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C'est pas mon idée !

dimanche 31 janvier 2016

Un concept store pour la MAIF

MAIF
Après avoir frappé le secteur bancaire, la mode des « agences concept » touchera-t-elle l'assurance ? L'avenir le dira. En attendant, la MAIF inaugurera bientôt l'un des premiers espaces du genre en France. En dehors d'un site web dédié au recrutement de sa nouvelle équipe, diverses sources permettent de se faire une petite idée du projet…

En effet, le lieu – baptisé MAIF Concept – est actuellement en cours d'aménagement et de recherche de son personnel, pour une inauguration officielle prévue, selon toute vraisemblance, pour le printemps 2016. Les postes ouverts dès aujourd'hui – un responsable général et un responsable de l'animation – ainsi que ceux qui le seront prochainement – entre animateurs et conseillers – éclairent immédiatement la double vocation – commerciale et relationnelle – que donnent ses concepteurs à l'initiative.

Le cœur du dispositif – qui occuperait 1000 à 1500 m² dans la rue de Turenne, à Paris – est donc d'abord une agence, dans laquelle les sociétaires retrouveront les services de conseil et de vente auxquels ils peuvent s'attendre. En parallèle, une approche plus innovante proposera aux visiteurs de nouvelles expériences, principalement centrées sur la relation client. Enfin, il est également question d'organiser là des événements – ateliers, spectacles (?), forums… – et d'offrir des capacités de « co-working ».

Espace MAIF Concept

En fait, c'est à la lecture des commentaires des organisations syndicales (par exemple ici) que les contours du projet commencent à prendre forme. Car ce « MAIF Concept » ne vient pas seul : il est combiné à un laboratoire d'innovation interne (basé à Niort). Ce dernier hébergera en permanence une dizaine de personnes dont la plupart seront des collaborateurs détachés pour quelques mois, le temps de concrétiser une idée originale. Le fruit de leur travail pourra alors être testé à Paris, en conditions réelles…

L'ensemble comprend de la sorte les deux volets essentiels d'un programme d'innovation moderne et efficace : l'implication active des salariés dans la démarche, d'une part, et la collaboration (voire la co-création) avec les clients, d'autre part. La singularité de la déclinaison qu'en dessine la MAIF est de séparer clairement les deux parties, peut-être en raison de contraintes pratiques (le siège et, donc, les effectifs sont concentrés à Niort, tandis qu'il est plus facile de mobiliser des sociétaires à Paris).

Naturellement, le risque inhérent à un tel découpage des rôles est de déconnecter le déroulement des expérimentations vis-à-vis des réactions, des attentes et des besoins des clients ou, à tout le moins, de perdre en réactivité et en agilité par la distance. Il serait tellement plus simple et plus performant d'immerger le laboratoire au cœur de l'agence… À défaut, il reste à espérer que les deux composantes du dispositif mis en œuvre fonctionneront en étroite symbiose et non isolées l'une de l'autre.

samedi 30 janvier 2016

Facebook, l'expérience plutôt que le paiement

Facebook
Au milieu de l'euphorie qui entourait cette semaine l'annonce des résultats financiers de Facebook pour 2015, dépassant les prévisions de tous les analystes, une petite voix dissonante s'élevait pour souligner la chute de ses revenus liés aux paiements. Une apparente fausse note qui révèle en fait probablement une stratégie brillante…

Bien sûr, la tendance est incontestable : tandis que le chiffre d'affaires trimestriel de la publicité dépasse 5,6 milliards de dollars, en hausse (vertigineuse) de 57% par rapport à 2014, les paiements s'effondrent de 21%, à 204 millions. Au-delà du motif officiellement invoqué (une baisse des recettes sur les jeux pour PC), la véritable raison de ce déclin est parfaitement claire et est laissée sans équivoque par Mark Zuckerberg, quand il affirme [PDF] « Facebook n'a pas vocation à devenir une entreprise de paiements ».

J'imagine aisément les soupirs de soulagement des acteurs du secteur au moment où ils réalisent que cette déclaration est parfaitement sincère, voyant du même coup s'éloigner une menace qu'il leur a toujours été difficile de cerner. Pourtant, ce revirement – si tant est qu'il puisse être question de revirement – ne signifie pas que les paiements ne vont pas être bouleversés par le réseau social et que les fournisseurs de solution peuvent se reposer sur leurs lauriers (et affronter d'autres concurrents disruptifs).

En réalité, l'ambition profonde de Facebook est, comme pour la plupart des acteurs du « digital », d'offrir une expérience utilisateur captivante, complète et transparente. Or, avec ses outils de messagerie, Messenger et WhatsApp, l'entreprise et ses annonceurs commencent à entrevoir des opportunités concrètes d'accompagner ainsi les consommateurs depuis la publicité jusqu'à l'acte d'achat. Naturellement, ce parcours va inclure – dans la majorité des cas – une étape de paiement…

Le trait de génie (?) de Mark Zuckerberg est de prendre conscience que ce besoin n'impose pas de créer une nouvelle solution, qui risque de disperser les efforts, qui requiert des moyens importants pour s'imposer et, surtout, qui n'apporte que peu de valeur ajoutée (et de très faibles marges), en tant que telle. À l'inverse, la mission stratégique de procurer une expérience optimale peut parfaitement être remplie avec les plates-formes de paiement existantes ou en émergence (Apple Pay n'est pas loin…).

L'impact pour les intermédiaires de paiement ? Au vu des enjeux, il sera certainement extraordinaire : à l'heure des choix, Facebook privilégiera logiquement les partenaires qui faciliteront l'atteinte de ses objectifs, en particulier en matière de fluidité des transactions. À la clé, ce sont 800 millions d'utilisateurs (mensuels) de Messenger dans le monde – sans compter le milliard d'adeptes de WhatsApp – qui deviendront de la sorte des clients plus ou moins captifs des solutions les mieux intégrées…

Au-delà de ces considérations immédiates, l'approche de Facebook représente également un exemple instructif de fusion des services financiers au cœur d'une expérience globale, qui, en prime, démontre – résultats comptables à l'appui – le renversement possible des modèles économiques…

Paiement dans Facebook Messenger

vendredi 29 janvier 2016

Apple Pay arrive sur le GAB

Apple Pay
En l'absence de toute annonce officielle, les indices s'accumulent : plusieurs grandes banques américaines – parmi lesquelles figureraient Bank of America, Wells Fargo, voire Chase – s'apprêteraient à déployer sur leurs automates une option de retrait d'espèces via Apple Pay. Une avancée indispensable si le paiement sans contact doit décoller.

Il n'est pas question ici d'une immense surprise : les institutions financières sont nombreuses à avoir commencé à expérimenter ce genre de fonction avec Android Pay. Or, même si le porte-monnaie mobile d'Apple est beaucoup plus « fermé » que son alter ego de Google (ce qui rend probablement son intégration plus complexe), il représente une importante population d'adeptes du paiement via le smartphone, qu'il est difficile d'ignorer et qui justifie quelques efforts supplémentaires.

Naturellement, à ce stade, le fonctionnement du futur service est pure conjecture. Ce qui est (à peu près) certain est que l'identification de l'iPhone – et, donc, de la carte associée à Apple Pay – passe par l'interface NFC (sans contact). À cela devrait s'ajouter une étape d'authentification, peut-être assurée, comme avec les terminaux de paiement, par le lecteur d'empreinte digitale TouchID. De la sorte, et suivant en cela la tendance du moment, les interactions physiques avec le GAB peuvent se réduire à l'accès aux billets.

Un bénéfice immédiat de cette approche est de renforcer la sécurité des opérations, par exemple en évitant les fraudes par « skimming » (capture des informations de la piste magnétique par l'insertion d'un lecteur pirate devant la fente réservée à la carte). Bien qu'il faille relativiser les promesses, les fabricants d'automates vantent certainement aussi un gain de temps pour les utilisateurs, susceptible de se traduire par une meilleure rentabilité dans des lieux à fort trafic. Mais il existe une motivation plus impérieuse à la mise en place d'Apple Pay (et d'Android Pay, d'ailleurs) sur les distributeurs…

En effet, tandis que l'adoption du paiement sans contact par le téléphone reste « mitigée », la possibilité d'utiliser le même média pour retirer de l'argent représente un facteur de familiarisation et d'accoutumance des consommateurs (au point qu'une petite banque américaine en a un jour fait un élément de stratégie). Et comme le porte-monnaie mobile ne remplacera pas les espèces à court terme, le modèle perdurera quelque temps, y compris après la disparition des cartes… ce qui en fait également une étape obligatoire pour les acteurs qui parient que la technologie NFC finira par s'imposer.

