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C'est pas mon idée !

lundi 31 juillet 2023

AXA déploie son propre ChatGPT

AXA
Alors que de nombreuses institutions financières dans le monde – sinon toutes – se frottent avec extrême prudence à l'intelligence artificielle générative, AXA annonce d'ores et déjà son intention de déployer dans les prochains mois une déclinaison privée du désormais célèbre ChatGPT auprès de l'ensemble de ses 140 000 collaborateurs.

La nouvelle plate-forme, baptisée « AXA Secure GPT », s'appuie sur l'offre « Azure OpenAI » de Microsoft, le partenaire incontournable des grands groupes, qui capitalise rapidement sur son investissement dans l'ex-organisme de recherche à but non lucratif à l'origine du raz-de-marée médiatique autour de l'IA depuis l'automne dernier. Déployée dans une infrastructure infonuagique placée entièrement sous le contrôle de l'assureur, elle garantit de la sorte la sécurité et la confidentialité des données échangées, qui constitue le défi numéro un pour tout usage professionnel de la technologie.

Dans un premier temps et avant sa généralisation à l'ensemble des effectifs, l'outil est mis à la disposition d'un millier d'employés de la division informatique de l'entreprise, servant donc de cobayes. Comme le propose aussi son cousin destiné au grand public, ils pourront recourir à ses capacités afin de générer, traduire, corriger et résumer des textes mais également produire des images ou encore, plus particulièrement pour cette cohorte initiale d'utilisateurs, obtenir une assistance dans la rédaction de code logiciel.

AXA Secure GPT

AXA se vante d'avoir assemblé sa solution en trois mois… mais passe sous silence les efforts qui lui restent à accomplir – et le temps qui sera nécessaire – pour enseigner à ses salariés les bases d'un usage raisonné. En effet, les expérimentations menées jusqu'à maintenant ont démontré que l'exploitation de ces systèmes est loin d'être triviale, entre la subtilité dont il faut parfois faire preuve dans la formulation des sollicitations, qui donne naissance à un métier spécialisé (le « prompt engineer »), et l'indispensable discernement permettant de distinguer et écarter les hallucinations occasionnelles de l'IA.

D'un point de vue plus général, je suis en outre largement sceptique sur l'approche retenue (dans laquelle je perçois la patte de Microsoft) : mettre un outil entre les mains des collaborateurs et leur laisser le champ libre quant à ses applications possibles est rarement une recette de succès. Il semblerait au contraire impératif de définir les conditions et les modalités de mise en œuvre dans des fonctions ciblées, assorties de recommandations pratiques, afin d'accoutumer progressivement le personnel aux opportunités de l'intelligence artificielle et encourager son adoption « naturelle ».

dimanche 30 juillet 2023

Apple bientôt en solo dans la finance ?

Apple
Alors qu'elle a déjà mis fin à son aventure dans la banque de détail, incarnée par Marcus, des rumeurs insistantes prêtent (logiquement) à Goldman Sachs des velléités de sortir de son partenariat sur la carte de crédit d'Apple. Ce qui pourrait laisser à cette dernière les coudées franches pour son développement dans les services financiers.

Le revirement de la banque américaine ne constitue pas une réelle surprise. Depuis ses débuts, sa collaboration faisait face à des vents contraires, entre, principalement, une irruption dans un métier qu'elle ne connaissait pas auparavant et les conditions très exigeantes imposées par la marque à la pomme. La combinaison de ces deux facteurs a vraisemblablement engendré des pertes considérables, auxquelles, dans le contexte actuel de resserrements budgétaires généralisés, il devient urgent de mettre un terme.

La grande question qui se pose à ce stade est de savoir comment Apple, qui semble toujours déterminée à poursuivre sa pénétration du marché des cartes de crédit, entre autres, peut réagir à cet arrêt. En tête des pistes évoquées figurent celle d'American Express, apparemment sollicitée par Goldman Sachs pour la reprise de son activité, et celle de JPMorgan Chase. Néanmoins, ces prétendants seraient réticents aux modalités d'un accord avec Apple, notamment l'absence de leur marque sur le produit.

L'hypothèse qui prévaut donc désormais, stimulée par la démarche entièrement autonome mise en branle pour le lancement en 2022 de sa solution de paiement fractionné, verrait la firme californienne prendre en charge les opérations de bout en bout, en s'appuyant (via une acquisition ?) sur un petit établissement pour les aspects réglementaires. Il est clair que, du point de vue d'une entreprise obsédée par l'expérience utilisateur, cette option fournit le meilleur moyen de contrôler la (quasi) totalité des parcours et processus.

