hésite pas à traiter ses affaires financières à distance… comme l'ont bien compris les escrocs qui prolifèrent et prospèrent avec des promesses farfelues.

Le meilleur moyen de répondre aux attentes des consommateurs – qu'ils soient nantis ou non, pour le coup – serait pourtant de leur fournir une solution en libre service qui leur offre le niveau d'accompagnement personnalisé qu'ils méritent, quitte à interpeller un individu de temps à autres, quand les logiciels atteignent leurs limites. Pourquoi donc faudrait-il se résigner à réserver le conseil à ceux qui en ont les moyens et à s'inquiéter de la rareté des talents, alors que la technologie moderne est capable de subvenir à 90% des besoins… pour peu que les clients acceptent de changer leurs habitudes ? La priorité devrait être de leur démontrer tous les bénéfices qu'ils en retireraient et considérer comme un échec sur lequel on ne peut rester de ne pas y parvenir.

jeudi 20 février 2025

CommBank investit dans l'accès aux données

CommBank
Les institutions financières s'emballent pour l'intelligence artificielle mais leurs élans sont freinés par le problème universel de l'accès aux données nécessaires, avec toutes les garanties de qualité, de sécurité et de confidentialité qui s'imposent dans leurs métiers. CommBank investit dans la startup spécialisée Gable afin de répondre à ce défi.

Depuis que l'informatique d'entreprise a dépassé le stade des applications autonomes, en commençant à faire communiquer les logiciels les uns avec les autres, la gestion des données, devenue discipline à part entière, paraît de plus en plus inextricable avec la complexité des systèmes actuels et, simultanément, prend une dimension toujours plus stratégique, surtout quand surgissent les promesses de l'IA (et, avant elle, de la « data science »), impossibles à concrétiser sans matière première exploitable.

Dans ces conditions, il n'est guère surprenant que, quand la filiale x15ventures de CommBank – qui sait souvent faire preuve de réalisme et de pragmatisme – explore la « réinvention des expériences client et employé grâce à l'intelligence artificielle et à la donnée » dans le cadre de la récente édition de son programme d'accélération de jeunes pousses, elle choisisse comme lauréate celle qui offre une brique préalable indispensable à la mise en œuvre de celles qui traitent vraiment la question posée.

En l'occurrence, Gable propose une solution qui veut réussir là où plusieurs générations de produits ont échoué à s'imposer, en général parce qu'elles imposent une forte implication humaine dans le pilotage de l'information. En recourant elle-même à des algorithmes d'IA (sans, malheureusement, fournir beaucoup plus de détails sur leur mise en œuvre), elle se vante de pouvoir réaliser l'essentiel du travail sur les données de manière automatique, depuis leur naissance jusqu'à leurs différents usages.

CommBank x Gable

Les principaux facteurs limitants sont appréhendés de la sorte, qu'il s'agisse de retrouver le logiciel générant l'information (et, donc, identifier son « propriétaire »), de formaliser une chaîne de traçabilité autorisant, par exemple, des études d'impact avant un changement en amont, de repérer les manipulations de données sensibles et/ou personnelles… L'objectif est de placer entre les mains des professionnels du logiciel un outil qui intègre préventivement dans leurs livrables toutes les exigences à respecter et les libère de contrôles lourds, pour lesquels ils sont en outre rarement qualifiés.

À ce stade, il est impossible de savoir si Gable tient ses promesses mais CommBank est suffisamment consciente de l'enjeu pour engager, dès maintenant, une expérimentation dans le périmètre (réduit) de la structure x15ventures et entamer les premières réflexions sur les opportunités qu'elles pourraient ouvrir au sein de ses différentes lignes d'activité. La démarche est d'autant plus notable que le sujet de la gestion des données, peu vendeur auprès des responsables (de l'IT comme des métiers), est fréquemment négligé dans les grands groupes, en dépit de son caractère critique.

mercredi 19 février 2025

Le paiement via la banque peine à séduire

Paiements Canada
Alors que le pays n'a encore déployé ni son système de paiement instantané, ni sa stratégie de banque ouverte, ni, par conséquent, un modèle de règlement par compte bancaire (à ma connaissance), Paiements Canada a interrogé les consommateurs pour connaître leur opinion sur cette dernière option (parmi d'autres tendances à venir).

Bien que ses déclinaisons concrètes restent plutôt marginales à ce jour, le concept est dans l'air depuis longtemps, porteur de promesses multiples de sécurité renforcée, de réduction des commissions sur les encaissements, d'indépendance vis-à-vis des réseaux de carte (associée aux velléités de souveraineté, dans le cas de l'Europe)… Il s'agit de régler toutes sortes d'achats via une connexion transparente à son application bancaire, déclenchant un transfert instantané vers le compte du marchand.

Or, pour les canadiens, jusqu'à présent peu familiers de cette méthode de paiement, son attractivité s'avère relativement faible, puisque seuls 29% d'entre eux se déclarent intéressés, contre un tiers qui ne le sont explicitement pas et le reste de la population adoptant une position neutre, semblant exprimer, avec un certain pragmatisme, une position d'attente pour voir les implémentations réelles avant de se prononcer.