GAB Diebold

jeudi 28 janvier 2016

6 clés de la banque centrée sur son client

BAI
Les banques qui survivront à la révolution « digitale » sont celles qui adopteront une vision sincèrement centrée sur le client. Au risque de lasser certains lecteurs, cette affirmation mérite d'être martelée sans relâche, tant les belles promesses de la plupart des entreprises concernées ne semblent pas, à ce jour, se traduire dans leurs actes.

Afin de donner quelques pistes de progrès aux candidates à cette transformation, un dirigeant de Mindtree – un prestataire de services basé à Bangalore, en Inde – propose, dans un article pour BAI Banking Strategies, une liste de 6 nouvelles compétences à développer à court et moyen terme. Je vous invite à les passer en revue, non sans y introduire une touche personnelle, notamment dans leurs implications techniques, sur lesquelles les positions de l'auteur tendent à rester relativement conservatrices.

Pour aborder les différents points dans un ordre de maturité croissante, commençons donc par l'exigence d'accès « omni-canal » aux services. Le principe en est né de l'idée qu'il devenait impératif d'offrir aux clients une expérience totalement transparente et toujours égale quel que soit le moyen à travers lequel il souhaite interagir avec la banque à un instant donné. Nous sommes au cœur du sujet et, déjà, il est évident qu'il reste du chemin à parcourir (pensons par exemple aux passages obligés en agence).

Après cette entrée en matière, c'est la connaissance du client qui passe au premier plan. Alors que les banques possèdent des trésors d'information sur les consommateurs, la capitalisation qui en est faite – notamment à travers des outils de CRM (« gestion de la relation client ») un peu dépassés et mal utilisés – reste dérisoire. Il est temps d'apprendre à assembler de vrais profils à partir des données disséminées dans l'organisation, puis, à un stade plus avancé, détecter des tendances et prédire des besoins.

Dès lors, la porte s'ouvre sur l'action, avec des capacités de personnalisation des offres, grâce à la connaissance « dynamique » du client et de son contexte. À l'extrême, chaque individu pourra accéder à des solutions sur mesure, élaborées par une future génération de robots intelligents, rendant obsolètes les segmentations réductrices en vigueur aujourd'hui. Même la mise en place d'un conseiller humain pour expliquer et vendre ces services automatisés fera partie des options proposées à chacun selon ses préférences.

Enfin, au sommet de la pyramide de la focalisation sur le client, c'est la mutation du parcours utilisateur qu'il faudra prendre en compte. Il s'agira alors de réagir aux événements identifiés dans la vie quotidienne des consommateurs, de manière à mettre à leur disposition – en toute transparence et sans aucune rupture dans leur expérience globale (donc non financière) – les solutions nécessaires à la satisfaction de leurs attentes, plus que jamais ajustées à leurs circonstances individuelles immédiates.

En parallèle de cette progression « naturelle », il deviendra rapidement apparent que la banque n'est pas en mesure de construire seule toutes les briques de l'édifice. Ce n'est qu'en collaborant avec des tiers – parmi lesquels figureront probablement des startups de la FinTech – que les meilleurs résultats pourront être obtenus. Or, le déploiement d'API représente un atout extraordinaire pour faciliter ces partenariats, qui ne peut, hélas, être envisagé sur les socles informatiques vieillissants encore trop répandus…

En conclusion, ces 6 propositions dessinent une feuille de route certes ambitieuse, mais suffisamment précise pour constituer les fondations d'un programme concret. À la clé, nous attend ce que je définirait comme la véritable « banque 2.0 » : celle du XXIème siècle, dans laquelle le client a (enfin !) repris le pouvoir.

Client

mercredi 27 janvier 2016

Turbulences sur les métiers de l'assurance

McKinsey Insights
La révolution « digitale » et les progrès de l'automatisation promettent de changer profondément le paysage de l'emploi dans de nombreux domaines d'activité. Les analyses de McKinsey proposent une projection de cette tendance sur le secteur de l'assurance, historiquement stable et prudent, qui risque de subir une transformation radicale.

Si des prédictions du même ordre ont été tenues par le passé, sans jamais véritablement se concrétiser, la situation est aujourd'hui sensiblement différente. Les technologies émergentes de l'analyse de données et de l'apprentissage automatique (« machine learning »), en particulier, sont effectivement susceptibles de rendre obsolètes un certain nombre de tâches actuellement réalisées par des personnes, en apportant un niveau d'efficacité incomparable lorsqu'elles sont exécutées par des algorithmes.

En pratique, la nouvelle donne peut être observée dès maintenant, et pas uniquement dans les startups de l'InsurTech. Pour les experts de McKinsey, 45% des activités menées quotidiennement par les collaborateurs des compagnies d'assurance pourraient être remplacées dès demain par des solutions automatisées, disponibles sur le marché. La conséquence directe est une évolution prévisible, plus ou moins importante, de la plupart des rôles existants dans les organisations, à court ou moyen terme.

Inévitablement, les implications sur l'emploi seront colossales. D'ici à 2025, 25% de postes pourraient disparaître dans le secteur, avec des pertes nettes les plus sévères dans les opérations et dans les fonctions administratives, mais aussi, quoique dans une moindre mesure, dans l'informatique, dont certaines activités répétitives sont également automatisables. Par ailleurs, les positions qui survivront à ce cataclysme seront malgré tout profondément transformées et feront appel à des compétences nouvelles.

Dans ce contexte, l'enjeu sera donc aussi de savoir capter et conserver les talents nécessaires, notamment dans des métiers encore rares, qui sont amenés à se développer (et feront l'objet de recrutements nets), par exemple autour du marketing sur les canaux digitaux, de la détection de la fraude, de l'évitement des sinistres… pour lesquels les compétences en matière de « big data » ou de développement agile (plus seulement informatique, d'ailleurs), parmi d'autres, deviennent primordiales.

Ces perspectives peuvent paraître sombres mais elles sont probablement réalistes. Alors, les acteurs concernés fermeront-ils les yeux – comme ils en ont trop souvent l'habitude – en se convaincant que s'ils ne regardent pas, le cauchemar ne se produira pas ? Ou prendront-ils conscience de l'inéluctabilité du changement et se mettront-ils à le préparer afin d'en minimiser les impacts ? Si cette deuxième option est retenue (ce qui serait éminemment souhaitable), il faut y travailler dès maintenant…

Parapluie

mardi 26 janvier 2016

Quand Barclays « accélère » une équipe interne

Barclays Bank
Les incubateurs et accélérateurs sont devenus très populaires dans les banques britanniques, qui en profitent pour identifier et accompagner leurs futures partenaires et – parfois – concurrentes. Pour Barclays, il s'agit désormais aussi d'une opportunité de changer la manière dont ses projets innovants peuvent être mis en œuvre.

La surprise est arrivée avec l'annonce de la quatrième promotion du Barclays Accelerator (la troisième à Londres) : parmi les 11 candidats retenus – sur un total de plus de 700 dossiers déposés, émanant de 77 pays différents – figure celui d'une équipe de la banque d'investissement de Barclays, baptisé « Smart Contract Templates ». Pas question (à ce stade, en tous cas) de créer une spin-off, l'objectif est bien de faire avancer un projet interne, sous la houlette du « Chief Technology Officer » de l'établissement.

Comme son nom l'indique, le concept qui sera développé au cours des 3 petits mois du programme d'accélération concerne les « contrats intelligents ». Cependant, en dépit de la relation apparente avec la blockchain (et le fait que les collaborateurs qui le portent soient justement des spécialistes de ce sujet), il est abordé sous l'angle original d'un rapprochement de la logique métier (d'exécution automatique des clauses) et des termes juridiques (de rédaction des contrats), à travers la création d'un langage commun.