La chronologie de la stratégie d'Apple paraît particulièrement propice à une telle évolution. Les quatre années d'expérience acquises avec Goldman Sachs représenteraient un excellent apprentissage, via une sorte de « MVP » (produit minimum viable), marqué par quelques accrocs et les ajustements correspondants. La rupture du contrat étant, selon les spécialistes, encore lointaine (jusqu'à 18 mois), la construction d'une offre de substitution pourrait être menée dans une relative sérénité.

Libérée des contraintes d'une institution financière traditionnelle (même novice sur ce terrain spécifique), la prochaine itération de l'Apple Card pourrait renforcer son avantage concurrentiel et ainsi accroître la pression sur une industrie léthargique, dont les seules idées d'innovation tournent en général autour de leurs programmes de récompense.

Apple Card

samedi 29 juillet 2023

Giraffe, variations sur l'investissement responsable

Giraffe
Au premier abord, Giraffe, qui vient de lever une ronde d'amorçage de 10,5 millions de dollars, semblerait n'être qu'une entrée supplémentaire dans la liste de plus en plus longue des plates-formes « digitales » d'investissement responsable. Elle introduit toutefois plusieurs idées originales dans le concept, qui méritent certainement notre attention.

Le point de départ de sa démarche est sans surprise, absolument identique à celui de ses paires. Les citoyens désireux de se constituer une épargne, en particulier parmi les jeunes générations, expriment aujourd'hui deux exigences majeures vis-à-vis de leurs fournisseurs : d'une part, une simplicité absolue dans la gestion de leurs opérations et de leur portefeuille et, d'autre part, une prise en compte de leurs valeurs personnelles, lesquelles sont fréquemment alignées sur des enjeux de développement durable.

À partir de ce cahier des charges élémentaire, Giraffe élabore une solution radicale. Son seul produit – du moins à ce jour – consiste en un fonds de base indexé sur l'indice phare S&P 500, que chacun de ses clients a la possibilité d'adapter à sa philosophie en en retirant les entreprises qui ne respectent pas ses convictions, par exemple en matière d'hygiène alimentaire (donc sans les géants du fast-food, des boissons sucrées…), de climat (écartant les compagnies polluantes), d'égalité des sexes, de vente d'armes…

Des options complémentaires sont peut-être proposées aux utilisateurs avertis (le site n'est pas clair sur ce point) mais la facilité de sélection d'un panier d'actions engagé et le recours à un support classique, reposant sur une référence reconnue, sont bien les principes directeurs de l'offre. Par ailleurs, la transparence n'est pas oubliée : le suivi de performances de la combinaison personnalisée permet une comparaison avec l'indice brut dont elle est issue, mesurant de la sorte l'incidence des préférences intégrées.

Accueil Giraffe

Son positionnement est la deuxième spécificité importante de Giraffe. Outre son ciblage direct des consommateurs, la jeune pousse distribue son service auprès des employeurs qui souhaitent à la fois renforcer leurs propres actions de responsabilité sociale et environnementale et répondre aux attentes croissantes de leurs salariés dans ce domaine, que ce soit afin de stimuler leur fidélité, de leur procurer une occasion d'être fiers de leur appartenance ou de propager une culture d'entreprise éthique.

Présenté comme un programme d'avantages exclusif, le dispositif incite l'entreprise à distribuer des coupons d'investissement à ses collaborateurs en guise de primes. Les bénéficiaires les utilisent ensuite sur la plate-forme pour acquérir des parts de fonds, en appliquant leurs critères individuels. Ces allocations donnent lieu à une synthèse des impacts positifs générés par leurs choix (ou plutôt d'impacts négatifs évités, en pratique), que la structure peut (quoique un peu artificiellement) inclure dans son bilan RSE.

Inédite, à ma connaissance, dans le registre de l'investissement, l'approche de Giraffe à l'intention des employés constitue aussi une tendance en vogue, probablement parce qu'elle offre aux startups une voie de commercialisation relativement facile à emprunter dans un contexte où la compétition globale pour les talents atteint des sommets. Avec son angle d'attaque par les enjeux sociétaux, pour toutes les parties prenantes, elle possède cependant un argument susceptible de la distinguer de la concurrence.

vendredi 28 juillet 2023

Le handicap reste mal pris en compte

Non voyant
Depuis quelques années, l'industrie financière développe des initiatives afin de permettre aux millions de personnes souffrant de handicaps de mener une vie aussi normale que possible. Une scène (banale) à laquelle j'ai assisté ce matin m'a toutefois démontré qu'il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir parler d'égalité.