Il faut toutefois noter que des variations importantes apparaissent selon divers critères. En particulier, les immigrants récents et les travailleurs à la demande sont beaucoup plus convaincus (à hauteur de 50%, environ), sans qu'aucune explication ne soit proposée. D'autre part, l'âge joue également, les plus jeunes étant, sans surprise, plus enclins à accepter la nouveauté, quoique dans une proportion plus modeste.

Paiements Canada – Paiement via la banque

Sur la question des facteurs susceptibles de les encourager à changer leurs usages, les répondants pointent deux directions à explorer. D'une part, une majorité (60%) envisageraient le paiement via le compte bancaire s'il était assorti de programmes de récompenses… comme ceux qui accompagnent les cartes de crédit si populaires en Amérique du Nord. Remarquons cependant que cette hypothèse remettrait en cause l'avantage du coût pour les commerçants, puisqu'il faudrait financer ces avantages.

D'autre part, et le point est crucial, une fraction non négligeable des consommateurs (presque un sur trois) est tentée par l'argument de la sécurité (il n'est plus nécessaire de transmettre des informations – de carte – sensibles), la croissance de la fraude et des fuites de données expliquant probablement ce comportement. Voilà très certainement l'angle d'attaque à retenir à l'avenir pour susciter l'engouement, surtout s'il est orchestré en parallèle des campagnes sur la protection des données bancaires.

La « découverte » de cette attention à la sécurité est essentielle car le nouveau mode de paiement manque par ailleurs singulièrement de différenciation, notamment en termes d'expérience client, par rapport à celui qui domine aujourd'hui, que la plupart de ses utilisateurs préfèreront donc conserver, ne serait-ce que par pure habitude.

mardi 18 février 2025

Monabanq soulage l'angoisse du découvert

Monabanq
Avec sa protection contre les découverts, Monabanq ne fait que reprendre une idée qui revient à intervalles réguliers dans les banques, sans jamais se diffuser (et je me demande pourquoi). Mais en contextualisant sa présentation, elle en fait aussi un excellent instrument d'incitation à l'épargne… qui pourrait encore être enrichi.

Le principe mis en œuvre par la filiale du Crédit Mutuel est trivial (raison pour laquelle il devrait être généralisé depuis longtemps, sous une forme ou une autre) puisqu'il consiste à programmer un transfert automatique d'un montant spécifié depuis un compte d'épargne (provisionné) au choix (pour les clients qui en ont ouvert plusieurs) vers le compte courant, dès que le solde de ce dernier atteint un seuil prédéterminé (en général proche de zéro, indiquant le risque imminent de passer dans le rouge).

Traditionnellement, les options de ce genre sont proposées par les institutions financières qui savent qu'une majorité des personnes se laissant aller vers le découvert sont en réalité distraites et, de manière générale, peu attentives à leur situation financière, alors qu'un virement effectué à temps leur éviterait des déconvenues… et des frais souvent élevés. L'adoption d'un mécanisme autonome répond parfaitement à leur besoin, en éliminant le problème à la racine sans interférer avec leur insouciance.

Mais Monabanq introduit cette fonction dans le cadre plus large de son service Monabudget, et lui donne ainsi une autre dimension, au moins aussi importante. Le régulateur de découvert est en effet associé, explicitement, à un système tout aussi classique d'épargne automatique : l'utilisateur choisit le jour et la fréquence de l'opération, la somme maximale à mettre de côté, le minimum de disponibilités à préserver et le compte à créditer, les logiciels de la banque s'occupent du reste.

Monabanq – Service Monabudget

Grâce à cette intelligente combinaison, Monabanq rassure implicitement ses clients vis-à-vis d'un des principaux freins à la mise en place d'un virement d'épargne permanent : à tous ceux qui redoutent que, à l'occasion d'un mois difficile (après une dépense exceptionnelle, notamment), la ponction planifiée fasse passer, plus tard, leur solde en négatif, elle propose une solution élégante qui leur garantit qu'ils n'ont pas à se préoccuper de ce risque et qu'ils n'en subiront aucune conséquence.

J'ai toutefois un petit regret à exprimer face à l'offre actuelle (qui évoluera peut-être ?), car le couplage de cette approche avec un robot intelligent, tel que celui que fournit Oportun (ex-Digit) depuis plus d'une décennie, serait vraisemblablement idéal, avec, d'un côté, un outil capable d'optimiser les fonds mis en réserve selon les habitudes et les comportements de l'individu et, de l'autre, un dispositif de protection qui s'active, en totale transparence, en cas d'imprévu ou d'erreur des algorithmes prédictifs.

En synthèse, avec une idée relativement élémentaire et sa mise en perspective dans un cas d'usage très opportun, Monabanq joue simultanément sur deux paramètres critiques du bien-être financier, au profit de la sérénité de ses clients : la peur du découvert – et ses embarras purement administratifs – et l'encouragement à l'épargne « sans y penser » – et sa contribution à la réalisation de projets, petits et grands.

lundi 17 février 2025

Le bien-être financier par l'exemple

BMO
Pour un deuxième épisode d'une série improvisée sur le bien-être financier, je vous propose aujourd'hui d'aborder un cas concret, sur la base d'une enquête menée par BMO révélant les inquiétudes des canadiens vis-à-vis de leur future retraite… et de l'angle mort que laisse la banque dans son accompagnement de la problématique.

