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C'est pas mon idée !

jeudi 30 novembre 2023

Le blocage des comptes pour éviter la fraude

OCBC
Face à la progression exponentielle des escroqueries, apparemment impossible à enrayer, la singapourienne OCBC avait instauré en 2022 un système de verrouillage des comptes à déclencher en cas d'urgence, dont le déploiement a par la suite été imposé à l'industrie par le régulateur. Sur un principe identique, elle ajoute désormais à son arsenal une option préventive plus flexible mais tout aussi radicale.

Entre les prises de contrôle des accès aux outils de banque à distance (via détournement d'identité, piratage de codes de connexion, installation de maliciels…) et les arnaques par ingénierie sociale (promesse d'enrichissement rapide, manipulation affective, alerte de sécurité par un imposteur, fausse boutique en ligne…), les occasions de se faire piéger et de voir s'envoler son argent sont innombrables, tandis que la créativité de leurs auteurs rend extrêmement difficile de s'en préserver.

Selon OCBC, le meilleur moyen d'éviter le pire consiste donc à interdire les mouvements. Avec sa nouvelle fonction « Money Lock », le client peut ainsi décider de bloquer les virements en tout genre, les règlements de factures, les investissements, les retraits d'espèces… (les paiements par carte sont exclus du périmètre et restent donc possibles afin de minimiser les perturbations dans la vie quotidienne) et, de la sorte, stopper net toute tentative de détournement quels qu'en soient l'origine et le mode.

L'activation du mécanisme se fait très simplement dans les applications web et mobile de la banque. L'utilisateur a (heureusement) la faculté de choisir les comptes concernés (courants et d'épargne) et de fixer le montant à protéger, entre 10 dollars et le solde disponible, de manière à laisser une marge de manœuvre, par exemple pour les prélèvements récurrents. Naturellement, l'annulation est plus difficile, pour empêcher le fraudeur d'y recourir, et elle se déroule donc soit en agence, soit sur un GAB.

OCBC Money Lock

S'il offre les mêmes garanties que le coffre-fort-virtuel « DigiVault » que sa concurrente DBS a récemment dévoilé, le verrou logique d'OCBC présente des avantages notables, qui mettent en évidence une bataille concurrentielle émergente : entre autres, les sommes mises à l'abri restent sur le compte d'origine, et continuent à porter intérêts, le cas échéant, et la capacité de déblocage sur un automate (sécurisé par une carte de paiement et un code PIN) procure plus de liberté que la visite à une succursale.

Ces initiatives successives, avec leurs variantes selon les régions (au Royaume-Uni, ce sont les questionnaires de contrôle qui ont le vent en poupe), montrent une certaine tendance à la capitulation des institutions financières face aux menaces qui pèsent sur leurs clients. Elles peuvent se justifier en arguant que ces derniers portent souvent une lourde part de responsabilité dans les incidents qui les affectent… mais les impacts de leurs dispositifs sur l'expérience utilisateur n'en sont pas moins regrettables.

mercredi 29 novembre 2023

Asymétrie des données : l'heure de vérité

FCA
Depuis les premières esquisses d'une contrainte d'ouverture de leurs données, les institutions financières, qui craignent plus que tout l'émergence d'une éventuelle concurrence de la part des géants du web, s'indignent du déséquilibre qu'elles subiraient en raison de l'absence d'une obligation équivalente pour eux. Le régulateur britannique lance une consultation afin d'objectiver ces jérémiades.

Naturellement, sur le papier, les récriminations des entreprises soumises à ces exigences paraissent légitimes : pourquoi devraient-elles offrir sur un plateau les informations extrêmement riches qu'elles détiennent sur leurs clients à des compétiteurs en germe (parfois bien avancés) qui possèdent eux-mêmes une visibilité approfondie sur leurs activités quotidiennes sans être soumis à des règles similaires ? Mais, à la réflexion, sont-elles vraiment justifiées ou ne s'agit-il que d'un écran de fumée ?

La FCA veut donc entendre les arguments des uns et des autres avant de former un avis définitif, qui, je suppose, aboutirait le cas échéant à des mesures compensatoires. Finies les accusations faciles et sans preuves, les premières intéressées vont devoir démontrer en quoi l'asymétrie des données qu'elles dénoncent procure un avantage déloyal à leurs bêtes noires, susceptible de leur assurer un pouvoir démesuré sur le marché. L'exercice risque de s'avérer plus complexe que prévu pour les plaignantes.

Après tout, rien ne confirme jusqu'à maintenant, à travers leurs (nombreuses) premières initiatives dans le champ financier, que les acteurs visés trouvent un bénéfice particulier à l'exploitation des opportunités de la banque ouverte (surtout par rapport à d'autres usagers) : leurs propres ressources suffisent apparemment à leurs besoins, ce que leurs adversaires tendent à valider indirectement en affirmant qu'elles valent d'être mises à leur disposition (c'est tout l'objet de leur requête… du moins en façade).

Apple à contributions de la FCA

L'autorité ne se laisse d'ailleurs pas abuser puisqu'elle demande aux établissements du secteur, avec une touche de perfidie, d'expliquer comment l'accès aux informations des plates-formes de la « Big Tech », s'il leur était accordé, les aiderait à délivrer un meilleur service. Encore ne s'aventure-t-elle pas sur le terrain de leur capacité réelle à mettre en œuvre les exemples qu'ils citeraient, qu'il faut pourtant relativiser au vu des immenses progrès restant à accomplir dans le traitement des données internes.

Par ailleurs, la question de fond n'est pas non plus abordée dans cet appel à contribution alors que, même si ce n'est pas le lieu, elle conduit à en remettre en cause les prémices. En effet, la réduction du sujet à l'asymétrie des données est probablement une erreur, car elle n'est qu'un corollaire inévitable d'une asymétrie de rôles : sur le périmètre considéré, les banques sont médiatrices de transactions tandis que les firmes dites technologiques fournissent des services finaux. La nature des informations manipulées n'est donc pas la même et les règles qui les régissent ne peuvent être identiques.

À l'aube de l'extension (certes encore lointaine) dans l'Union Européenne des exigences d'ouverture apportées par la DSP2 (dont les grands groupes se sont largement plaints… et n'ont toujours pas réussi à tirer parti, laissant le champ libre à toutes sortes d'acteurs plus agiles et plus visionnaires), la démarche entamée outre-Atlantique vaudra d'être suivie. En tous cas, et quels qu'en soient les résultats et les conséquences, elle mériterait d'inspirer les régulateurs du continent (et d'ailleurs dans le monde).

mardi 28 novembre 2023

Un jeu de société pour déjouer les arnaques

NatWest
Juste à temps pour la saison festive mais malheureusement trop tard pour la période de folie dépensière du vendredi noir (« black friday ») propice aux fraudes en tout genre, NatWest dévoile un jeu de société éducatif à l'occasion d'une (énième) campagne médiatique de lutte contre les escroqueries… qui sont toujours en forte hausse.

Il faut reconnaître que, bien que le sujet soit extrêmement sensible, que les consommateurs se déclarent conscients des risques qu'ils encourent et avides d'information sur les techniques employées pour les spolier (afin de les repérer), que les institutions financières redoublent d'efforts (parfois mal inspirés, notamment chez… NatWest) en vue de contenir les dommages…, rien n'y fait et toutes les approches testées jusqu'à maintenant, par la communication ou la contrainte, semblent vaines.