Sur le cas spécifique du déficit visuel dans les paiements qui m'intéresse aujourd'hui, ces dernières années ont vu émerger des adaptations variées, des plus simples, telles que l'encoche permettant de repérer le sens de la carte par le toucher ou l'inscription des informations en braille pour son usage sur les plates-formes d'e-commerce, jusqu'aux plus élaborées, dont une interface parlante via le smartphone. Premier constat générique, ces avancées ne sont que rarement déployées par les institutions financières.

Et, surtout, je viens de réaliser qu'elles sont loin de résoudre toutes les difficultés des individus affectés. Prenez ce monsieur, devant moi à la caisse d'une grande enseigne, mal voyant (et muet, incidemment), peut-être à un niveau normal pour son âge, notez bien. Il insère sa carte dans le lecteur et tente de saisir son code PIN… mais les touches sont illisibles pour lui et il se trompe… une fois, deux fois. Il renonce et demande à la caissière de le composer pour lui, en lui montrant où il est noté dans son portefeuille.

Double hérésie, bien sûr : la banque insiste suffisamment sur les précautions élémentaires à prendre avec ses instruments de paiement. Ne jamais transmettre son code secret à un tiers et ne jamais l'inscrire quelque part, surtout sur un support conservé à proximité de la carte elle-même (ce que les autres clients alentour ont observé). Mais quelle alternative a ce quidam et tous ceux qui se trouvent dans une situation similaire ? Devraient-il renoncer à leur autonomie lorsqu'ils veulent faire leurs courses ?

Le plus terrible dans cette histoire est que je suis persuadé que, en cas d'incident (un vol ou un piratage de la carte), la banque ne manquera pas de reporter la responsabilité sur le porteur, sans limitation, puisqu'il viole les règles d'utilisation en vigueur ! J'espère que si une telle mésaventure lui arrive (ou à toute autre victime dans les mêmes conditions), il ripostera, par voie judiciaire ou autre, en arguant de l'absence de mesures prises pour lui permettre de jouir du service de paiement comme tout citoyen valide.

En l'occurrence, le recours à un paiement via le téléphone – Google Pay ou Apple Pay – serait une solution facile à mettre en œuvre. Malheureusement, selon toute probabilité, personne dans sa banque n'a réellement conscience de ce que vit ce client au quotidien et n'a, en conséquence, saisi l'opportunité de lui suggérer cette option. Alors que la législation pour l'égalité des droits devient de plus en plus exigeante depuis plusieurs décennies, les services financiers sont toujours honteusement à la traîne.

Expérience de non voyant

jeudi 27 juillet 2023

Starling, la création d'une néo-banque

Starling Bank
Ayant quitté ses fonctions de directrice générale à la fin du mois dernier, Anne Boden revient dans un entretien avec McKinsey sur l'aventure de la création de Starling Bank, qu'elle a menée au succès – et à la profitabilité – en moins de 10 ans. La vision qu'elle portait à ses débuts reste d'actualité et pourrait utilement inspirer l'ensemble de l'industrie.

Tout au long de l'échange, Anne rappelle avec insistance que, avant de se lancer, elle avait derrière elle une longue carrière dans l'informatique bancaire et il apparaît rapidement que cette expérience est une des clés de sa réussite. Sa connaissance de l'état des technologies dans les établissements traditionnels, et chez leurs fournisseurs habituels, a motivé son choix radical de construire une plate-forme de A à Z, afin de maîtriser son avenir. Aujourd'hui, elle est devenue une offre à part entière.

De manière plus fondamentale, sa démarche a toujours été ancrée sur la conviction profonde de l'impératif d'adapter les métiers de la finance à l'ère « digitale ». Interrogée sur leurs stratégies en la matière, les grandes institutions financières répondaient en 2008 (et quelques-unes n'ont pas encore changé d'attitude) que la priorité était à la modernisation des agences et au déploiement d'une application mobile. Or c'est d'une révolution que ces entreprises avaient ont besoin, à partir d'un nouveau socle technique.