La quinzième édition du sondage annuel dresse un panorama sans équivoque : plus de trois quarts des personnes interrogées craignent de manquer d'argent, en raison de l'inflation, lorsqu'elles cesseront leur activité professionnelle et 63% estiment que les hausses de prix récentes ont réduit leur capacité à mettre de l'argent de côté pour leur pension… alors même que leur évaluation du capital à réunir afin d'envisager un départ serein a sensiblement diminué depuis 2023, à 1,54 million de dollars.

Ceux qui voient fondre leur capacité d'épargne adoptent des stratégies variées, les plus fréquemment citées s'étalant de la modération des autres dépenses de manière à maintenir leurs objectifs initiaux jusqu'à un report pur et simple de leurs efforts, en passant par la baisse (moins drastique) de leurs contributions et la résignation à travailler plus longtemps. Un point commun à ces options, qui doit attirer l'attention, est, naturellement, le stress qu'elles engendrent à la fois pour le présent et pour l'avenir.

Quelle est la réponse de l'institution financière au pessimisme ambiant ? Elle se compose d'une poignée de recommandations génériques – planifier tôt, contrôler son budget, investir dans les supports dédiés et recourir à un professionnel – et de renvoi vers la catégorie de produits spécialisée (REER, au Canada), largement consacrée à ses caractéristiques opérationnelles. Or, sans être hors sujet, une telle approche s'avère extraordinairement décalée par rapport au besoin dégagé par l'étude.

En effet, le désarroi exprimé ne peut être résorbé en répétant des conseils que, si l'on en croit notamment les mesures d'ajustement qu'ils ont déjà prises, les intéressés connaissent et essayent tant bien que mal d'appliquer (et que, incidemment, la banque serait inspirée d'intégrer de manière contextuelle dans ses outils « digitaux » pour plus d'efficacité). Ce qui serait vraiment utile et pertinent face à leurs angoisses, en revanche, serait de leur apporter des éléments de réassurance quant à leur plan de retraite.

Valider et re-valider les hypothèses de départ, financières et autres. Confirmer que les projections prises en compte restent d'actualité. Apprendre à adapter les versements aux contraintes et opportunités de la conjoncture. Etc. Des actions de cet ordre, renouvelées aussi souvent que nécessaire, en complément d'un suivi personnalisé régulier, sont indispensables pour ramener un peu de tranquillité d'esprit et de confiance dans l'avenir, ce qui constitue bien le cœur du problème à traiter.

Un conseiller de proximité, toujours disponible, représenterait évidemment le vecteur idéal pour ce genre de démarche. Mais, dans une perspective un peu plus réaliste, un agent virtuel pourrait également fournir une bonne partie du coaching requis…

Retraite

dimanche 16 février 2025

L'IA face aux clients, toujours bridée

BBVA
Tandis que, dans le secteur financier, la plupart des applications de l'intelligence artificielle générative restent internes, par crainte de dérapages, BBVA compte parmi les premières à en proposer une mise en œuvre directement à ses clients. Mais l'initiative s'avère tellement prudente qu'elle ressemble à ce que la banque faisait déjà en 2012 !

C'est donc une nouvelle version de l'assistant virtuel Blue de l'établissement, dont le déploiement, progressif, est planifié à partir du 20 février, qui intègrera les capacités d'IA. Elles doivent le rendre plus efficace et, surtout, capable de répondre à plus de demandes qu'auparavant. Dans le premier registre, ses compétences renforcées en matière de compréhension et de génération du langage naturel, grâce à un « grand modèle » (LLM), figurent ainsi parmi les principales améliorations citées.

Sur le second aspect, BBVA nous indique que l'outil est initialement conçu pour traiter quelques 150 demandes et transactions différentes, en soulignant que, derrière ce mot de « transaction », elle implique que l'agent est désormais en mesure d'exécuter des actions et non plus seulement de répondre à des questions. Afin de faciliter ces interactions, en s'adaptant aux spécificités de communication de chacun, les algorithmes peuvent interpréter plus de 3 000 formulations (soit une vingtaine par sujet, ce qui semble finalement assez peu par rapport à ce qu'on attendrait d'une IA générative).

Outre son aptitude linguistique, Blue bénéficie également de progrès sensibles dans la gestion de la conversation. Il sait notamment prendre en compte les digressions : quand le client change de thématique pour revenir plus tard à sa préoccupation initiale, il reprend le fil de l'échange de manière transparente (après avoir traité le point intermédiaire). L'utilisateur a également la faculté d'annuler une opération à tout moment et de requérir l'intervention d'un interlocuteur humain dès qu'il l'estime nécessaire.

BBVA Blue

Bien entendu, BBVA met un point d'honneur à fournir tous les éléments de réassurance indispensables face aux risques connus de l'IA générative. Il est ainsi question de ses exigences sans concession de sécurité et de protection de la confidentialité des données, mais aussi de la spécialisation bancaire de son automate et de l'ensemble de contrôles et de garde-fous qu'elle a mis en place dans le but de garantir un alignement permanent avec ses obligations commerciales, réputationnelles et réglementaires.