Bâtiment Barclays

Au-delà du projet lui-même, il est également intéressant de s'attarder sur la démarche adoptée par Barclays et de chercher à en appréhender la logique sous-jacente. Selon un article de l'International Business Times, une compétition a été organisée en interne – à l'échelle du groupe – afin de sélectionner une idée à présenter au comité de sélection. Ainsi, l'objectif visé est de permettre à quelques collaborateurs de porter une innovation de bout en bout, dans un environnement plus favorable que celui de la banque.

En synthèse, c'est donc à une approche inédite que s'essaye Barclays, complémentaire à la fois de l'incubation classique de startups indépendantes et des programmes habituels d'expérimentation, par exemple dans un « lab ». D'une part, elle offre l'avantage d'isoler l'équipe responsable et de lui laisser une certaine autonomie, tout en maintenant son rattachement à la banque. D'autre part, elle permet une immersion dans des conditions d'entrepreneuriat et de collaboration propices à l'aboutissement du projet, impossibles à reproduire au sein de la banque.

lundi 25 janvier 2016

Clink veut conquérir les épargnants passifs

Clink
Trop beau pour être vrai ? Clink n'est pas la première startup à offrir une solution d'épargne automatique adossée à un robot d'investissement (« robo-advisor ») : Betterment est déjà passée par là. Que lui reste-t-il pour se distinguer ? Rendre son service entièrement gratuit, quitte à reporter à plus tard la recherche d'un modèle économique…

Bien sûr, la population que cible la startup est terriblement séduisante : qualifiés d'épargnants passifs, ce sont les innombrables personnes – dont notamment les jeunes adultes – qui ne sont pas particulièrement promptes à mettre de l'argent de côté et qui sont encore plus réticentes, généralement par méconnaissance, à investir sur les marchés financiers. La réponse de Clink est donc un outil mobile qui va se charger de la gestion de leurs investissements à leur place, selon les paramètres qu'ils définissent.

Fondamentalement, le cœur de sa plate-forme ressemble à ce que font tous les acteurs de l'investissement automatisé (un marché qui commence à devenir sérieusement encombré, aux États-Unis) : une gestion basée sur les recherches classiques en la matière (la théorie moderne du portefeuille, en l'occurrence), une large diversification des actifs, afin de maîtriser les risques, et un investissement en fonds indiciels (ETF – Exchange-Traded Funds), de manière à garantir de faibles coûts de transactions.

L'originalité qu'introduit Clink réside d'abord dans l'automatisation de l'épargne associée à ce socle. L'utilisateur va en effet pouvoir connecter son compte courant et décider d'allouer automatiquement une somme donnée à intervalles réguliers (à partir de 1 dollar 2 fois par semaine). Dans un registre plus subtil, il lui est également proposé de connecter sa carte de crédit, sur laquelle il va alors définir un pourcentage de ses dépenses de restaurant ou de ses achats en ligne qui sera prélevé et investi pour lui.

Accueil Clink

Clairement, le choix de la startup est relativement simpliste – un peu comme le service SmartDeposit de Betterment, bien qu'avec une approche différente. Pas d'analyse des comportements qui permettraient d'optimiser l'épargne (à l'instar d'un Digit), l'idée qui prévaut ici est en effet plutôt de laisser le contrôle total au client des sommes qu'il investit, mais en lui demandant une seule fois – ou à sa convenance, ultérieurement – de définir sa stratégie. Il est vrai que les consommateurs ne sont peut-être pas encore prêts à laisser un algorithme « jouer » avec leur argent…

Enfin, que penser de la gratuité du service ? Opérer une plate-forme d'investissement génère des coûts incompressibles, même si ses instruments de prédilection sont des ETF et si des automates sont aux commandes. Pourtant, rien ne laisse entendre que la promesse est temporaire… Alors, Clink envisagerait-elle de concevoir un autre modèle économique, sans les commissions aujourd'hui universelles ? Il sera intéressant de surveiller les futures étapes de son développement ! Quoi qu'il en soit, l'argument a toutes les chances de résonner parmi la clientèle visée et définir ainsi une nouvelle référence…

dimanche 24 janvier 2016

Ford crée son porte-monnaie virtuel

FordPass
Quand il est question de créer une nouvelle expérience, centrée sur le client, les frontières traditionnelles entre secteurs industriels ont naturellement tendance à s'estomper. Voilà comment Ford en arrive à empiéter toujours un peu plus sur le territoire des institutions financières, créant maintenant son propre porte-monnaie virtuel.

Plus qu'un simple slogan commercial, la volonté du constructeur de devenir une entreprise de l'automobile et de la mobilité traduit une véritable ambition de s'immiscer dans la vie quotidienne de ses clients, au-delà de la fourniture et de la maintenance d'un véhicule. Après ses premiers pas au cœur de l'économie du partage, avec son offre de financement dédiée, le prochain lancement (mondial ?) de FordPass représente une étape supplémentaire dans la prise en compte des attentes des individus.

Fondée sur une logique de redéfinition de la relation entre constructeur et consommateur, FordPass se présente comme une plate-forme – ouverte à tous, propriétaires de voitures de la marque ou pas – proposant des services pratiques aux automobilistes. Parmi ceux-ci, l'attention est notamment attirée par les options de recherche et de réservation de parking (fournies par ParkWhiz et Parkopedia), d'une part, et la location de véhicules entre particuliers pendant les voyages (en collaboration avec FlightCar), d'autre part.

En effet, la particularité de ceux-là est de permettre le paiement via le porte-monnaie virtuel FordPay, qui devrait rendre les transactions totalement transparentes pour l'utilisateur. Et il ne s'agit là que d'un début : le co-voiturage et les transports multi-modaux, entre autres, sont déjà évoquées comme extensions possibles, à court ou moyen terme. En ouvrant le champ, il est facile d'imaginer d'autres applications, comme par exemple avec McDonald's et 7-Eleven, partenaires de FordPass par ailleurs…

A smarter way to move

Le concept de FordPay peut prêter à sourire, il n'en soulève pas moins des questions potentiellement dérangeantes. Après tout, la voiture est tellement ancrée dans le quotidien d'une grande partie de la population (et pas uniquement aux États-Unis) que le principe d'une expérience utilisateur optimale organisée à partir d'elle n'est pas plus incongru – probablement beaucoup moins, en réalité – que d'envisager qu'elle puisse émaner d'une banque. Autrement dit, du point de vue du consommateur, le porte-monnaie de l'automobile peut avoir du sens et une certaine légitimité.

Pendant que Brett King invente le futur véhicule autonome possédant son propre compte bancaire ou que Visa présente un prototype de voiture connectée, Ford prend les devants et concrétise dès aujourd'hui quelques-unes de leurs idées. Or, de toute évidence, l'impact de telles évolutions – qui vont nécessairement s'étendre et s'accélérer – sur les modèles historiques de la banque peut être considérable. Il devient donc urgent d'appréhender le monde de demain et d'inventer ses services financiers…

Information repérée grâce à Michal Kisiel (thanks!)

samedi 23 janvier 2016

Wealthfront facilite le transfert de portefeuille

Wealthfront
Jusqu'à maintenant, quand les startups de l'investissement automatisé (les « robo-advisors ») promettaient une meilleure gestion que les acteurs traditionnels, croire leurs affirmations était uniquement affaire de confiance. Désormais, Wealthfront propose un outil (gratuit) d'analyse afin d'identifier et corriger les carences d'un portefeuille existant.

La première cible à laquelle veut s'attaquer la jeune entreprise avec sa solution « Portfolio Review » concerne les frais supportés par les clients. Une étude de State Street et du Boston Consulting Group estime ainsi que les américains ont supporté 277 milliards de dollars de ponctions en 2014 (sans même inclure les honoraires des conseillers). Or, en se basant sur les données de ses propres clients, Wealthfront considère pouvoir drastiquement réduire ces coûts, de 80% dans les cas les plus sévères.