Dans ces conditions, rien n'interdit d'explorer toutes les possibilités, aussi improbables soient-elles. Sachant que, d'une part, l'introduction de mécanismes ludiques dans les démarches pédagogiques favorise à la fois la participation et l'intégration des concepts présentés et, d'autre part, le tabou qui tend à régner sur les arnaques bancaires mérite d'être brisé, dans l'optique de libérer la parole et faciliter de la sorte une défense collective, le principe d'un jeu de plateau paraît potentiellement pertinent.

NatWest All Mod Cons

Avec « All Mod Cons » (que j'avoue ne pas savoir traduire), NatWest propose ainsi un outil destiné à partager dans un moment convivial et distrayant, entre quatre à six personnes, un aperçu de l'ensemble des malversations répertoriées dans le monde réel, à travers un parcours guidé par les dés et émaillé d'actions et d'événements parmi lesquels il faut savoir éviter les pièges synonymes d'argent (virtuel) qui s'évapore et conserver un maximum de son magot de départ pour espérer remporter la victoire.

Cependant le jeu n'est pas et ne sera pas distribué publiquement (ni pour l'achat ni à titre de cadeau), peut-être parce que la banque estime que personne ne ressentira l'envie spontanée de l'acquérir et d'entamer une partie. En fait, NatWest invite ses clients à en faire l'expérience directement dans une douzaine de ses agences, à partir de début décembre. L'idée consiste donc probablement à encourager, via les employés, les visiteurs à profiter de leur passage pour apprendre en s'amusant.

Là encore, s'il ne s'agit pas uniquement d'une opération marketing, l'objectif visé est vraisemblablement de stimuler les conversations, en l'occurrence avec la banque, dans la perspective de maintenir une ligne ouverte sur une thématique en perpétuelle évolution et sur laquelle l'attention ne doit jamais être relâchée. En tous cas, face à un problème sans réponse, qui s'aggrave de jour en jour, NatWest surprend par une capacité de créativité plutôt rare. C'est qu'il en faut dans cette bataille sans fin…

lundi 27 novembre 2023

L'innovation exige de la persévérance

ING
Bien que son directeur de l'innovation tente de la faire passer pour un succès, comme d'autres opérations du genre, la cession par ING de son concept de ticket de transport invisible est avant tout le récit de son abandon de toute velléité d'aventure créative… dans des domaines pourtant parmi les plus porteurs de l'industrie actuellement.

Le projet, né en 2017 dans les « Labs » de la banque, s'était matérialisé en 2019 sous la forme d'une expérimentation avec une entreprise néerlandaise. Le principe des « Invisible Tickets » consistait, comme leur nom l'indique, à éradiquer la notion même de titre de transport. En lieu et place, une application mobile suit l'usager à la trace, en temps réel, à travers tous ses déplacements, en détectant les modes empruntés et les distances parcourues, de manière à encaisser automatiquement le prix de son trajet à l'arrivée.

En parfait alignement avec la tendance inéluctable vers la finance invisible, se positionnant en quelques sorte comme une déclinaison dans les transports en commun de son incarnation dans l'univers du VTC par Uber, la vision d'une expérience totalement transparente pour le voyageur méritait incontestablement d'être approfondie. Las, le changement de tête au sommet d'ING s'est rapidement accompagné d'une stratégie de rationalisation, écartant systématiquement tout ce qui paraissait un peu audacieux.

L'application est alors partie aux oubliettes, avec son inspiration sous-jacente, à l'issue de son premier test sur le terrain (dont aucun résultat n'a été partagé)… jusqu'à ce que, plus tôt cette année, le prestataire informatique indien Tata Consultancy Service, qui avait contribué à sa réalisation, la rachète, considérant probablement qu'il existait là une extraordinaire opportunité à explorer. Aujourd'hui, cette acquisition débouche sur l'annonce de la distribution de la solution auprès des opérateurs du monde entier.

ING Invisible Tickets

Bien qu'elle soit tardive et ait de la sorte fait perdre beaucoup de temps et de l'énergie des débuts, la transmission à TCS n'est certainement pas un drame : avec sa présence internationale et sa clientèle existante dans le secteur des transports, le projet possède de bonnes chances de rebondir et de se transformer en vraie réussite. Mais il est tout de même regrettable que, dans une époque où ses concurrentes se gargarisent de « beyond banking » et de « finance enfouie » pour assurer leur avenir, ING se révèle incapable de concrétiser un concept original et prometteur dans ce registre.

Le sort des « Invisible Tickets » constitue une illustration caractéristique de la vie de l'innovation dans les grands groupes, en particulier bancaires. Elle fait parfois émerger des pistes de réflexion intéressantes mais, trop souvent, celles-ci succombent à la combinaison des deux facteurs létaux que sont, d'une part, la lenteur de leur mise en œuvre et, d'autre part, les reversements de priorité qui surviennent régulièrement. À la fin, c'est un acteur plus agile et/ou plus clairvoyant qui tire les marrons du feu.

dimanche 26 novembre 2023

La gestion de notes de frais en API

Findity
Comme tant d'outils financiers, la gestion des notes de frais est une composante certes nécessaire du pilotage des entreprises mais définitivement pas une fonction centrale. Forte de ce constat indéniable, la spécialiste Findity choisit de distribuer désormais sa technologie sous forme d'API, de manière à l'intégrer dans les processus stratégiques.

L'éditeur occupe déjà une place particulière dans le paysage puisqu'il ne s'adresse pas directement aux utilisateurs finaux, préférant commercialiser sa plate-forme auprès d'autres fournisseurs de logiciels aux entreprises. Les solutions de comptabilité, de paye, de ressources humaines, de finances, de cartes de paiement… peuvent ainsi être dotées facilement (sans code) d'une option complémentaire, sous leurs propres couleurs, couvrant dépenses professionnelles, indemnités kilométriques, pécules journaliers…

Les clients de Findity préfèrent généralement se concentrer sur leur cœur de métier et ne dilapident donc pas leur énergie sur des capacités qu'ils ont tendance à considérer comme périphériques. Cependant, ils découvrent rapidement que la gestion des notes de frais entretient des relations étroites avec leurs domaines de prédilection et qu'une approche (presque) totalement indépendante est loin d'être optimale pour les personnes en charge des missions correspondantes dans les organisations qui leur font confiance.

La mise à disposition en API de l'ensemble des services de Findity permet de répondre à ces limitations. Qu'il s'agisse de capturer des reçus pour les conserver dans un espace d'archivage mutualisé, de régler les remboursements avec le versement de salaire, de comptabiliser automatiquement les charges, de réconcilier les transactions effectuées avec une carte de société…, il devient alors possible d'orchestrer les processus de bout en bout par composition des tâches requises, en limitant les interventions humaines.

Findity Expense API

L'enjeu est évidemment d'offrir une expérience idéale aux opérateurs des logiciels en question et Findity a parfaitement compris que c'est aussi son rôle, même en tant que sous-traitant, en quelque sorte, responsable d'une infime partie de la chaîne de valeur (souvent perçue comme rébarbative, incidemment). La leçon mériterait d'être entendue dans les institutions financières. En effet, celles-ci se trouvent fréquemment dans une situation similaire, introduisant des frictions dans des parcours où leur apport n'est évidemment pas la finalité visée par le client, seulement préoccupé par son projet.