La présentation est séduisante… mais, à travers toutes ses caractéristiques, elle rappelle précisément les promesses de Lola, la première génération d'assistant personnel que la banque expérimentait il y a plus d'une décennie (et qui fut rejointe par quelques collègues à la même époque). Nul ne parlait alors d'intelligence artificielle et peut-être les performances de ces pionnières, focalisées sur les interfaces vocales, notons-le, n'étaient-elles pas suffisantes pour convaincre les clients.

Toujours est-il que la version qui arrive aujourd'hui surfe à l'excès sur la vogue de l'IA générative, qui n'est, en réalité et au mieux, exploitée que pour sa maîtrise de la langue, les « raisonnements » sous-jacents restant apparemment pilotés par des mécanismes classiques (et sans danger) de règles préprogrammées. Cette avancée, somme toute modeste en regard de l'évolution des systèmes de traitement du langage, parviendra-t-elle à vaincre les résistances des consommateurs vis-à-vis des chatbots ?

samedi 15 février 2025

Des ETF toujours plus sophistiqués

CaixaBank
Au début, on traduisait l'acronyme ETF (pour « Exchange-Traded Fund », soit, littéralement, fonds négociable en bourse) par l'expression « fonds indiciel » car ces instruments étaient pour la plupart destinés à répliquer les performances des indices publics, tels que le CAC 40, le Dow Jones ou le S&P 500. Cette période est désormais révolue.

Dernier témoin en date de l'évolution, CaixaBank et Amundi en ont concocté une nouvelle incarnation, baptisée « Cycle de Vie », proposant à ses clients une composition dynamique dont l'exposition au risque se réduit au fur et à mesure du rapprochement de la maturité visée, celle-ci s'étalant entre 5 et 14 ans sur 4 variantes distinctes. Concrètement, et classiquement, l'allocation en actions initiale est progressivement remplacée par des obligations, selon une feuille de route déterminée dès l'origine.

L'objectif est, naturellement, de mieux répondre aux attentes des clients, tels que les perçoit plus directement CaixaBank, en particulier quand il s'agit de les accompagner dans la réalisation de leurs projets à moyen et long terme, future acquisition d'une résidence ou préparation de la retraite, par exemple. Pour ceux-ci, la stratégie d'investissement généralement recommandée consiste à commencer par une posture relativement agressive mais risquée, à modérer lorsque l'échéance se précise.

Jusqu'à maintenant, l'application de ce genre de recommandations relevait de la responsabilité d'un gestionnaire de patrimoine, humain pour les privilégiés ou sous les traits d'un robot-conseiller pour le commun des mortels. C'est lui qui appréhende les besoins et les préférences de son client et qui ajuste en conséquence le contenu de son portefeuille tout au long de sa vie. Or voilà que débarque une autre solution qui, grâce à l'automatisation de la gestion, comme tous les ETF, casse les prix (0,18% de frais annuels contre environ 1% pour les plates-formes en ligne les plus abordables).

Avec la sophistication croissante des fonds disponibles sur le marché, le rôle des professionnels de l'investissement devrait logiquement évoluer, en tous cas pour la majorité des consommateurs, qui ne requièrent pas le recours à des instruments exotiques : le pilotage actif des portefeuilles peut laisser place à une focalisation sur l'écoute du client et le conseil personnalisé (en amont), la mise en œuvre pouvant ensuite se traduire par une sélection de fonds adaptée à chaque cas spécifique.

CaixaBank x Amundi

vendredi 14 février 2025

Une assurance e-réputation paramétrique

Bessé
Bessé et Hiscox combinent leurs expertises respectives de conseil en assurance et de gestion des crises afin de proposer une garantie paramétrique destinée à couvrir les risques de réputation en ligne des entreprises françaises. Elle s'adresse dans un premier temps au secteur agroalimentaire, qui est un des plus sensibles en la matière.

Le principe du contrat « e-réputation » correspond aux normes reconnues des modèles paramétriques : dès le franchissement d'un seuil prédéterminé sur l'indice d'exposition qui sert de référence partagée, l'indemnisation prévue est versée automatiquement. L'approche se révèle particulièrement adaptée aux préjudices d'image, susceptibles de prendre très rapidement une ampleur considérable et contre lesquels le déploiement d'une riposte, potentiellement coûteuse, doit donc être le plus réactif possible.

Le paramètre retenu pour évaluer la dégradation de la réputation du client constitue évidemment le cœur du produit. En l'occurrence, les deux partenaires ont analysé 11 ans d'historique d'interactions sur les médias sociaux portant sur 166 marques de l'agroalimentaire, dont 60% ont vécu des alertes médiatiques et 14% ont subi des crises majeures. À partir de ces travaux, ils ont élaboré un modèle qui permet de mesurer le risque à partir des échanges publics et d'en dériver une offre d'assurance adaptée.