Dans ce domaine, la bataille porte d'abord sur la transparence. En effet, la créativité des institutions financières est sans limite lorsqu'il s'agit de créer de nouveaux types de prélèvements et de les masquer. De sorte que, à la fin de l'année, les investisseurs n'ont aucune idée précise de ce qu'ils ont réellement payé à leurs intermédiaires. C'est donc l'une des missions qu'assure l'outil de Wealthfront : après avoir connecté les comptes qu'il détient, l'utilisateur obtiendra une vue exhaustive des frais qui lui sont facturés.

L'analyse ne s'arrête pas là et le bilan restitué adresse également trois autres pièges classiques de la gestion de portefeuille : l'optimisation fiscale (la stratégie retenue profite-t-elle des opportunités de réduction d'impôts ?), les liquidités disponibles (le matelas de sécurité conservé en cash est-il au meilleur niveau en fonction de la situation de la personne ?) et la diversification des actifs (leur répartition est-elle suffisamment large pour maximiser les revenus, sans modifier l'exposition au risque ?).

Wealthfront Portfolio Review

Dernière étape (logique) du processus, Wealthfront propose à l'investisseur de transférer automatiquement son portefeuille chez elle de manière à améliorer sa performance, s'il fait partie des plus de 9 sur 10 qui – historiquement – comportent des déficiences dans l'une ou l'autre des 4 dimensions de l'analyse. Et, s'appliquant elle-même toutes les leçons qu'elle donne, la startup met un accent particulier sur l'attention qu'elle porte à limiter les impacts fiscaux indésirables d'une telle opération, quitte à maintenir des positions sur les comptes existants, quand cela s'avère préférable, financièrement.

En synthèse, « Portfolio Review » constitue un peu le « rasoir à deux lames » de la gestion d'investissement, rendu possible par les technologies et l'automatisation qu'elles autorisent. La première lame introduit une visibilité inédite et terriblement révélatrice sur les pratiques obscures des établissements traditionnels. La seconde lame facilite la transition vers une nouvelle solution, en garantissant – preuves à l'appui, dans la mesure du possible – qu'elle est opérée au bénéfice du client.

Il est probablement difficile, pour les acteurs ciblés, de lutter directement contre cette incitation au départ. Alors, leur seul véritable recours est d'adopter (enfin) la culture de transparence qui devient rapidement un incontournable du monde contemporain. Si le rejet du secret par leurs clients – ou leur préférence pour des offres plus claires et plus simples – ne suffit pas à les convaincre du besoin de changement, l'apparition d'un service tiers exposant leurs dérives au grand jour devrait les faire réagir !

vendredi 22 janvier 2016

Un guichet pour les néo-banques anglaises

Banque d'Angleterre
Quand le gouvernement britannique décide de promouvoir le développement d'une nouvelle concurrence bancaire, il ne fait pas les choses à moitié. Désormais, les candidats à la création d'un établissement disposent d'un point de contact dédié, mis en place sous l'égide de la Banque d'Angleterre et de ses instances réglementaires.

La « New Bank Start-Up Unit » représente la suite logique d'un mouvement engagé depuis (au moins) 2013. Ainsi, après l'instauration d'un cadre réglementaire adapté au contexte spécifique des jeunes pousses du secteur financier, il s'agit maintenant d'offrir aux entrepreneurs un dispositif d'accompagnement opérationnel, destiné à les aider à appréhender les exigences auxquels ils doivent faire face lorsqu'ils souhaitent fonder une banque et au cours des premières années d'activité de celle-ci.

Le soutien apporté couvre en effet 5 étapes de maturité successives des futures jeunes entreprises, avec les préoccupations associées à chacune d'elles : le concept (vérifier que l'idée de départ requiert un statut de banque), la préparation (rassembler les éléments nécessaires à la constitution du dossier), le dépôt de la demande de licence (comment se déroule le processus), la mobilisation (les recommandations pour exécuter le projet) et le suivi (découvrir la vie de l'établissement une fois la licence obtenue).

En pratique, les candidats à la création trouveront auprès de la « New Bank Start-Up Unit » un ensemble d'outils, comprenant notamment une assistance téléphonique et un accès à une équipe spécialisée de superviseurs détachés de la PRA (« Prudential Regulation Authority ») et de la FCA (« Financial Conduct Authority »), la diffusion régulière de l'actualité réglementaire, des invitations à des séminaires d'information et autres rencontres professionnelles, des revues de capital et de liquidité…

L'objectif de la Banque d'Angleterre avec cette initiative est double. Il s'agit, en priorité, de faciliter et accélérer le lancement de nouvelles startups de la finance, en rendant plus transparents les processus d'attribution de licences. Cependant, l'amélioration de la supervision des nouveaux entrants transparaît également en filigrane de la démarche, à travers l'allocation de moyens et ressources exclusifs – autant de conseil que de contrôle – pendant leurs premières années d'existence.

Pendant ce temps, de l'autre côté de la Manche, la volonté de notre ministère des finances de favoriser la concurrence bancaire se traduit [PDF]par l'ouverture prochaine d'un comparateur de tarifs, dont on peut déjà prédire qu'il n'aura pas le moindre effet sur le marché, parce que celui-ci est plus ou moins sclérosé et parce que le changement d'établissement reste un calvaire… Action dérisoire qui expose crûment le retard accumulé par la France sur son voisin. Et si on copiait les anglais ?

New Bank Start-up Unit

jeudi 21 janvier 2016

HSBC expérimente la théorie du « nudge »

HSBC
S'il devient de plus en plus courant de voir des startups faire appel à la recherche scientifique pour développer des solutions innovantes, les banques n'en ont pas encore pris l'habitude. Pourtant, quand HSBC commence [PDF] à mettre en œuvre la « théorie du nudge », il est aisé de comprendre toute la valeur d'une telle démarche…

Le concept du « coup de coude » (traduction littérale de nudge), popularisé vers 2008, ressort de la science du comportement (certains parlent même de manipulation…). En synthèse, il repose sur l'idée que des incitations indirectes et un soutien positif, exercés sans aucune contrainte ou obligation, sont au moins aussi efficaces – sinon plus – qu'une instruction, une réglementation ou autre mesure coercitive quand il s'agit d'infléchir la motivation et le processus de décision d'un individu ou d'un groupe.

Ceux qui s'en souviennent pourront rapprocher cette définition d'une précédente initiative de HSBC, visant à prévenir les découverts de ses clients. La méthode retenue, déjà sorte de nudge, consiste à alerter le consommateur de sa situation et lui donner un délai de grâce avant l'application des agios et frais correspondants. Visiblement, les résultats de ce premier essai sont suffisamment concluants pour que la banque cherche maintenant à l'étendre à d'autres comportements délinquants ou juste inefficaces.

Naturellement, en matière de finances personnelles, il ne fait aucun doute qu'il y a du pain sur la planche ! Chacun d'entre nous aimerait éviter les achats impulsifs, maintenir en permanence une discipline rigoureuse d'épargne, atteindre ses objectifs de vie rapidement… Mais la réalité fait que les sollicitations externes nous détournent des pratiques saines et mettent à mal nos bonnes résolutions. Alors, HSBC lance une nouvelle expérimentation afin de stimuler le changement d'attitude.

HSBC mobile

Car, à l'ère des « big data », il est aujourd'hui presque trivial de modéliser les comportements des clients en analysant leurs transactions, sur leur compte bancaire ou sur leur carte de paiement. La difficulté (comme souvent dans le domaine des données) est d'abord d'identifier les cas d'usage les plus pertinents et les plus efficaces et, ce, à plusieurs titres : faisabilité technique (et fiabilité), enjeu de correction des gestes ciblés, acceptabilité du nudge envisagé par le destinataire…

C'est parce que le champ d'exploration est immense (et extrêmement sensible) que HSBC lance seulement un test, auprès d'un échantillon de 500 personnes. Celles-là seront équipées d'une application mobile qui, en guise de coup de coude, leur délivre une notification chaque fois qu'elle détecte une action « inappropriée » sur leurs comptes. Au fil de l'expérience, différents types de comportements seront ainsi intégrés (38 sont présents dans l'itération initiale), de manière à aboutir à une version opérationnelle de l'outil, capable d'optimiser effectivement les résultats sur une large population.