Les acteurs de l'industrie qui, en 2023, rechignent toujours à s'ouvrir vers l'extérieur et qui vont probablement s'insurger contre la future réglementation accompagnant la DSP3 (qui n'exigera pourtant que l'exposition d'information) devraient enfin comprendre que leur avenir passera obligatoirement par la distribution de leurs offres – toutes, sans exception, à terme – sous forme de services, prêts à s'insinuer en toute transparence dans des expériences plus vastes, qui sont celles que vivent réellement leurs clients.

samedi 25 novembre 2023

BBVA veut fédérer ses équipes de développeurs

BBVA
Presque deux ans après la création de sa division logicielle unifiée, BBVA annonce le franchissement d'une étape supplémentaire destinée à stimuler les collaborations et les synergies entre ses équipes de développement… et confirme ainsi indirectement que le seul changement d'organisation ne suffit pas à faire évoluer la culture…

Naturellement, ce constat n'est pas une complète surprise et résonnera dans l'expérience de nombreux responsables informatiques, bien que, comme j'ai souvent l'occasion de le relater, mes contacts (certes superficiels et désormais lointains) avec l'établissement espagnol m'aient toujours laissé l'impression d'une capacité, rarement égalée dans le secteur et dans un groupe international de sa dimension, à rassembler sa communauté de l'ingénierie logicielle autour de valeurs, de principes et d'objectifs partagés.

La réalité est donc têtue : établir et maintenir des synergies entre plus de 15 000 individus, parmi lesquels les esprits indépendants et autres anti-conformistes ne sont pas l'exception, répartis un peu partout dans le monde (en Espagne, en Amérique du Sud, en Turquie… sans compter les inévitables prestations délocalisées) requiert des efforts considérables. Pourtant les enjeux valent largement de s'y atteler, entre les surcroîts d'efficacité et la satisfaction, pour tous, de consacrer l'essentiel de son temps à relever des défis complexes plutôt qu'à le perdre à résoudre des problèmes insignifiants.

BBVA ONE

Toutes les entreprises confrontées aux mêmes frustrations le savent, une telle ambition passe d'abord par la mise en place d'un ensemble de guides opérationnels, parfois accompagnés de composants prêts à l'emploi, couvrant la totalité du cycle de vie des projets. Leur combinaison débouche sur une méthodologie commune qui a vocation à accélérer et faciliter l'apprentissage des meilleures formules, ainsi que leur mise en œuvre pour, in fine, l'élaboration performante de produits de qualité supérieure.

Cependant, alors que les démarches du genre sont habituellement pilotées par une entité centrale, dont la distance avec les collaborateurs de terrain conduit fréquemment à leur rejet plus ou moins explicite par ces derniers, BBVA retient une approche fédératrice, ancrée dans les usages. En effet, les « playbooks » qui constitueront son corpus de recommandations seront concoctés par les développeurs eux-mêmes, quels que soient leur pays d'implantation et le domaine d'activité métier dans lequel ils exercent.

L'idée sous-jacente est, bien sûr, d'encourager l'adoption des bonnes pratiques en capitalisant sur l'espoir que, quand elles émanent de pairs, elles sont plus acceptables (parce qu'elles sont le résultat d'un vécu vérifiable). Avant de faire de son équipe de développement la meilleure de l'industrie, comme le rêve BBVA, l'initiative aura toutefois à surmonter une autre catégorie de difficultés. En particulier, la gouvernance associée, qui devra louvoyer entre la diversité des participants, l'exigence de cohérence globale et un niveau minimal de contrainte avec ses règles du jeu, reste à préciser…

vendredi 24 novembre 2023

Un avatar interactif chez Commerzbank

Commerzbank
Non contente de lancer un service d'assistance propulsé à l'intelligence artificielle générative, l'allemande Commerzbank l'incarne sous les traits d'un avatar simulant avec un certain réalisme une conversation avec un être humain. Le résultat attirera certainement l'attention mais peut-il vraiment tenir sa promesse d'une meilleure expérience utilisateur ?

Le projet, pour lequel aucune date de déploiement n'est évoquée, a vocation à offrir un nouveau canal de communication aux plus de deux millions de clients adeptes de l'application mobile de la marque. Évolution logique (?) du principe du chatbot capable uniquement de dialogue par messages écrits, il leur permettra d'interagir avec un agent virtuel animé, en langage naturel et de vive voix, afin d'obtenir des informations générales, des réponses à leurs questions et des recommandations personnalisées.

En arrière-plan, Commerzbank met en œuvre les technologies de Microsoft, dont, bien sûr, le moteur d'IA générative issu de son partenariat avec OpenAI, accompagné de son module d'avatar interactif, fraîchement annoncé lors de son récent événement Ignite. Des outils plus classiques, vraisemblablement d'apprentissage automatique, complètent enfin la palette, assurant selon toute probabilité l'essentiel du travail de fond, pour une solution qui s'affiche comme responsable, digne de confiance et fortement sécurisée.

Bien que l'institution financière se présente comme pionnière avec son initiative, celle-ci n'en rappelle pas moins des précédents, parfois anciens. Naturellement, quand NatWest testait l'ajout d'un visage à son assistante « digitale » Cora en 2018 ou même quand Westpac invitait ses candidats à un emploi à échanger avec Wendy en 2020, ChatGPT n'était pas encore né et les « raisonnements » de ces robots étaient peut-être moins sophistiqués. En revanche, la qualité de leurs avatars n'avait rien à envier, au contraire, à celui de Microsoft, si j'en crois sa vidéo de démonstration (ci-dessous).

Microsoft Talking Avatar

Or que peuvent nous enseigner ces exemples historiques ? Si les premières réactions étaient extrêmement positives, comme chez Commerzbank, il faut croire que la satisfaction n'a pas perduré puisque les deux implémentations ont disparu des radars sans laisser de trace, tandis que, dans le cas de NatWest, le chatbot qui en constituait le cœur continue à évoluer (jusqu'à intégrer il y a peu une brique d'IA générative, incidemment). Voilà de quoi relativiser la valeur de l'avatar dans la relation bancaire.

En réalité, les innombrables tentatives d'introduire ce genre de gadget dans les plates-formes bancaires se soldent régulièrement par des échecs cuisants… et je ne pense pas que le réalisme des animations, encore approximatif, soit à blâmer. Je proposerais plutôt une hypothèse au sujet du scénario d'usage : ce n'est pas pour une demande élémentaire, de celles que prennent en charge ces systèmes, que les clients attendent une approche plus humaine, au moins d'apparence, susceptible d'être simulée.

S'ils peuvent éventuellement apprécier, dans ces circonstances, un mode conversationnel qui leur apporte une réponse précise et rapide, ce n'est que pour des besoins d'accompagnement plus élaboré qu'ils ressentiront l'envie de proximité et d'empathie. Ce n'est pas une coïncidence s'ils préfèrent rencontrer un conseiller en chair et en os dans ces mêmes conditions. La démarche de Commerzbank a donc toutes les chances de capoter… et une petite étude des antécédents aurait évité d'y gaspiller de l'énergie.

jeudi 23 novembre 2023

Venmo intègre les dépenses de groupes

Venmo
Les applications de gestion des dépenses de groupe existent depuis bien avant la naissance des smartphones modernes… mais il semblerait qu'elles aient constamment été oubliées de la « digitalisation » des paiements. Voilà une lacune que Venmo vient (enfin) de corriger et qui devrait inspirer tous les fournisseurs de porte-monnaie virtuel.

À défaut d'être pionnière, la filiale de PayPal adopte le meilleur des solutions existantes pour bâtir la sienne. Généralisant sa capacité historique de partage ponctuel d'addition entre amis, elle propose ainsi, en parfait alignement avec son orientation sociale de toujours, de créer des groupes d'utilisateurs, chacun se voyant attribuer une quote-part des frais communs. Au fil du temps, les différents participants enregistrent leurs débours, dans une logique entièrement collaborative, et suivent la situation du compte collectif, dont l'apurement peut être effectué ou exigé à tout moment par un d'eux, d'un geste.