La méthode s'avère astucieuse car la diffusion du score en temps réel (ou presque) fournit également un support à la prévention ou, à tout le moins, à la minimisation des impacts d'un incident. En effet, pour peu qu'une surveillance s'organise (en complément des outils de pilotage habituels sur le web social), les responsables pourront détecter en avance les poussées de fièvre qui présagent peut-être d'une catastrophe à venir. Et on sait qu'un désamorçage précoce de ces situations est infiniment plus efficace.

Bessé – E-réputation

À mon avis, le dispositif comporte tout de même un point faible, dans le sens où l'assureur va devoir convaincre ses clients de la légitimité de son indice d'e-réputation et des résultats qu'il génère. La question se posera à la souscription, où la démonstration des performances sur le passé peut suffire à surmonter les réticences, et surtout en cas de sinistre, si un désaccord surgit sur la perception qu'en a la victime et la traduction qu'en fait le calcul officiel. Le problème ici est l'absence d'indépendance et de transparence de ce dernier, qui sont de rigueur avec les systèmes paramétriques.

De ce point de vue, la solution de Bessé et Hiscox – si elle parvient à franchir l'obstacle (en montrant que ses bénéfices méritent quelques concessions) – ouvre une nouvelle voie pour le concept paramétrique, dans laquelle il ne serait plus nécessaire de s'appuyer sur des relevés d'un tiers de confiance mais où l'assureur peut aussi fixer ses propres règles. À moins qu'il ne faille plutôt envisager la création d'un nouveau métier qui consiste justement à produire ces outils à l'écart de tout contrôle de l'industrie, en cultivant l'ouverture (de type « open source » ?) et la recherche de consensus.

jeudi 13 février 2025

La réalité mixte ne prend pas

Microsoft
Il y a quelques jours, nous apprenions l'abandon de HoloLens par Microsoft, dont le contrat de dernier recours, avec l'armée, est repris par un tiers. Puis vint le tour du patron des technologies de Meta, fixant un ultimatum à ses équipes sur la réalité virtuelle (et le métavers). Retour sur l'échec d'une aventure pourtant prometteuse.

Pour Microsoft, le produit, lancé en 2015, aurait enregistré un total cumulé de 300 000 ventes, éclairant la décision d’arrêter les frais, qui, dans ces conditions, paraît même bien tardive. Du côté de Meta, 2025 est officiellement déclarée année de la dernière chance : sans résultats probants, les initiatives finiront dans les annales comme un désastre spectaculaire. Enfin, l'Apple Vision Pro, dernier entrant sur le marché, fait l'objet de rumeurs de capitulation moins de deux ans après son annonce.

Les ambitions étaient pourtant gigantesques et justifiait à l’époque d’y engouffrer des milliards de dollars. Comment expliquer une telle déconvenue, alors que les exemples de technologies censées révolutionner nos vies quotidiennes se multiplient et absorbent elles aussi des budgets colossaux dans les entreprises qui rêvent de saisir leurs opportunités… sans certitude de succès ? Tous les innovateurs peuvent (et doivent) profiter de ce retour d’expérience exceptionnel pour affiner leurs stratégies.

Naturellement, il n’existe pas une raison simple derrière le fiasco, il faut plutôt explorer une combinaison de facteurs. Les deux principaux touchent évidemment au coût et aux applications. Le prix de l’équipement est en effet rédhibitoire quand les utilisations proposées restent marginales, par exemple sans une « killer app », sachant que cette dernière est d'autant plus difficile à inventer qu'elle implique de convaincre les utilisateurs de porter un casque peu confortable. Inversement, les éditeurs potentiels sont frileux vis-à-vis des investissements massifs requis pour créer des logiciels exploitant toutes ses capacités tant que le marché est réduit.

Pour prendre une comparaison avec la naissance de l’iPhone, nous avions là un appareil certes coûteux mais qui offrait immédiatement une expérience inédite de l'internet mobile, sur laquelle n’importe quelle entreprise pouvait ensuite se greffer, d’abord via le web puis via des applications natives, sans trop de complications et avec des niveaux de budgets raisonnables (ce qui n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui mais nous sommes passés, depuis longtemps, dans une phase de généralisation).

Cependant, si vous ne vous contentez pas de ces explications relativement superficielles, je propose d’en décrypter les causes sous-jacentes. Un second étage d’analyse, en quelque sorte. Il faut alors se pencher sur les acteurs à l’origine des initiatives, Microsoft et Meta. Tous deux ont envisagé la réalité mixte (et le métavers, incidemment) en priorité comme un média additionnel pour leur principale source de revenus, l’informatique professionnelle pour l’un et les réseaux sociaux pour l’autre.

En bridant d’emblée leur vision, ils étaient quasiment assurés de manquer l’application et le marché qui auraient pu faire décoller les ventes, et qui se révèleront (peut-être) un jour dans un domaine totalement étranger à la zone de confort de ces géants de la technologie. En ce sens, l’irruption d’Apple représentait une tentative mieux conçue, plus ouverte à la sérendipité et aux accidents heureux. Mais elle n’a pas encore abouti, bien sûr, et nul ne sait combien de temps peut durer la gestation de cette rupture.