Comme dans quelques autres (trop rares) exemples, la « science des données » serait ici mise en priorité – idéalement, les dérives étant toujours possibles – au service de l'utilisateur et non uniquement destinée à assurer des revenus directs à la banque (les retombées devraient être tout aussi appréciables). Voilà pour HSBC une excellente occasion de faire entrer ses modèles dans le cercle des valeurs de l'univers « digital », à travers une approche de transparence et de focalisation sur les besoins du client.

mercredi 20 janvier 2016

BBVA s'offre un robot (conseiller)

BBVA Compass
S'il est une banque dans le monde qui montre la voie en matière d'innovation (en général) et de relations avec la FinTech (en particulier), c'est BBVA. Dernier épisode en date dans sa stratégie, sa filiale américaine devient l'une des premières à introduire un robot conseiller dans son catalogue, via une collaboration avec FutureAdvisor.

En pratique, c'est la plate-forme standard de la jeune pousse qui sera proposée, dans le courant de cette année, aux clients particuliers de BBVA Compass. Elle leur permettra tout d'abord de connecter leurs comptes-titres (externes) existants et, dès lors, d'obtenir des recommandations d'arbitrages personnalisées. S'ils le souhaitent, ils pourront également demander à bénéficier des services de gestion directe de FutureAdvisor (les transactions étant dans ce cas prises en charge par la filiale dédiée de BBVA).

Pour justifier l'opération, la banque affirme sa conviction qu'une partie de sa clientèle – ceux qu'elle qualifie d'« investisseurs passifs » – est désormais prête à se laisser séduire par les entreprises émergentes de l'investissement automatisé, et leur promesse d'optimiser la gestion de leurs portefeuilles, sans efforts, à coût raisonnable. Alors, plutôt que de voir ces consommateurs initier une relation directe avec les startups spécialisées, elle choisit – fort logiquement – de leur apporter elle-même le service.

BBVA Compass profite pour ce faire de la position particulière d'un des principaux acteurs du domaine. En effet, FutureAdvisor est désormais passé dans le giron du géant de la gestion d'actifs BlackRock, un de ses partenaires historiques. La décision d'intégrer une solution disruptive de conseil en investissement est de la sorte largement facilitée, et probablement accélérée, puisqu'elle est portée – et donc, d'une certaine manière, garantie – par une institution traditionnelle solide (ce qui légitime l'acquisition, a posteriori).

FutureAdvisor

L'agilité du groupe espagnol dans son approche des relations avec les nouveaux entrants est ainsi une nouvelle fois démontrée, à la fois par sa capacité à mettre en œuvre une grande variété de méthodes et de les déployer toujours judicieusement, en fonction de ses besoins et de ses objectifs, mais également de son environnement et des opportunités qui se présentent. Acquisitions, investissements et collaborations dans la FinTech deviennent alors autant d'instruments de sa stratégie de transformation.

Dans le cas présent, le partenariat s'avère moins disruptif, car il reste dans la logique du modèle historique de la gestion d'investissement, dans lequel la banque (de détail) se charge uniquement de la distribution (vers ses clients). Il est vrai que, dans une démarche qui reste expérimentale, il serait peut-être trop ambitieux de simultanément appréhender un nouveau métier et ouvrir un nouveau marché. BBVA Compass préfère focaliser les efforts sur le second, ce qui lui permettra en priorité de vérifier la réponse de ses clients à cette offre (autant dans l'absolu que dans son appropriation par une banque).

La comparaison avec l'initiative récente de Deutsche Bank en matière d'investissement automatisé (dont le modèle tend à se répandre dans d'autres établissements) permet de mieux mesurer l'avance du groupe espagnol : pendant que ce dernier expérimente une solution complète (mais externe) auprès de ses clients afin de valider leur intérêt pour le concept, l'allemande déploie un outil limité (mais interne) sans réellement s'être mise en position de tirer des conclusions utiles des résultats qu'elle obtiendra.

mardi 19 janvier 2016

De la pub au crédit auto, en une photo !

Get This Car
Désignée comme innovation du mois par l'EFMA, la nouvelle application mobile « Get This Car » de la belge Record Bank représente en effet une tentative intéressante d'extraire les services financiers de leur coquille, en les intégrant au cœur de la vie quotidienne des consommateurs. Même si, au final, on reste un peu sur sa faim…

Présenté par la rédaction du quotidien Le Soir comme le Shazam du prêt automobile, le logiciel est particulièrement simple d'utilisation puisqu'il suffit de prendre en photo une publicité imprimée ou de capturer un spot radio ou télévisé pour identifier l'automobile de ses rêves et obtenir instantanément une simulation de crédit en vue de son acquisition. À défaut d'annonce commerciale à portée de smartphone, il est également possible de parcourir le catalogue embarqué, via une recherche par marque et par modèle.

Naturellement, l'utilisateur a toute liberté d'ajuster la durée du crédit et le montant qu'il souhaite emprunter (par exemple, en fonction de son apport personnel), afin d'obtenir une estimation de ses mensualités selon les différents scénarios qu'il envisage. S'il est convaincu et prêt à passer à l'acte, il ne lui reste plus qu'à prendre contact avec un conseiller de la banque, soit par un formulaire de messagerie, soit par téléphone. Et je ne surprendrai personne en exprimant mon désappointement à ce stade !

Bannière « Get This Car »

Ce ne sera peut-être pas l'option préférée de tous, mais il paraît tout de même évident que – ne serait-ce pour les clients existants de la banque – l'application devrait permettre, a minima, de déposer directement une demande de prêt. En l'état, la rupture introduite (et forcée) dans le processus ne peut que nuire à une expérience fluide et transparente. En réalité, en poussant la logique à l'extrême, une version idéale de « Get This Car » devrait même intégrer l'acte d'achat et rendre la souscription du crédit quasiment invisible.

Il est vrai que le projet prendrait alors une autre dimension, beaucoup plus complexe. Peut-être une future itération ira-t-elle dans ce sens ? Une deuxième idée à explorer serait d'inclure ces fonctions dans l'application bancaire principale, car il n'est pas certain que les clients pensent à – et fassent l'effort de – télécharger un outil dédié pour ce qui n'est, pour l'instant, qu'une simulation de crédit et qui restera, quoi qu'il advienne, réservé à un usage ponctuel. À moins d'étendre le périmètre au-delà de l'automobile…

En attendant, aussi simple soit-elle, cette application constitue une jolie démonstration d'approche des services financiers par le besoin du consommateur (en l'occurrence, son envie d'acheter une voiture). Par ailleurs, la banque se déclare satisfaite de ses 4 000 utilisateurs (en un mois), qui lui auraient permis de voir ses ventes grimper de 20% !

lundi 18 janvier 2016

Le PFM au service d'une offre différente

Pariti
Décidément, il est fascinant d'observer l'évolution de la gestion de finances personnelles (PFM) au fil du temps. Tandis que les approches prédictives commencent tout juste à prendre corps, une jeune pousse britannique prépare déjà l'étape suivante, qui esquisse – peut-être pour la première fois – une intrusion au cœur des métiers de la banque…

La version actuelle de l'application de Pariti – disponible depuis quelques jours sur l'AppStore d'Apple, en attendant sa version Android – peut paraître presque « classique », avec sa connexion aux comptes de l'utilisateur (grâce aux APIs de Yodlee) et sa promesse d'apprendre son comportement (automatiquement) de manière à l'alerter, avant qu'il ne soit trop tard, lorsqu'il risque de se trouver à découvert ou, au contraire, l'inciter à mettre une partie de son argent de côté quand il dispose de réserves suffisantes.

Le principe devrait séduire les millions de consommateurs – dont, en particulier, les jeunes adultes – se débattant avec les incertitudes des fins de mois ou ne parvenant jamais à concrétiser leurs rêves, faute d'une discipline d'épargne adéquate. Avec Pariti, ils peuvent véritablement piloter leurs finances personnelles, avec de réels leviers d'action – par exemple en suggérant une demande (préventive) de prêt personnel, plus économique que le recours à une carte de crédit ou à une avance sur salaire.

Cependant, le défaut du dispositif est immédiatement visible au travers de cette présentation : il subsiste une rupture de l'expérience client (donc un frein), au moment où il faut passer à l'acte. La solution qu'a trouvée la startup est évidente : il suffit d'intégrer la gestion d'épargne (ce qui n'est pas inédit) et la souscription de crédit (ce qui est plus original) dans l'application mobile ! Ce sera chose faite – avec une sélection de produits fournis par des partenaires – dès que le régulateur aura donné son accord.