Le concept répond à un vrai besoin. Les consommateurs, notamment parmi les jeunes générations, rencontrent régulièrement des circonstances dans lesquelles les dépenses sont réparties entre plusieurs personnes. On pense immédiatement aux colocations, aux ménages sans compte joint, aux parents séparés, aux voyages en groupe…, mais également aux clubs informels (de lecture ou de jeu de société), par exemple.

Dans la plupart de ces cas, les parties prenantes recourent naturellement à des outils de paiement entre pairs plutôt qu'à des virements bancaires afin de solder leurs dettes. Quoi de plus logique, dans ces conditions, que de leur éviter de passer par une plate-forme tierce (ou une bonne vieille feuille de calcul, voire un carnet en papier) afin de tenir la comptabilité et leur procurer cette fonction directement au sein du même logiciel ?

Venmo Groups

L'initiative, certes tardive, de Venmo souligne cruellement l'anomalie que représente l'absence des principaux acteurs des paiements sur ce genre de gadgets, banques ou autres. Il s'agirait pourtant d'un moyen, relativement facile à mettre en œuvre, de capter des flux qui ont toutes les chances d'emprunter des canaux dérivés, de la concurrence et/ou intermédiés (par les réseaux de carte, en particulier). À l'heure où les transferts de compte à compte cherchent à s'imposer, l'opportunité devrait attirer les convoitises.

Le dispositif de paiement interbancaire français Paylib fournit une illustration caractéristique de cette occasion manquée : alors qu'il est conçu pour faciliter et accélérer les échanges d'argent entre individus, il offre la gestion des dépenses de groupe par l'intermédiaire d'une application indépendante, vraisemblablement moins riche que celles qui existent par centaines sur les AppStores et sans avantage spécifique en termes d'expérience client, puisque déconnectée du module de paiement.

Son intégration au cœur des services bancaires, au côtés du cœur de PayLib, lui-même implémenté par chaque établissement, en ferait pourtant un excellent moteur d'engagement. Mais là réside aussi son plus gros handicap, puisqu'elle exigerait un effort de tous les membres du consortium pour rendre l'option universelle. La première étape consisterait à distribuer les fonctions correspondantes sous formes d'APIs afin d'en simplifier la prise en charge. Le principe a-t-il été ne serait-ce qu'envisagé ?

mercredi 22 novembre 2023

ChatGPT ne suffit pas à créer une innovation

OpenAI
Il y a quelques jours, un article de TechCrunch cherchait à rappeler aux fondateurs de startups que la seule intégration de ChatGPT dans leur produit ne suffisait pas à en faire un concept révolutionnaire, y compris auprès d'investisseurs succombant à la dernière mode. Il me semble important de lancer une alerte similaire dans les grandes entreprises…

Ayant précédemment écrit dans ces colonnes que je considérais bien comme innovante la plate-forme dévoilée voilà un an par OpenAI, mes propos risquent de paraître incohérents (sachant que je n'ai pas changé d'avis depuis le mois de janvier). Pourtant, il est nécessaire de distinguer l'outil déployé à l'intention du grand public, inspirateur de multiples cas d'usage originaux, de l'intelligence artificielle générative que souhaitent maintenant exploiter les jeunes pousses comme les multinationales.

Afin de comprendre mon raisonnement, il faut d'abord souligner ce qu'est cet animal dont tout le monde parle aujourd'hui et qui fait tant fantasmer : il s'agit d'un système algorithmique, fondé sur des mécanismes statistiques, capable de générer des contenus (textes, sons, images, vidéos…) rationnels à partir d'une masse de données qui l'alimente en amont et dont il réplique les caractéristiques. La créativité (réelle) en est donc totalement absente, seul le contexte de mise en œuvre peut faire naître l'innovation.

Or, même sans s'arrêter sur le stade encore largement expérimental du sujet dans l'environnement professionnel, force est de constater que les implémentations concernent essentiellement des applications plutôt basiques. La recherche et le décryptage interactifs d'information ou l'assistant virtuel (pardon, le copilote) tenant une conversation sensée, pour ne citer que ces exemples les plus courants, sont certes des progrès utiles mais ils n'apportent que des améliorations incrémentales pour les utilisateurs.

Ceux, plus audacieux, qui désirent mettre à profit ChatGPT ou l'un de ses équivalents dans l'optique de développer une solution véritablement différenciante doivent reconnaître et admettre que ce composant ne contribuera qu'à la partie émergée de l'iceberg (et encore faut-il qu'il soit correctement « nourri », mais ceci est un autre débat). Le moteur, essentiel à l'innovation, lui, s'appuiera alors sur d'autres technologies, notamment l'apprentissage automatique et les autres approches d'IA, en restant dans le domaine.

Pour l'exprimer en d'autres termes, et pour reprendre une thématique qui m'est chère, l'intelligence artificielle générative n'est pas une baguette magique qui transformerait instantanément un service existant en quelque chose d'extraordinaire. Elle n'est qu'un dispositif supplémentaire au sein d'une immense boîte à outils, permettant principalement d'optimiser la communication entre un humain et des gisements de données. À chacun d'imaginer les circonstances dans lesquelles elle aura un maximum d'impact…

OpenAI ChatGPT

mardi 21 novembre 2023

Fortis propose la location-vente immobilière

BNP Paribas Fortis
L'attribution d'un prix de l'innovation bancaire par Qorus (et Accenture) à BNP Paribas Fortis pour son initiative HappyNest me fournit une excellente occasion de m'attarder sur cette incursion d'une banque dans le domaine de la location-vente immobilière, jusqu'à maintenant occupé exclusivement, à ma connaissance, par des jeunes pousses.

Issue d'une collaboration avec le promoteur local Matexi, la plate-forme, inaugurée au cours du printemps 2023, reprend, apparemment avec succès, le principe précédemment exploré par OwnHome en Australie ou Kettel au Royaume-Uni, pour ne citer que ces deux références. Elle propose donc aux belges d'emménager dans la résidence de leurs rêves en tant que locataires, en bénéficiant d'une option garantie d'acquisition, à des conditions prédéterminées et avantageuses, après quatre ans d'occupation.

Concrètement, la structure HappyNest assume le rôle de propriétaire-bailleur du logement (à vocation d'habitation principale, faut-il préciser) et établit un montant de loyer dans les normes du marché. À partir du cinquième anniversaire de l'opération, elle va revendre le bien, soit à un tiers et le contrat de location peut être prolongé dans le cadre légal d'une cession, soit, s'il le souhaite, à l'occupant, qui bénéficie alors d'une réduction sur le prix équivalente à la moitié des sommes versées au cours des quatre ans précédents.

Si, en comparaison des exemples cités plus haut, HappyNest n'autorise pas une recherche libre à ses clients et restreint au contraire leur choix à un parc, toujours dans le neuf, qu'elle achète en amont (parmi l'offre de Matexi ?), cette limitation lui procure l'opportunité d'appliquer ses propres critères de sélection. En l'occurrence, elle ne retient que des propriétés recueillant le meilleur coefficient d'efficacité énergétique, ajoutant ainsi à sa mission celle d'apporter un coup de pouce à la transition écologique.

BNP Paribas Fortis – HappyNest

L'initiative représente, naturellement, une réponse aux défis de la conjoncture actuelle. En effet, sans même parler de la flambée des coûts dans l'immobilier, entre la hausse brutale des taux d'intérêt, la crise du pouvoir d'achat et, entre les deux, le resserrement des exigences pour l'obtention d'un crédit, les consommateurs, et en particulier les primo-accédants, éprouvent d'énormes difficultés à devenir propriétaires, à tel point que les nouveaux crédits hypothécaires sont en chute de plus d'un tiers en un an.