Pour devenir une innovation réussie, une idée doit se matérialiser ET conquérir une cible de clients. Très clairement, c'est cet aspect que la réalité mixte a (pour l'instant) raté, à travers un déséquilibre excessif entre fonction – dans un contexte de liberté d'imagination doublement contrariée – et prix – celui-ci étant à prendre au sens large, incluant les coûts pour l'utilisateur final et pour les indispensables partenaires et qui pourraient également intégrer des coûts dérivés (par exemple environnementaux)

Apple Vision Pro

mercredi 12 février 2025

J.P. Morgan choisit Klarna pour le BNPL

J.P. Morgan Chase
Dans une industrie où les grands groupes ont tendance à vouloir toujours développer leurs propres solutions, J.P. Morgan Payments, premier acquéreur du commerce de détail du monde, conclut un partenariat avec Klarna afin d'intégrer la solution de paiement fractionné (BNPL) de ce dernier. Comment expliquer un tel choix ?

La question mérite d'être posée : après tout, pourquoi la plus puissante banque américaine préfère-t-elle se tourner vers une jeune pousse pour fournir un service que, à première vue, elle pourrait répliquer grâce à ses ressources et ses moyens quasiment infinis ? Je n'ai évidemment pas la réponse, alors, parce qu'elle pourrait constituer une source d'inspiration, j'imagine quelques hypothèses plus ou moins plausibles…

Commençons par la plus simple : la banque répond à une demande de ses clients (ce qui serait une bonne nouvelle en soi, bien qu'un peu tardive). Pour les marchands équipés de ses outils, l'absence d'une option qu'ils voient se répandre chez leurs concurrents, leur permettant de conquérir des parts de marché, génère probablement une frustration susceptible de les encourager à changer de fournisseur. L'urgence de la situation justifierait alors le recours à un tiers… en attendant une réalisation maison ?

Variante relativement peu réaliste, peut-être les responsables de la plate-forme de J.P. Morgan estiment-ils que le BNPL n'est pas une activité suffisamment attractive, notamment sur le long terme (entre autres face aux menaces réglementaires), pour y consacrer plus qu'un minimum d'efforts. À moins que ses équipes aient pris conscience de leur incapacité à rivaliser avec le numéro un incontesté du sujet, ce qui révélerait une clairvoyance aussi rare (et, malheureusement, improbable) que louable.

Klarna x J.P. Morgan

Un autre scénario envisageable, toujours dans le même registre, correspondrait à une faille organisationnelle, pas forcément surprenante dans une entreprise de la taille de J.P. Morgan : le département en charge de l'acquisition ne communiquant pas avec ses pairs du crédit et de ses produits dérivés, retient l'offre externe la plus prometteuse sans s'inquiéter de ce que font ses voisins. Si tel était le cas, une crise de gouvernance serait à craindre (et, en même temps, à espérer, afin d'éviter de reproduire l'erreur).

Dans une perspective plus machiavélique, l'institution financière ne serait-elle pas plutôt engagée dans une démarche d'analyse en profondeur du fonctionnement du paiement fractionné, pour laquelle rien ne vaut, naturellement, une mise en œuvre concrète ? En arrière-plan, l'objectif final pourrait être un rachat (je n'y crois guère car la méthode paraîtrait alambiquée) ou, plus vraisemblablement, la création d'une future copie élaborée grâce à la connaissance accumulée à travers cette expérience.

L'avenir nous éclairera certainement sur la réalité de la stratégie sous-jacente. Dans tous les cas, le principe d'une collaboration, dans son cœur de métier, entre une institution financière et le leader d'un modèle innovant, sur lequel il pèse déjà très lourd, illustre un certain changement d'approche dans le développement traditionnel de la banque.

mardi 11 février 2025

C'est quoi le bien-être financier ?

Cofidis
Le bien-être financier est un sujet qui me tient à cœur et que j'évoque régulièrement dans ces colonnes. Or, quand je l'aborde lors de mes échanges avec des professionnels du secteur financier, ils me posent régulièrement la question : mais de quoi s'agit-il exactement ? Je vous propose aujourd'hui un mini-billet afin de répondre à cette interrogation… à partir des résultats d'une enquête menée par Cofidis.

D'après ce sondage, réalisé pour la première fois à l'occasion de la Saint Valentin 2025 qui approche, une statistique ressort tout particulièrement : sept couples sur dix déclarent que l'argent constitue pour eux un sujet d'inquiétude, y compris pour ceux – et ils représentent la majorité de l'échantillon – qui estiment que leur pouvoir d'achat est correct. Alors, si je devais résumer en une courte phrase en quoi consiste le bien-être financier, je dirais qu'il s'agit « simplement » d'éliminer ces angoisses.

En arrière-plan, différents mécanismes entrent en jeu, entre la crainte de ne pouvoir faire face à un imprévu et la difficulté à mettre un pécule de côté. Ces perceptions ne sont pas toujours rationnelles. Par exemple, dans le premier cas, ceux qui disposent d'une réserve confortable peuvent tout de même être angoissés à l'idée de perdre leur emploi ou de subir une incapacité, tandis que, dans le second cas, les incertitudes sur le « bon » niveau d'épargne pour les projets envisagés est susceptible de miner le moral.