Accueil Pariti

L'idée est absolument brillante ! En effet, outre la possibilité d'en faire un modèle économique solide, elle apporte également une forte valeur ajoutée à tous les acteurs impliqués. Car, en arrière-plan, Pariti est en mesure d'analyser les données financières de ses utilisateurs et, avec l'aide de quelques algorithmes bien conçus, d'évaluer précisément leur capacité de remboursement. Ainsi, les prêteurs potentiels maîtrisent leurs risques, tandis que les consommateurs sont protégés des excès de confiance…

Incidemment, et dans un registre complémentaire, Pariti prévoit aussi, à terme, de mettre des API à la disposition d'entreprises tierces (il est vrai que, dans la lignée de l'initiative miData, il s'agit désormais d'une exigence quasiment incontournable pour le secteur financier au Royaume-Uni), afin de permettre à ses utilisateurs de partager leur « profil » et disposer de la sorte d'un conseil et de solutions adaptés à leur situation.

Jusqu'à maintenant, le PFM vivait un peu en marge des banques, sous la forme d'une option additionnelle. On pouvait malgré tout sentir, après quelques initiatives autour de l'épargne, que les affaires n'en resteraient pas là. Pariti franchit un pas important en intégrant une offre diversifiée à son modèle. La combinaison est redoutable, qui la positionne en « prescripteur contextuel » auprès de ses utilisateurs, capable de recommander des produits avant que le besoin n'en soit effectivement apparu !

N.B. (ou clause de transparence ;-) Je suis inconditionnellement fan d'une entreprise dont la n° 2 est « Office Chocolate Manager » !

dimanche 17 janvier 2016

Capital One et ses messages personnalisés

Capital One
En dépit d'une certaine prise de conscience de son importance, la personnalisation de l'expérience client dans les services financiers reste aujourd'hui une idée vague et lointaine. Une initiative (relativement) simple de Capital One offre un exemple particulièrement intéressant, car elle s'inscrit dans un moment critique de la relation bancaire.

Avec la multiplication des incidents de sécurité, affectant des millions de consommateurs, les institutions financières sont de plus en plus fréquemment amenées à renouveler les cartes de paiement de leurs clients. Or, outre l'inquiétude que peuvent susciter ces mesures de précaution chez les personnes concernées, le changement risque d'induire des difficultés imprévues, lorsque les coordonnées de la carte ont été enregistrées par des commerçants, notamment pour le règlement récurrent d'un abonnement.

Alors, afin de rendre l'épreuve un peu moins douloureuse, Capital One prend les devants. Immédiatement après la délivrance d'une nouvelle carte, elle envoie un courriel au client lui rappelant non seulement de l'activer mais aussi de penser à mettre à jour ses références auprès des fournisseurs susceptibles de les avoir conservées. Le message s'accompagne d'une liste de suggestions d'entreprises qu'il peut être nécessaire de contacter dans ce but, extraite de l'analyse des dépenses récentes.

Message Capital One

À ce stade, il n'est pas inutile de souligner que la démarche de Capital One n'est pas uniquement motivée par le désir de servir ses clients. Tout comme l'activation préalable de la carte, le rappel des enregistrements à actualiser répond également à un enjeu économique pour l'émetteur : il lui faut impérativement favoriser les dépenses de ses clients et donc éviter tout blocage inapproprié d'une transaction. En effet, le danger de cette situation est – surtout dans un pays où l'équipement multiple est la norme – que le consommateur bascule vers la carte d'un autre établissement.

L'initiative de Capital One pourrait en inspirer beaucoup d'autres. Avant d'imaginer et concevoir des solutions plus ou moins extraordinaires (telles que la prédiction des besoins des clients), la personnalisation des services – soutenue par l'exploitation de données existantes – peut prendre des formes simples et néanmoins redoutablement efficaces. En l'occurrence, s'attaquer aux moments de stress des consommateurs, en s'attachant à réduire les frictions associées, constitue probablement une recette toujours gagnante.

À lire également sur le même sujet, ce billet de Fiona Adler (Forrester).

samedi 16 janvier 2016

Une banque s'inspire du e-commerce

Guilford Savings Bank
La Guilford Savings Bank est une micro-banque communautaire du Connecticut, aux États-Unis. Face à ses méga-concurrentes, elle défend logiquement des valeurs de proximité, qu'elle se doit aujourd'hui de décliner aussi en ligne. Sa dernière initiative s'avère particulièrement originale, même si elle n'est que partiellement convaincante.

En effet, à l'occasion de la refonte de son site web, la Guilford Savings Bank (GSB) s'est largement inspirée des codes désormais classiques du e-commerce, notamment à travers la mise en place d'un système de favoris. Comme dans tout catalogue en ligne, le visiteur – client ou non – peut donc enregistrer les produits qui l'intéressent, au gré de sa navigation. À tout moment, outre l'historique des rubriques qu'il a parcourues, il a accès à la liste qu'il a ainsi constituée, et peut l'imprimer ou l'envoyer par messagerie.

Surtout, l'internaute a également la possibilité de partager sa sélection avec un conseiller, en un clic. Ce dernier va alors immédiatement l'assister dans ses démarches, par tchat, en lui fournissant les explications nécessaires et, potentiellement, en l'aidant à souscrire les produits qu'il a choisis. Le dispositif permet de la sorte une transition instantanée et transparente entre le libre service en ligne et un conseil humain, sans perte de contexte, garantissant un niveau de service hautement personnalisé.

Favoris Guilford Savings Bank

Naturellement, derrière ces avantages directement visibles du consommateur, la banque profite de sa nouvelle fonction pour remplir ses propres objectifs marketing, moins explicites mais tout aussi importants. Les favoris de ses utilisateurs vont, par exemple, lui procurer des opportunités de cibler précisément les messages publicitaires émaillant l'expérience du site, avec une efficacité bien supérieure à une approche traditionnelle qui serait basée principalement sur l'analyse de la navigation.

Cependant, là où la proposition de GSB atteint ses limites, c'est dans sa perspective – pleinement et explicitement assumée – d'un modèle de banque fondé sur la vente de produits. Certes, celui-ci s'accommode parfaitement du paradigme du e-commerce (encore que, dans cette hypothèse, la logique devrait être menée à son terme, avec une notion de panier et de check-out), mais, à une ère où la tendance et les attentes sont plutôt à adresser les « moments de vie » des clients, elle est peut-être dépassée.

Au-delà de l'ébauche dessinée par GSB, il resterait donc à imaginer la solution magique qui réussirait à combiner les techniques éprouvées du commerce en ligne avec les spécificités (et les complexités) du secteur financier…

vendredi 15 janvier 2016

ImaginBank, 100% mobile et sociale

imaginBank
En lançant imaginBank, La Caixa crée la première « grande » banque exclusivement mobile d'Espagne. Son offre s'avère particulièrement complète, notamment par rapport aux initiatives comparables ailleurs dans le monde. Elle pourrait même esquisser une stratégie de migration vers un nouveau modèle de services conçu pour le XXIème siècle.

Le socle d'imaginBank est classique. Il se compose d'un compte courant, d'une carte de débit et, naturellement, d'une application mobile (pour Android et iOS), qui constitue le seul moyen pour les clients d'interagir avec leur compte. Elle propose la consultation des soldes et des dernières opérations, la gestion de budget, les échanges d'argent entre particuliers (P2P)… et, plus largement, l'exécution de toutes les transactions. Sans surprise, l'ensemble est gratuit, à la souscription comme à l'utilisation.

S'inscrivant dans les usages des consommateurs « digitaux », imaginBank développe par ailleurs une forte présence sur les réseaux sociaux : son service client peut être sollicité – 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 – par Twitter et via la messagerie instantanée WhatsApp, tandis qu'une application Facebook donne accès à la consultation des comptes – en toute sécurité – sans quitter la plate-forme. En complément, une fonction de tchat privé est également incluse dans l'application mobile.