Dans ce contexte, la démarche de BNP Paribas Fortis n'a pas pour seule vocation d'alléger les obstacles des candidats à l'achat. Elle constitue aussi une mesure d'amortissement du choc sur un segment d'activité important. Avec HappyNest, non seulement dispose-t-elle d'un nouveau modèle d'affaires, complémentaire, mais, grâce à son positionnement très en amont des projets d'acquisition, elle peut également espérer que les utilisateurs de la solution se tourneront en priorité vers ses offres de prêts à la fin de la phase de location, même s'ils sont libres d'emprunter où bon leur semble.

Dans un paysage assez terne pour l'innovation dans les institutions financières depuis plusieurs mois, que reflète d'ailleurs largement le palmarès de Qorus, la filiale belge de BNP Paribas fait preuve de résilience, pas nécessairement en termes de créativité mais, à tout le moins, dans sa capacité (rare) à adopter et adapter rapidement une idée d'abord développée par des startups, qui lui permet d'affirmer sa présence aux côtés de ses clients dans une période qui reste compliquée pour leur porte-monnaie.

lundi 20 novembre 2023

L'encaissement sur iPhone arrive en France

Apple
Un an et demi après son annonce aux États-Unis et quelques mois après sa première introduction dans l'Union Européenne (aux Pays-Bas), la solution d'encaissement sur iPhone 100% logicielle d'Apple débarque maintenant en France. Que faut-il penser de ce lancement relativement rapide et quelles conséquences peut-on en attendre ?

Rappelons que la fonction « Tap to Pay » propose aux commerçants, artisans et autres professionnels d'utiliser leur téléphone comme un terminal de paiement, acceptant toutes les transactions sans contact grâce à une application ad hoc, sans requérir le moindre accessoire matériel, comme c'était le cas jusqu'à présent et depuis les premiers pas de Square… en 2010, à tout le moins sur iPhone, puisque le système Android dispose de longue date de capacités de ce genre, offertes par différents prestataires.

Parce que, comme avec son porte-monnaie mobile, Apple se contente de fournir des fonctions techniques, laissant aux acteurs spécialisés le soin de les exploiter dans leurs infrastructures de paiement, ce sont des enseignes connues qui distribuent l'option auprès de leur clientèle : Banque Populaire et Caisse d'Épargne, Revolut, Worldline, Adyen, SumUp…, dont les déclinaisons respectives sont d'ores et déjà disponibles dans l'AppStore, qui seront bientôt rejointes par BNP Paribas, Stripe… et quelques autres.

Le choix de l'hexagone pour un déploiement précoce n'est finalement pas une surprise. Entre une part de marché significative de l'iPhone, qu'il est crucial de défendre face à une concurrence plus avancée dans le domaine de l'encaissement, et un taux d'équipement en cartes sans contact dépassant les 90%, dans un des pays les plus peuplés de la région, la décision est logique. La seule limitation est probablement l'enrôlement des banques, qui semble pour l'instant timide et laisse le champ libre à la FinTech.

Apple Tap to Pay en France

Les établissements historiques ont quelques raisons d'être réticents. Tout d'abord, ils ont certainement des difficultés à accepter l'intermédiation obligatoire d'Apple du côté de l'encaissement, après avoir subi le « hold-up » qu'a réussi la marque dans le paiement, d'autant plus qu'elle est vraisemblablement assortie de commissions qui vont ponctionner leurs marges (naturellement, la communication officielle n'évoque pas le sujet).

Notons que ce verrouillage, qui relève d'une forme de monopole, devrait, attirer l'attention du régulateur, déjà préoccupé par les mêmes restrictions existantes sur le porte-monnaie mobile de la firme. Incidemment, les velléités de l'Europe de créer son propre mécanisme de paiement (EPI ou autre) risquent de se heurter à cet obstacle, ce qui pourrait accélérer le déclenchement d'une offensive par les autorités.

D'autre part, la plate-forme ne supporte aujourd'hui que les schémas des réseaux Visa, Mastercard, Discover et American Express, tandis que des négociations seraient en cours afin d'inclure aussi celui du GIE Cartes Bancaires. Au vu des débats qui agitent l'organisme ces derniers temps, plus ou moins lâché par certaines banques (hasard ? les premières citées sont celles de BPCE, à l'occasion des jeux olympiques parisiens de 2024), les enjeux de souveraineté joueraient-ils donc un rôle majeur dans la partie ?

En synthèse, Apple arrive cette fois dans une bataille bien engagée, sans arguments de différenciation, mais toujours en force. Son entrée en lice, en particulier en France, répond à une menace, notamment dans les grandes boutiques de plus en plus fréquemment adeptes de l'encaissement en rayon, mais elle ne changera pas la donne.

dimanche 19 novembre 2023

Un copilote pour l'assurance

Zelros
Avec l'avènement de l'intelligence artificielle générative, les assistants virtuels – qui n'ont jamais véritablement rempli le rôle que cette appellation implique – tombent en désuétude : la mode est désormais aux copilotes. Et celui que vient d'introduire Zelros à l'intention des acteurs de l'assurance semble effectivement mériter son nom.

Destiné aux agents commerciaux, aux conseillers financiers et autres représentants du service client, ce nouveau composant promet de leur offrir une aide contextuelle opérationnelle dans l'accompagnement des assurés. Il ne se contente donc pas de répondre aux questions qui lui sont posées, en se comportant comme un moteur de recherche interactif, il sait également exploiter la connaissance mise à sa disposition dans l'optique de suggérer des actions pertinentes, au bon moment, à son interlocuteur.

Pour ce faire, le copilote est en mesure de se connecter à toutes sortes de sources d'information, internes et externes. Les présentations de produits et documents complémentaires, les profils de client, les contrats et les polices, les historiques de sinistres, les données issues de fournisseurs tiers… sont combinés de manière dynamique (normalement par API) et alimentent des modèles d'IA capitalisant sur l'expertise en assurance de Zelros afin de faciliter la tâche des utilisateurs.

L'objectif est de procurer à ceux-ci les clés de la compréhension extensive de la situation et des besoins – implicites, notamment – des clients et de les orienter automatiquement vers les réponses les plus appropriées. Les exemples de mises en œuvre comprennent, entre autres, une proposition de « prochaine question » ou d'argumentaire pendant une conversation ou encore l'envoi de courriels personnalisés générés par la machine, respectant la déontologie et les exigences réglementaires.

Zelros – The Insurance Copilot

Hormis ce dernier cas, je ne suis pas totalement certain qu'il s'agisse d'applications d'IA générative à proprement parler, comme l'évoque la communication (qui surfe sur la tendance actuelle). Mais qu'importe la précision, c'est la démarche qui compte et il faut maintenant espérer que les adeptes de la plate-forme de Zelros (parmi lesquels apparaissent Crédit Agricole, MAIF, Matmut…) adoptent ces nouvelles capacités et développent ainsi une approche de conseil mieux ajustée à chaque cas particulier.

À mon habitude, je regrette que la seule option de déploiement envisagée s'adresse aux intermédiaires d'assurance, alors qu'une version directe, en libre service, apporterait certainement une valeur additionnelle inestimable, au moins pour les consommateurs qui ne sont pas fans d'interactions avec un humain (dans ce domaine). Si, comme je le pense, la faute en revient aux compagnies craignant d'exposer publiquement un système qu'elles jugent susceptible d'incertitudes inacceptables… peut-être pourraient-elles considérer, et Zelros avec elles, une déclinaison dans l'univers de la prévention ?