Face à ces préoccupations, les produits financiers n'apportent pas seuls une réponse satisfaisante : même avec un pactole de sécurité et des assurances pour tous les risques imaginables, certaines personnes continueront à stresser. Et, selon les profils psychologiques des individus, d'autres catégories d'anxiété s'exprimeront. Ce qu'il faut pour restaurer la sérénité, c'est un accompagnement de proximité, dans la durée, qui redonne un sentiment de confiance et de sécurité, sur le moment et pour l'avenir.

Voilà un défi qui mériterait d'être relevé, ne serait-ce que pour différencier les offres bancaires tellement banalisées aujourd'hui : aider 70% de la population à améliorer son bien-être financier et, en lui restituant de la sorte le pouvoir sur son argent, en faire des clients plus fidèles, qui, lorsqu'ils acquièrent un nouveau produit, le font parce qu'il contribue à leurs objectifs et en sont redevables à leur fournisseur. Qui est prêt à se lancer dans une telle aventure d'innovation (qui n'est résolument pas une utopie) ?

Enquête Cofidis

lundi 10 février 2025

Visa intègre une assurance paramétrique

Visa
Alors que de jeunes pousses de l'InsurTech tentent de s'emparer du marché lucratif des assurances associées aux moyens de paiement, jusqu'à maintenant largement contrôlé par les réseaux de carte, Visa prépare (pour l'Europe) une riposte originale, grâce à une collaboration avec le spécialiste de l'approche paramétrique Companjon.

Comme il est d'usage en la matière, le produit est mis à la disposition des émetteurs, qui feront le choix ou non de l'exposer à leurs clients. En revanche, contrairement à l'habitude, il ne s'agit pas d'une couverture directement applicable aux achats éligibles, comme le sont par exemple les garanties sur les annulations de voyage, la perte ou la casse d'objet, la franchise des locations de véhicule… En l'occurrence, la nouvelle solution est plutôt conçue comme une option contextuelle relativement classique.

Concrètement, l'objectif consiste à proposer au porteur de carte de souscrire une protection contre les intempéries – pluie, neige, température anormale… – à chaque fois qu'il effectue un achat dans un domaine pertinent : billet de concert en plein air, séjour balnéaire, excursion en montagne… L'émetteur est libre de configurer les paramètres de déploiement à sa convenance, ce qui fait donc de Visa un intermédiaire de mise en relation avec son partenaire plus qu'un fournisseur du service.

La prime exigée est calculée en temps réel, par les modèles d'IA de Companjon, en fonction des différents facteurs de risque, dont, naturellement, le lieu, la saison et les spécificités de l'événement considéré. Le fonctionnement de la garantie est sans surprise pour sa catégorie : si le seuil (de précipitations, de température…) inscrit au contrat est dépassé sur la période prévue, selon des mesures de référence officielles, l'indemnisation, prédéterminée, est versée automatiquement au bénéficiaire.

Companjon Weather Protection

L'initiative reflète un effort nécessaire de diversification de Visa face à la menace grandissante de trublions distribuant des assurances qui correspondent mieux aux attentes des consommateurs. Elle apporte également une opportunité de différenciation aux émetteurs, d'autant qu'ils pourront la décliner selon leur bon vouloir (et les audiences qu'ils ciblent). Cet aspect devrait d'ailleurs inspirer les acteurs qui conçoivent eux-mêmes les couvertures accompagnant leurs offres de moyen de paiement.

Et pour les utilisateurs finaux ? Si l'adoption par l'industrie est au rendez-vous, l'arrivée plus ou moins massive d'incitations à souscrire une garantie lors de leurs emplettes représentera une formidable sensibilisation aux principes de l'assurance enfouie et paramétrique, qui est pour l'instant beaucoup trop discrète, et, par conséquent, méconnue et source potentielle de méfiance, pour prétendre à une diffusion étendue.

dimanche 9 février 2025

Une délégation bancaire pour les aidants

Huntington Bank
La gestion des finances personnelles est une question épineuse, souvent source de conflits, pour les personnes en perte d'autonomie et leurs aidants : sans intervention, les risques de problèmes et d'incidents s'accumulent mais, avec une procuration, la crainte d'abus nuit à la relation. Alors Huntington propose une solution intermédiaire.

Naturellement, nous ne parlons pas ici des cas dans lesquels le ou les individus désignés pour l'assistance requièrent un accès légitime aux fonds de celle ou celui dont ils ont la charge. Mais dans de nombreuses circonstances, qu'il s'agisse de quelqu'un qui souffre de troubles cognitifs légers, qui est hospitalisé ou en convalescence, qui se sent dépassé par les sujets d'argent…, il peut être utile, voire critique, qu'un tiers de confiance puisse simplement surveiller de près sa situation financière.

Telle est donc la promesse de l'option « caregiver banking » déployée par Huntington. Activée exclusivement par le titulaire du compte, elle permet à ce dernier de partager – sans danger et sans renoncer à l'entier contrôle sur son patrimoine – un ensemble de fonctions essentielles avec un proche (ou un professionnel, le cas échéant) de son choix, qui, accessoirement, n'a pas besoin d'être lui-même client de l'institution.