Cependant, imaginBank ne s'en tient pas à ce « minimum syndical » et elle intègre dès l'origine une vaste palette de produits additionnels. Il s'agit, par exemple, d'une solution de crédit à la consommation (jusqu'à 15 000 euros), assortie d'un mécanisme de pré-accord, pour une mise en place rapide. Dans un autre registre, les moyens de paiement innovants de La Caixa font aussi partie de la panoplie : bracelet et autocollant sans contact ou encore paiement via le smartphone (sur les appareils compatibles).

imaginBank sur tablette

Avec un peu de recul et beaucoup d'optimisme, une telle richesse laisse entrevoir une approche radicale de la part du groupe espagnol : là où les banques mobiles « habituelles » ressemblent souvent à des produits d'appel, imaginBank se positionne plus comme une solution globale (bien qu'il lui reste encore à compléter son catalogue), destinée à une catégorie de clientèle sensible à une nouvelle forme de relation mais qui ne se satisferait pas nécessairement d'une offre basique.

Dans cette perspective, la manière dont La Caixa qualifie la cible qu'elle vise avec son initiative est loin d'être anodine : « pour les jeunes, quel que soit leur âge ». Voilà un indice révélateur d'une compréhension de l'évolution des comportements… Certes, les « digital natives » sont probablement aujourd'hui les plus intéressés par un compte sur leur smartphone et des échanges sur les réseaux sociaux. Mais la tendance gagne progressivement d'autres catégories de population et il faut savoir répondre à leurs attentes. Quitte à cannibaliser les modèles historiques !

ImaginBank est en effet une deuxième banque, à part entière, dans le giron de La Caixa, fondée sur des principes réinventés – transparence, simplicité (mais encore peu de personnalisation) – et destinée autant à capter de nouveaux clients que fidéliser les 30% des espagnols de 18 à 35 ans qui possèdent déjà un compte. La lucidité consiste à comprendre qu'une partie de ces consommateurs désirent une relation différente, le courage est de redémarrer (presque) à zéro pour tenter de les satisfaire.

jeudi 14 janvier 2016

Trois piliers de la proximité client

Transparence
En dépit de leurs promesses, les institutions financières ont largement perdu de vue les attentes de leurs clients, et la transition vers une relation à distance et les canaux numériques ne fait qu'aggraver la situation. Pourtant, pour les consommateurs « digitaux », la proximité est plus importante que jamais. Comment la restaurer ?

Avant de répondre à cette question, la première barrière à franchir est de comprendre que, pour une bonne partie de la population, le concept de proximité n'a plus grand chose à voir avec une rencontre en face à face. Il suffit de voir les comportements de nos concitoyens dans leur vie de tous les jours pour réaliser que les relations sociales sont désormais entretenues essentiellement par les outils mobiles : échanger 100 messages par jour avec un(e) ami(e) sur WhatsApp représente un contact plus étroit que quelques heures passées ensemble chaque semaine.

Une fois admis que les interactions directes ne constituent plus le critère déterminant – ou, a minima, le seul critère – de la proximité dans la relation client, quels paramètres reste-t-il à activer ? Je propose d'explorer 3 principes qui me semblent essentiels afin de parvenir à l'excellence en la matière et qui devraient prévaloir quelles que soient les stratégies de « canalité » (et donc aussi bien dans les banques de réseau que chez les acteurs exclusivement en ligne) : la transparence, la simplicité et la personnalisation.

Commençons ce panorama par la transparence, qui semble trop souvent oubliée, alors que, bien maniée, elle peut aider à renforcer la confiance (ou la rétablir lorsqu'elle s'est délitée). Il est vrai qu'elle n'est pas si simple à mettre en œuvre qu'il y paraît. En effet, il ne suffit pas d'afficher clairement les conditions ou les tarifs des contrats pour satisfaire les exigences des clients. Il faut littéralement « exposer » les processus internes au grand jour (donner à suivre pas à pas toutes les étapes d'une demande de crédit…).

Indissociable de la transparence, la simplicité commence avec le langage adopté par la banque, car c'est bien à elle de se mettre au niveau de ses clients et non l'inverse. Mais ce n'est qu'un début. Idéalement, les services offerts sont intuitifs et faciles d'accès, quel que soit le canal utilisé. Les réponses aux sollicitations sont instantanées ou, quand ce n'est (vraiment) pas possible, une visibilité totale est donnée sur le déroulement des opérations, avec des options d'actions intermédiaires toujours disponibles.

Enfin, il reste à personnaliser – voire individualiser – l'expérience en fonction du client et de son contexte. Au-delà de la considération dont il sent faire l'objet à travers la transparence et la simplicité retrouvée, l'ambition est ici de lui montrer qu'il est également reconnu comme une personne unique, à laquelle la banque s'adresse de manière spécifique. Naturellement, une approche ciblée touche en priorité les produits et services proposés. Cependant, de nombreux autres axes sont envisageables : modalités de la relation, niveau d'expertise des échanges, outils mis à disposition…

Ces 3 principes simples – dans leur concept, l'exécution peut être plus ardue – ne sortent pas d'un chapeau magique : ce sont les clés de succès universelles des startups de la FinTech. Or, la focalisation obsessionnelle de celles-ci sur les attentes de leurs clients tend à légitimer leurs approches. En outre, par leur existence même (et, plus largement, par l'inspiration provenant d'autres secteurs), elles inscrivent progressivement ces valeurs parmi les exigences incontournables des consommateurs. En conséquence, les institutions financières n'ont d'autre choix que de les intégrer dans leurs modèles…

Proximité ?

mercredi 13 janvier 2016

Ford finance l'achat de voiture en groupe

Ford Credit Link
L'économie du partage transforme les comportements des consommateurs et affecte profondément les entreprises de tous les secteurs. Quand un constructeur automobile tel que Ford explore les moyens de répondre aux défis qui lui sont posés, il adopte une vision à 360° qui englobe aussi une nouvelle approche du financement.

L'expérimentation que vient de lancer la marque à Austin cible les modes de consommation émergents des jeunes générations – avant que leurs aînés ne s'en emparent. À tous ceux qui désirent disposer d'un véhicule quand ils en ont besoin sans en être nécessairement le propriétaire exclusif, Ford propose donc une formule d'achat en groupe de 3 à 6 personnes. L'offre pourra intéresser des voisins souhaitant partager un pickup, des étudiants aux moyens limités, des familles multi-conducteurs…

En premier lieu, le programme – baptisé Ford Credit Link – comprend naturellement un dispositif de financement adapté, sous la forme d'une solution de crédit-bail (leasing) de 24 mois répartie sur les co-propriétaires. Mais le constructeur ne s'en tient pas là ! Une application mobile permet aux différents conducteurs de gérer leur utilisation de la voiture communautaire (consultation de sa disponibilité, réservation, localisation…), de suivre son état et son entretien… et même de régler les échéances du crédit.

It's time for a new kind of mobility

En revanche, il subsiste une lacune surprenante dans cette offre : il serait logique qu'une assurance ajustée aux usages et aux risques individuels de chacun des co-acquéreurs – intégrée dans l'application mobile – accompagne l'ensemble. L'idée est tellement évidente qu'il semble impossible qu'elle ne fasse pas partie des évolutions futures de Link, si le test s'avère concluant et aboutit à une généralisation. Jamais une combinaison de produits et services n'aura alors été mieux justifiée, pensée pour les clients !

Au-delà de sa seule valeur d'exemple d'innovation dans le domaine financier, l'initiative de Ford est surtout une brillante démonstration de ce que peut être une véritable « banque des moments ». Rien n'empêche aujourd'hui un groupe de personnes d'acquérir une voiture à plusieurs mais l'expérience intégrée, transparente et immédiate qui leur est proposée ici est incomparable et devient automatiquement un facteur de choix déterminant. Les acteurs historiques ont du pain sur la planche s'ils veulent atteindre ce niveau d'excellence dans l'alignement avec les attentes de leurs clients…

mardi 12 janvier 2016

Bee hésite entre mobile et contact humain

Bee
Drôle d'animal que cette « Bee », dans laquelle Axa Strategic Ventures vient d'investir ! D'un côté, elle se vante d'offrir un service bancaire 100% mobile mais, de l'autre, elle va chercher ses futurs clients dans les rues de New York (et bientôt d'Oakland, Californie) avec une mini-agence itinérante et un bataillon de conseillers humains…

Convaincue que les consommateurs souhaitent un contact en face à face, la startup adopte une stratégie inspirée par les foodtrucks. Elle déploie donc régulièrement son kiosque – un camion et quelques tables – dans des lieux soigneusement sélectionnés de ses villes cibles. Une fois installés, ses employés interpellent les passants et leur proposent, démonstration à l'appui, de télécharger l'application mobile Bee et d'ouvrir un compte – qui est, en pratique, une simple carte prépayée – en quelques minutes.