Information repérée grâce à Florian (merci !)

samedi 18 novembre 2023

Les jeunes délaissent la carte bancaire

ABN AMRO
Alors que les néerlandais ont déjà presque totalement abandonné l'usage des espèces pour leurs achats en boutique, une étude conduite par ABN AMRO sur l'historique de transactions de ses clients (et non une simple enquête d'opinion) montre que leur recours à la carte en plastique est aussi en voie de disparition au profit des outils mobiles.

Sans grande surprise, en raison notamment de leur addiction générale au téléphone mobile, ce sont les jeunes générations qui mènent la transition. Près de trois quarts (73%) des 18-25 ans préfèrent ainsi utiliser leur smartphone ou leur montre connectée pour régler leurs achats en point de vente, alors qu'ils n'étaient que 6 sur 10 un an auparavant. En outre, leurs cadets leur emboîtent le pas dès qu'ils en ont la possibilité (les taux d'adoption grimpent rapidement, de 46% à 16 ans à 65% à 17 ans).

La fréquence d'utilisation est également en augmentation, puisque 69% des transactions (sur terminal électronique) réalisées au cours du troisième trimestre par cette même catégorie sont exécutées sans carte physique, ce qui laisse entrevoir que, une fois la bascule faite, le téléphone (ou la montre) devient quasiment le moyen de paiement exclusif employé par ses adeptes. Bien que le phénomène soit moins sensible dans les classes d'âges plus élevées, la tendance est indéniablement à la hausse accélérée.

ABN AMRO – Cartes Bancaires

Naturellement, divers précédents le confirment, la réalité aux Pays-Bas ne reflète pas obligatoirement ce qui se passe aujourd'hui dans les autres pays. En revanche, il serait surprenant que la tendance générale soit fondamentalement différente, même si elle est décalée de quelques années. Et la prédiction par les consommateurs du déclin progressif de la carte bancaire dans leurs habitudes (que révèle un sondage complémentaire d'ABN AMRO) a toutes les chances de se matérialiser partout, à moyen terme.

Une telle évolution constituerait certainement une excellente nouvelle pour les porteurs de projets de système de paiement souverain en Europe, EPI en tête. En effet, si les infrastructures des grands réseaux américains paraissent extrêmement difficiles à contourner avec les instruments classiques, le passage à un modèle entièrement « digitalisé » entrouvre une opportunité pour des dispositifs concurrents. Encore faudra-t-il ne pas rater le coche (et offrir une option alternative dans des délais raisonnables, ce qui semble mal engagé)… et que l'équipement des commerçants ne soit pas un obstacle.

vendredi 17 novembre 2023

La BCE s'inquiète (encore) des risques IT

BCE
En matière de risque informatique et de cybersécurité dans les banques européennes, les rapports du superviseur se suivent et se ressemblent. Sa toute dernière synthèse montre en effet des lacunes persistantes qui ont de quoi inquiéter dans un contexte où, selon moi, des transformations essentielles sont sans cesse reportées.

Basée à la fois sur les auto-diagnostics établis par les institutions financières elles-mêmes et les 22 missions d'inspection conduites dans 11 pays par la Banque Centrale Européenne depuis 2020, la compilation note d'abord une augmentation sensible de la sévérité et de l'amplitude des faiblesses identifiées. Deuxième constat fort, l'externalisation des services, qui a toujours été un point sensible des analyses au fil des ans, passe désormais au premier plan des préoccupations, dans plusieurs dimensions.

D'une part, les pertes avérées, généralement dues à des indisponibilités ou une mauvaise qualité des capacités concernées, sont en hausse. Bien que l'observation porte sur un petit nombre d'incidents à fort impact, elle souligne l'impératif d'un contrôle renforcé sur la dépendance à des fournisseurs tiers car elle tend à démontrer le caractère critique des composants qui leur sont confiés, même si leur part dans le total des dépenses technologiques reste stable (seule l'infonuagique croît, tout en restant marginale).

D'autre part, cette dernière tendance provoque une appréhension spécifique : les opérateurs de solutions en « cloud » (suffisamment sérieux et robustes pour être considérés par les banques) n'étant qu'une poignée sur le marché, la BCE craint un effet de concentration des risques d'autant plus problématique que les plans de sortie et de réponse aux urgences sont fréquemment négligés, mal préparés ou, à tout le moins, peu éprouvés (qui a vraiment testé la bascule de plate-forme prévue en cas de panne ?).

BCE – IT Risks

Soucieux depuis longtemps des multiples briques informatiques obsolètes qui continuent à assurer des fonctions fondamentales dans la plupart des établissements, le régulateur trouve de quoi se réjouir dans la diminution des anomalies de production engendrées par des projets stratégiques, qui sont pourtant en progression. Ce danger n'en reste pas moins la cause principale des interruptions de services enregistrées. En conséquence, une plus grande attention aux processus et à la gouvernance des changements est jugée indispensable. Les chantiers les plus sensibles (tels que les rénovations de cœurs bancaires) étant, à mon avis, encore à venir, la recommandation est cruciale.

Enfin, le sujet le plus délicat (récurrent, lui aussi) évoqué dans de rapport transcende tous ces aspects (ainsi que ceux que je n'ai pas repris ici) : il s'agit des compétences. En adoptant un point de vue modéré, la BCE n'hésite pas à faire le lien entre les déficiences exposées et le manque de compréhension de l'informatique dans les plus hautes structures de décision des banques. J'y ajouterais également une perte d'expertise technique interne au plus près des équipes de développement… souvent constituées uniquement de personnels externes ne maîtrisant pas les exigences du secteur et laissées sans supervision dédiée dans le domaine des risques et de le cybersécurité.

jeudi 16 novembre 2023

Bambu GO, le robot conseiller en service

Bambu
Petit à petit, tous les domaines de la finance se déclinent sous forme de services, prêts à intégrer dans les offres d'entreprises de tous secteurs. Le phénomène touche maintenant l'investissement automatisé, grâce à une collaboration entre WealthKernel, fournisseur de briques spécialisées, et Bambu, concepteur de solutions technologiques.

Naturellement, la nature particulière du domaine considéré conduit à une approche relativement originale du modèle, complémentaire de celle, beaucoup plus classique, que propose déjà WealthKernel avec son catalogue exhaustif de composants transactionnels – d'enrôlement des clients, de gestion des comptes et des portefeuilles, de paiement, de trading, de conservation des actifs – exposé par API et plutôt destiné aux entreprises disposant de capacités informatiques adaptées.

Avec Bambu GO, la cible visée reste dans le périmètre de la finance, notamment les conseillers en patrimoine qui souhaiteraient étendre leur champ d'action vers une clientèle moins élitiste, les néo-banques en mal de diversification ou les plates-formes de courtage désireuses de monter en gamme. Probablement pour des raisons réglementaires, la distribution de produits d'investissement étant strictement encadrée, il n'est donc pas question d'embarquer le robot-conseiller dans un site d'e-commerce (par exemple).

La promesse est celle d'une solution entièrement « digitale » complète, pour un abonnement fixe de 500 dollars par mois, comportant à la fois une application destinée aux clients finaux (conforme aux standards du genre, entre autres en termes de compréhension du profil et de l'aversion au risque) et un espace d'administration pour le conseiller, personnalisables à volonté, à la fois en ce qui concerne les interfaces mais également les différents modèles et objectifs d'investissement présentés.