Doté d'identifiants de connexion spécifiques, l'aidant utilise les applications web et mobile habituelles de la banque, où il a la possibilité de consulter l'historique de transactions, de manière à identifier et signaler les opérations potentiellement suspectes ou accidentelles, régler les factures en souffrance (sans pouvoir enregistrer de nouveaux créanciers) ou encore effectuer des virements entre les comptes de la personne suivie (et aucun autre, surtout externe), afin d'éviter un découvert, par exemple.

Huntington – Caregiver Banking

Le service atteint de la sorte un équilibre quasi parfait entre la satisfaction des besoins des personnes fragiles et un principe de précaution qui écarte toute éventualité de litige. D'un côté, toutes les capacités nécessaires à la fois à la protection de l'argent et au respect des obligations financières quotidiennes sont fournies. De l'autre, la confiance ne pourra à aucun moment être entachée par un soupçon quelconque, de la part de l'individu accompagné ou de sa famille, garantissant une relation sereine.

Tout comme sur le volet environnemental de la RSE, malgré des engagements sociétaux proclamés haut et fort, l'industrie bancaire est encore loin d'être irréprochable dans sa prise en considération des besoins et des attentes de leurs clients les plus fragiles – qu'ils soient dépendants ou affectés par un handicap – ce qui les mène fréquemment aux frontières de l'exclusion. L'initiative de Huntington esquisse une des réponses possibles aux innombrables défis qui restent à relever en la matière.

samedi 8 février 2025

Le malaise du conseiller bancaire

France Inter
L'émission « On n'arrête pas l'éco » de ce matin, sur France Inter, était consacrée en grande partie à l'évolution de la banque et plus particulièrement celle du métier de conseiller. Elle fournissait une occasion rare de mieux appréhender les terribles contradictions qui l'affectent… et l'absence de perspective réaliste à long terme.

Aujourd'hui, plus personne ne le conteste, la banalisation et la généralisation des outils électroniques ont totalement transformé la relation des institutions financières avec leurs clients, imposant une nécessaire transition du rôles des collaborateurs de première ligne vers le conseil à valeur ajoutée. Or le besoin se fait essentiellement ressentir lors de trois moments clés de l'existence : l'achat de la résidence principale, la séparation (divorce) et le décès. Ce qui laisse peu d'occasions d'exercer son expertise.

Ce constat, qui semble caricatural mais reflète une indiscutable réalité, entraîne, d'une part, une remise en question profonde du dimensionnement des réseaux d'agences et de leur effectifs et, d'autre part, et les principaux intéressés en ont pleinement conscience, la perte de connaissance du client, de sa situation, de ses préférences, de ses projets, de ses difficultés… sans laquelle il est très difficile d'être pertinent.

Les discours prennent ensuite une tournure ubuesque, quand les responsables affirment que, à l'avenir, le conseiller restera indispensable dans la mesure où il sera capable d'apporter un service personnalisé. Mais comment un employé pourra-t-il respecter une telle injonction sans savoir qui est son client et quelles sont ses attentes implicites ? Les conditions sont évidemment réunies pour exacerber l'insatisfaction de tous, entre un conseiller qui ne peut que proposer des recommandations (produits) génériques et un client qui se sent incompris dans les moments où il a besoin d'aide.

Dans un registre anecdotique, le reportage sur une formation spécialisée, inclus dans l'émission, laisse entrevoir le décalage entre les promesses et leur déclinaison sur le terrain. Dans un exercice, un « élève » se voit suggérer de désamorcer une crise avec un client, matérialisée par un courriel de ce dernier, en le rappelant au téléphone, sous prétexte qu'une communication écrite envenimera le conflit. Triste exemple de réflexe préhistorique, alors que le monde moderne impose d'apprendre à communiquer efficacement sur tous les médias, dont, surtout, celui privilégié par son interlocuteur.

Au milieu de ce paysage dévasté, surgit l'utopie de l'intelligence artificielle résolvant tous les problèmes. Ce serait elle qui donnerait – sans le remplacer, nous garantit-on – au pauvre humain submergé les moyens de maîtriser un catalogue trop riche, de prendre en compte des réglementations pléthoriques (qui le handicapent dans son travail, bien sûr) et d'adapter ses conseils à l'individu à qui il a affaire. Mais d'où prétend-elle extraire l'information nécessaire pour accomplir ce miracle ? Nul ne sait.

Si les banques traditionnelles tiennent absolument à conserver leur modèle historique d'interactions personnelles, elles devront d'abord réconcilier ces discordances. Il leur faudra, entre autres, accepter de changer radicalement leurs pratiques de recrutement, en choisissant des profils de coachs plutôt que commerciaux, à l'aise sur tous les médias et pas exclusivement dédiés aux échanges en face à face (ou au téléphone), leur offrir une formation réellement adaptée. Surtout, elles devront mettre en place une vraie stratégie de connaissance du client qui soutienne leur nouvelle (?) mission.

France Inter – On n'arrête pas l'éco