La société justifie la contradiction entre sa promesse d'un service à distance et son approche de proximité par le besoin qu'auraient les consommateurs de rencontrer un représentant de la banque avant de s'engager, de manière à instaurer une relation de confiance. La (triste) réalité est que Bee n'a probablement pas l'ambition d'introduire une quelconque disruption : sa vision consiste avant tout à rendre les systèmes existants plus efficaces et plus économiques, notamment en s'affranchissant d'un coûteux réseau d'agences, sans en remettre en cause le modèle fondamental.

Kiosque itinérant Bee

Ce concept hybride peut-il vraiment s'imposer ? Plusieurs facteurs m'incitent à en douter. Ainsi, l'idée d'arpenter les quartiers mal couverts par les banques peut sembler astucieuse a priori, mais qui croira qu'il suffit d'une opération commerciale ponctuelle pour capter des résidents qui soit désirent une présence permanente, soit se satisfont pleinement d'une relation à distance ? Le principe d'une conquête de clientèle dans la rue est parfaitement légitime, que le kiosque ambulant soit présenté comme un instrument de création de confiance l'est déjà beaucoup moins…

D'ailleurs, les explications s'embrouillent quand on découvre que l'un des avantages du contact direct est, selon la jeune pousse, de pouvoir aider les nouveaux clients à prendre en main l'application bancaire et ses différentes fonctions (par exemple le dépôt de chèque par capture photographique). Ce sont autant de détails qui tendent à démontrer une profonde méconnaissance du monde « digital », dans laquelle les solutions qui ont du succès – dans tous les domaines – sont celles qui sont suffisamment simples et intuitives pour être utilisables immédiatement, sans réfléchir.

En poussant le raisonnement un peu plus loin, j'oserai émettre l'hypothèse que la recours à des conseillers humains constitue souvent un substitut hâtif et peu convaincant à la mise en œuvre d'une expérience client mobile optimale. En l'occurrence, Bee est loin d'être seule dans cette situation… La démarche peut certainement faire illusion un temps, sous prétexte de proximité, mais elle risque de devenir rapidement obsolète face aux acteurs qui comprennent et adressent mieux les attentes des consommateurs…

lundi 11 janvier 2016

Tendances de l'InsurTech

Assurance
Non contente de sa position de leader de la FinTech, Londres convoite désormais aussi le titre de capitale mondiale de l'InsurTech ! Et, à l'issue de deux récents événements qui s'y déroulaient, Rick Huckstep identifie pour Daily Fintech 3 grandes tendances se dégageant des présentations effectuées par les 25 jeunes pousses invitées.

La première priorité, commune à bien d'autres secteurs, est la focalisation sur le client et ses attentes. Appliquée à l'assurance, son enjeu est d'opérer une transtion d'une approche de vente de produit (« poussé » par la compagnie ou un intermédiaire) vers un modèle d'achat de valeur (« désiré » par le consommateur). Les leviers mis en œuvre dans ce but sont relativement classiques dans l'univers des startups : transparence totale des contrats, simplification des interactions, ultra-personnalisation des offres…

La deuxième orientation mérite une attention particulière, parce qu'elle vise à adresser une des frustrations spécifiques de l'assurance. Il s'agit en effet de développer l'engagement du client tout au long de la relation, au lieu de se contenter d'un contact annuel lors du renouvellement du contrat ou à l'occasion d'un sinistre. En poussant la logique à l'extrême, commencent déjà à apparaître – dans différents domaines (automobile, habitation, santé…) – des concepts de couverture à la demande (à l'instar de Cuvva), qui permettent de maintenir une proximité incomparable.

Startupbootcamp InsurTech London

Enfin, le troisième mouvement de fond de l'InsurTech vient en support des deux précédents, sous la forme de flux de données et des nouveaux usages associés. Tandis que l'évaluation du risque était historiquement exécutée une seule fois, à la signature du contrat, les masses d'information que délivrent maintenant les objets connectés, l'informatique « à porter », les applications mobiles… permettent progressivement d'ajuster la mesure en temps réel, contribuant de la sorte aux opportunités de personnalisation de l'offre et d'assurance à la demande.

Ces tendances sont aujourd'hui au cœur des modèles des startups, dont elles constituent l'essentiel de l'avantage concurrentiel, grâce auquel elles espèrent capter une partie du marché. En conséquence, les mêmes pratiques doivent impérativement être placées au centre des stratégies des compagnies d'assurance, si elles ne veulent pas se voir marginalisées, à terme. Ce sont de profondes transformations qu'il faut ainsi appréhender et intégrer dans les processus et les organisations. Il devient donc urgent de préparer le changement, car il ne se matérialisera pas en un jour…

dimanche 10 janvier 2016

FinTech : bulle ou croissance saine ?

Silicon Valley Bank
Avec l'explosion des investissements et l'apparition de ses premières « licornes » (startups valorisées à plus d'un milliard de dollars), la question se pose inévitablement : la FinTech est-elle en train de former une bulle spéculative ? Depuis sa position privilégiée, le CDO de la Silicon Valley Bank expose sa vision dans un article pour Finextra.

Pour aller droit au but, selon Bruce Wallace, le secteur n'est pas aujourd'hui dans un cycle d'excès, susceptible de retournement brutal à court terme. La progression extrêmement rapide des levées de fonds de la FinTech – multipliées par 3 entre 2014 et 2015 – est due avant tout au foisonnement des opportunités pour de nouveaux modèles de services financiers, portés par des acteurs technologiques et encouragés par une certaine forme de rejet des consommateurs vis-à-vis des banques historiques.

Le principal changement ayant permis cette évolution est facile à observer : tandis que, par le passé, les entrepreneurs de la FinTech (avant qu'elle ne prenne ce nom) visaient, pour la plupart, un marché B2B, commercialisant leurs solutions auprès des institutions financières, la génération actuelle vise désormais directement les clients finaux – d'abord le grand public, puis, progressivement, les entreprises. Ce faisant, la transformation s'accélère et commence à esquisser la possibilité d'une rupture profonde.

Rien n'est cependant encore joué. 2016 devrait être une année charnière, qui procurera un début de visibilité sur la concrétisation de la valeur accordée aux sociétés qui sortent de leur phase de croissance initiale (notamment celles qui sont introduites en bourse). Il sera alors possible de mieux distinguer les modèles surcotés de ceux qui se révèleront véritablement disruptifs. Dans un premier temps, ce sont les domaines des paiements et du crowdfunding (au sens large) – représentant l'essentiel (environ deux tiers) des licornes de la FinTech – qui seront sous le feu des projecteurs.

Si quelques exemples récents, à l'instar de Lending Club, peuvent déjà inspirer confiance pour l'avenir, il faudra tout de même quelques mois de recul pour acquérir des certitudes. À mon sens, il subsiste encore de sérieux doutes sur la viabilité de ces (trop) nombreuses pionnières, qui, pour attractives qu'elles paraissent, s'attaquent à des problématiques plus complexes qu'il n'y paraît – entre, par exemple, besoin de massification dans les paiements et gestion dans la durée de la confiance pour le crédit.

Pourtant, quels que soient les résultats de la confrontation des valorisations théoriques aux réalités et même si un ralentissement reste imaginable, Bruce Wallace estime que les conditions sont réunies pour que le mouvement se poursuive et s'amplifie. Un facteur incontestable de cet optimisme est la taille colossale du marché des services financiers – mesuré en billions de dollars – dont une part de plus en plus conséquente est résolument prête à migrer vers des approches différentes, focalisées sur une transparence absolue et sur l'élimination des frictions dans la relation client.

Bulle