Bambu GO

Le parcours d'enregistrement est aussi simple, fluide et rapide pour l'organisation qui adopte la plate-forme que pour le consommateur qui la choisira ensuite afin de faire fructifier son épargne. Une première étape consiste évidemment à vérifier l'identité de la société et à valider son agrément auprès de la FCA (le déploiement est limité au Royaume-Uni, en attendant une prochaine ouverture à d'autres marchés). Après validation des conditions contractuelles, un configurateur en ligne permet alors de paramétrer les multiples facettes du système, sans la moindre ligne de code logiciel.

Après les paiements (de toutes sortes), le crédit, l'assurance, l'épargne…, la mise à disposition de fonctions de robot-conseiller en services constitue le prolongement logique de la transformation en profondeur de l'industrie financière. Certes, on n'en est pas encore, à ce stade, à une option d'investissement invisible, enfouie au cœur d'une expérience plus proche des préoccupations de l'utilisateur, mais la démonstration de la faisabilité technologique étant acquise, je ne doute pas qu'elle émerge bientôt.

mercredi 15 novembre 2023

L'avantage concurrentiel du travail hybride

Allstate
Oubliez la flexibilité du travail qu'a encouragée la crise sanitaire ! La plupart des entreprises souhaitent désormais revenir à leur fonctionnement d'avant et imposer à nouveau la présence physique de leurs employés dans leurs locaux. Celles qui, à l'instar d'Allstate, se préoccupent des attentes de leurs collaborateurs comprennent que, au contraire, elles doivent continuer à améliorer leurs dispositifs.

La pandémie a contraint les organisations à s'adapter, généralement dans l'urgence, et, naturellement, les politiques de télétravail instaurées en réponse aux contraintes conjoncturelles qui n'étaient pas idéales sur le moment le sont encore moins quand revient une situation plus normale. Cependant, dans l'intervalle, les premiers concernés, à savoir les salariés, ont découvert, pour une majorité d'entre eux, les avantages qu'offrait la faculté d'exercer leur activité à domicile, partiellement ou à plein temps.

Entre les imperfections et les attentes des usagers, les responsables font de plus en plus fréquemment le choix, largement médiatisé depuis quelques mois, de rétablir le statu quo antérieur aux chamboulements de 2020, ignorant de la sorte, à leurs risques et périls, les préférences de leurs effectifs. À l'inverse, le directeur des ressources humaines d'Allstate les entend et a donc choisi de persévérer, en cherchant systématiquement à résorber les limitations et les faiblesses du dispositif initial.

Dans cette perspective, un nouveau rôle de « futuriste du lieu de travail » a été créé, à la jonction entre les fonctions existantes en charge du personnel, de l'immobilier et des technologies. Sans préjugés et dans une logique de recherche de valeur, Lauren DeYoung, qui occupe le poste, a d'abord pris le temps d'analyser les avis des collaborateurs, à tous les niveaux de l'échelle hiérarchique, dont la synthèse est la grande satisfaction vis-à-vis de la flexibilité introduite au cours des dernières années.

Dans ces conditions, il ne peut être question de reculer. En revanche, la diversité des perceptions fait rapidement ressortir qu'une solution unique ne conviendra jamais à tout le monde et à tous les cas particuliers. La compagnie a donc déployé une stratégie en deux volets : d'une part, la délégation aux managers opérationnels de la sélection des modalités applicables à leur équipe et, d'autre part, la mise en place de ressources communes à l'ensemble du groupe, garantissant une cohérence globale.

Dans ce dernier registre, les capacités offertes s'étendent de modules de formation (d'une journée) – destinés à inculquer à toutes celles et tous ceux qui sont amenés à encadrer d'autres personnes (ils sont 7 000 à devoir la suivre dans les six mois) les compétences nécessaires afin de réaliser leur mission dans un contexte distribué – jusqu'à l'allocation d'un budget spécifique dit de « connexion » que chaque responsable dépense à sa discrétion dans le but d'entretenir un esprit de collaboration.

Sans (véritable) surprise pour une démarche basée sur les attentes des salariés, les bénéfices mesurés par Allstate sont tout de même édifiants, notamment en ce qui concerne son attractivité en tant qu'employeur, extrêmement importante dans la période actuelle de difficultés de recrutement de talents. Par exemple, depuis l'adoption de sa politique, les candidatures reçues sont en hausse de 23% et, constat encore plus intéressant, leur diversité (ethnique ou de genre) connaît une progression de 33%.

Par ailleurs, les outils de suivi accompagnant la démarche aident non à surveiller les comportements individuels mais plutôt à évaluer l'évolution des usages. Ainsi armé, l'assureur a réduit son parc immobilier de moitié et a réaménagé de fond en comble les locaux conservés, de manière à convertir une structure essentiellement de bureaux en des espaces, conçus plus comme des cafés, optimisés pour les rencontres en face à face des équipes et la socialisation avec les collègues d'autres départements.

Avec un œil constamment braqué sur le ressenti des employés, Allstate veut poursuivre ses efforts d'amélioration. Elle ajoute régulièrement des options supplémentaires à son arsenal, puis vérifie toujours leur impact avant de décider de les conserver ou non. La leçon pourrait servir aux organisations qui n'ont pas compris que la crise sanitaire avait radicalement transformé la vision du travail dans les populations et croient pouvoir impunément faire comme si rien ne s'était passé (et s'épargner un chantier majeur).

Allstate

mardi 14 novembre 2023

La banque donneuse de leçons, ça suffit !

Scotiabank
Que les banques se préoccupent de l'environnement, tant mieux. Mais qu'elles donnent systématiquement l'impression de considérer que seuls leurs clients doivent faire des efforts, comme le suggère maladroitement Scotiabank à propos de la consommation fantôme des appareils électriques du foyer, cela devient absolument insupportable.

Hormis les climatosceptiques irréductibles, tout le monde se dit désormais engagé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Pourtant, dès qu'il est question de passage à l'action, les entreprises interpellent le grand public, les citoyens reportent la responsabilité sur les gouvernements, ces derniers critiquent l'industrie ou les nations les plus en retard… Finalement, après s'être transmis la patate chaude, (presque) personne n'a pris son propre impact à bras-le-corps… et l'horizon s'obscurcit toujours plus.

Le phénomène est d'autant plus critiquable quand une des parties prenantes se pose en donneuse de leçons à une autre… dans un domaine où elle n'est pas elle-même exemplaire. Tel est justement le cas, du moins je le soupçonne, avec la communication de Scotiabank. Certes, la recommandation de prendre garde aux équipements de la maison (micro-ordinateurs, enceintes acoustiques, consoles de jeu, électroménager…) qui aggravent la facture énergétique quand ils sont en veille n'est pas inutile.

Mais la banque s'applique-t-elle ses conseils ? A-t-elle défini et mis en œuvre une politique destinée à éteindre, hors des heures de bureau, ses imprimantes et photocopieurs, ses distributeurs de boisson, les écrans et autres périphériques informatiques en libre service…? De nos jours, l'éclairage est en principe piloté intelligemment… mais quid des lampes laissées en veille ? Et les branchements « sauvages » des employés, entre chargeurs de téléphone et chauffages d'appoint qui compensent les baisses de température ambiante décrétées par économie ?

Scotiabank – Electricity Challenge

Il ne s'agit pas ici de rajouter une couche à la déflexion généralisée des culpabilités. Mon propos vise simplement à souligner que les démarches de ce genre sont contre-productives quand elles ne sont pas accompagnées de preuves d'authenticité et de sincérité. Qui voudra faire l'effort auquel l'invite une organisation qui n'est pas en mesure de démontrer qu'elle a fait le premier pas ? Une approche beaucoup plus efficace consisterait pour Scotiabank (et d'autres qui s'essaieraient à l'exercice) à expliquer comment elle a procédé afin de réduire son gaspillage électrique, chiffres à l'appui, et, alors seulement, à encourager son audience à suivre son exemple.

La sensibilisation aux enjeux environnementaux, notamment dans le contexte actuel qui exige une implication concrète de la part de tous les corps de la société, est autant affaire de contenu que de forme. On connaît les débats qui entourent les perspectives punitives sur le sujet face aux visions positives, plus convaincantes et plus acceptables. Or d'autres nuances de communication, plus subtiles, entrent également en jeu, qu'il est indispensable d'assimiler pour espérer infléchir vraiment les comportements.

lundi 13 novembre 2023

L'informatique ambiante en ligne de mire

Humane
Apparue vers 2015, notamment dans les visions futuristes du cabinet Gartner, alors que la nouveauté du smartphone s'estompait et que les aventures de Google avec ses lunettes connectées commençaient à montrer des signes de désintérêt, la notion d'informatique ambiante trouve peut-être aujourd'hui sa première incarnation pratique.

Si on retient la définition, élémentaire, d'une technologie qui introduit de l'intelligence dans la vie quotidienne sans s'interposer entre l'utilisateur et son environnement, alors l'« ai pin » de Humane, dont les pré-commandes seront ouvertes aux États-Unis à partir de ce jeudi 16 novembre et qui se porte en principe discrètement au revers de la veste, accompagné de ses écouteurs reliés via Bluetooth, mérite effectivement la qualification d'informatique ambiante. Il est impossible de prédire son succès mais il préfigure une catégorie d'appareil entièrement nouvelle qui vaut d'y prêter attention.

Le petit gadget comprend principalement une caméra et un micro, qui lui permettent de capter son contexte tel que le perçoit son utilisateur, et une zone tactile autorisant quelques interactions minimales. Outre les échanges en langage naturel, un projecteur laser propose une troisième interface combinant affichage de textes sur la paume de la main et interprétations de gestes de navigation avec les doigts. Il est par ailleurs autonome en termes de communication, via le réseau cellulaire de T-Mobile.

Les usages à ce stade sont un échantillon de ce qu'offre un téléphone moderne, entre recherche en ligne et gestion des appels et autres messages (avec des mécanismes de priorité), en passant par des conseils nutritionnels (basés sur la reconnaissance des aliments présentés), la diffusion de musique (via le service de Tidal) ou encore la traduction de conversation en temps réel non intrusive. L'ensemble des applications s'appuient sur l'IA embarquée et le système nerveux central (infonuagique) qui agrège les sources externes (y compris personnelles, telles que les photos).

Humane ai pin

Avec un prix de 700 dollars, auquel s'ajoute un abonnement mensuel de 24 dollars, l'« ai pin » n'est évidemment pas à la portée de toutes les bourses mais reste suffisamment abordable pour devenir rapidement populaire, surtout avec les méthodes de marketing employées par ses concepteurs, dont beaucoup sont issus de l'école Apple. De là à y voir le successeur du smartphone, le pas est cependant énorme et il n'y a guère d'urgence pour les entreprises à se précipiter dans l'exploration de ses possibilités.

En dehors de l'effet de pionnier auquel certaines succomberont, comme toujours, les institutions financières le plus téméraires pourraient néanmoins profiter de la sortie de cet étrange objet pour réfléchir aux opportunités de l'informatique ambiante et de ses capacités d'interaction instantanée et intégralement contexualisée… puis, pourquoi pas, lancer une ou deux expérimentations concrètes de découverte et d'apprentissage.

Dans le domaine de la gestion de finances personnelles, je suggèrerais par exemple, dans une sorte de réponse à la fonction de pré-consultation de solde récemment intégrée dans Apple Pay, une solution capable d'analyser les étiquettes de prix lors d'une expédition de shopping (magasinage), qui déclencherait, selon des critères à ajuster et à configurer par le porteur, soit des alertes ou des recommandations par rapport à l'état de ses comptes bancaires, soit des propositions de financement.

Humane donne aujourd'hui une réalité à un modèle d'interface assez radicalement différent de ce que nous connaissons jusqu'à maintenant, possédant le potentiel d'une révolution de la même ampleur que celle qu'a provoquée l'iPhone en 2007 et plus fulgurante, au vu de l'accélération permanente des transformations dans notre monde. En conséquence, tous les décideurs, jusqu'aux plus timorés, devraient appréhender cette hypothèse et se tenir prêt à sa matérialisation, aussi improbable la jugent-ils.

dimanche 12 novembre 2023

Admiral expérimente l'assurance enfouie

Admiral
Initiative encore rare à grande échelle dans le secteur de l'assurance, le groupe britannique Admiral lance, par l'intermédiaire de sa structure exploratoire Pioneer, une offre complète de services embarqués à l'intention des entreprises qui souhaitent procurer à leurs clients une couverture en complément des produits qu'elles distribuent.

Le principe de l'« assurance enfouie » n'est certes pas très innovant mais on a plus l'habitude de le voir déployé par des trublions de l'AssurTech que par des établissements historiques. Fidèle aux classiques du genre, Connect by Admiral, c'est son nom, propose donc à ses utilisateurs, par exemple des boutiques en ligne, d'intégrer ses produits par l'intermédiaire d'interfaces programmatiques standards (API), de manière à maintenir une expérience fluide et transparente tout en incluant la protection des achats effectués.

Wagonex, créateur d'une place de marché de « mobilité par abonnement » au Royaume-Uni, fait partie des premiers adeptes du concept. Il enrichit de la sorte son périmètre avec une solution de location longue durée « tout compris » qui ajoute désormais l'assurance au loyer de la voiture proprement dit et aux taxes, à l'entretien, à l'assistance… déjà inclus dans le forfait présenté. Non seulement cette fusion simplifie-t-elle la transaction pour les acquéreurs, ainsi que le règlement de leur mensualité (sur une seule facture), mais elle leur donne en outre une meilleure visibilité sur le coût total de leur véhicule.

Connect by Admiral

La particularité du modèle en services tel qu'il est implémenté par Admiral est qu'il est d'emblée prêt à être décliné sur l'ensemble de son catalogue, y compris dans des domaines où il est rarement envisagé à ce jour : automobile, habitation (propriétaire et locataire), animal de compagnie, voyage, spectacle, appareil et gadget, professionnel… Même s'il est vrai que ces polices ne sont pas immédiatement disponibles… entre autres parce qu'elle doivent être configurées selon le besoin spécifique du demandeur.

Pour la mise en œuvre, la compagnie a fait le choix d'une collaboration avec Root, une jeune pousse sud-africaine qui, après avoir débuté sur une idée de banque programmable, a opéré un pivot et commercialise aujourd'hui une plate-forme de conception et développement, de bout en bout, requérant un minimum de code informatique, de produits d'assurance exposés par API. C'est grâce à cette technologie qu'elle peut promettre de couvrir rapidement tous les usages de ses clients potentiels.

Naturellement, l'approche stratégique retenue d'isolation entre le nouveau paradigme, en services, et les fonctions « traditionnelles » (qui n'est pas sans rappeler ce que Westpac tente, difficilement, de réaliser dans la banque) soulève de nombreuses questions. Car, bien que les savoir-faire soient mis en commun, des redondances vont nécessairement émerger et handicaper l'efficacité globale. Une convergence, au profit de la solution la plus flexible, bien sûr, est-elle imaginable à moyen terme ? En tout état de cause, Connect by Admiral représente une avancée notable vers l'assurance de demain.