Autre constat qui résonnera dans nombre de DSI en 2023, pour peu que leurs dirigeants fassent preuve d'un minimum d'honnêteté : ils n'ont plus aucune confiance dans la capacité de leur organisation à exécuter des projets importants et à porter le changement. La conséquence est une sclérose mortifère, qui retarde et, in fine, exclut toute hypothèse de transformation d'ampleur, pourtant indispensable quand l'environnement et les clients de la banque subissent des mutations permanentes à un rythme qui s'accélère.

McKinsey – Interview d'Anne Boden (Starling)

Enfermées dans leur conservatisme rassurant, ces structures ne perçoivent pas, en particulier, combien ce qui semblait définitivement impossible autrefois est maintenant devenu, grâce aux technologies contemporaines, non seulement possible mais souvent élémentaire. Par exemple, le responsable des risques convaincu que la production d'un rapport requiert un mois de travail et incapable d'envisager d'autres méthodes n'a pas conscience que désormais, avec des outils convenables, une journée suffit.

Anne explique avoir vécu elle-même ce choc, parce qu'elle était encombrée des préjugés accumulés par son parcours dans les groupes historiques et n'imaginait pas comment faire différemment de ce qu'elle avait appris jusque-là. Dans une certaine mesure, le fonctionnement complet de la banque doit – et peut – être réinventé. Pas étonnant, dans ces conditions, que peu de gens aient cru, en 2014, à son rêve d'en créer une, en partant de rien. Et sur ce plan aussi, les mentalités n'ont guère progressé.

Les résultats sont là : Starling a conquis 2,4% des comptes individuels et 10% des PME du Royaume-Uni (dans un contexte où les leaders n'ont pour certains que 10% de parts de marché). Et la recette est limpide. Elle est d'ailleurs partagée, à mon sens, par BBVA, qui, sous l'impulsion de Francisco González (également issu des rangs de l'informatique), a été une des rares institutions traditionnelles à remettre en question sa culture et à capitaliser vraiment sur les avancées technologiques au service de ses clients.

En 2023, l'histoire paraît ancienne mais elle n'est malheureusement toujours pas intégrée par la plupart des institutions financières. Et cette faillite laisse la porte ouverte à la génération de trublions à laquelle appartient Starling, qui ne sont pas à l'affut des populations négligées par les acteurs en place mais qui visent sérieusement à conquérir leurs clients existants, avec une proposition de valeur naturellement séduisante.

mercredi 26 juillet 2023

EarlyBird, pour préparer l'avenir des enfants

EarlyBird
Depuis ses débuts il y a trois ans, EarlyBird propose aux parents et à leur entourage de contribuer sous forme pécuniaire à l'avenir de leurs enfants grâce à sa plate-forme d'épargne dédiée. Avec sa nouvelle version, déployée tout récemment, celle-ci s'ouvre désormais à des fonctions extra-financières qui complètent parfaitement sa mission.

Le principe de base est simple et il n'est pas très original, y compris dans sa déclinaison « digitale ». Les parents sont invités à ouvrir un compte d'investissement pour leur progéniture, généralement en vue d'un projet donné (achat d'un premier logement ou d'une première voiture, grand voyage, financement de l'éducation…). Ils l'alimentent à leur convenance et selon leurs moyens et ils sont encouragés à demander à leurs proches d'y verser leur écot, en guise de cadeau (ou en plus), pour les occasions festives.

Au siècle dernier, bien avant l'ère numérique, les livrets de Caisse d'Épargne, entre autres, étaient mis en avant dans un rôle similaire (j'y reviendrai) et le besoin sous-jacent existera probablement toujours. Les adultes qui connaissent parfois des difficultés à gérer leur budget et à mettre de l'argent de côté pour réaliser leurs propres rêves sont souvent beaucoup plus disposés à prendre des précautions, quitte à consentir des sacrifices importants, afin de garantir le meilleur départ dans la vie à leurs bambins.

En revanche, il est un domaine qui a fortement évolué de nos jours : les modes de communication. Et les impacts des outils électroniques, des réseaux sociaux, de l'image omniprésente… se font évidemment sentir dans les relations dans et avec la famille, et en particulier autour des enfants. C'est pourquoi le prolongement de l'approche jusqu'ici centrée sur l'argent d'EarlyBird vers l'animation d'une sorte d'espace communautaire, qui se développera initialement à l'occasion des paiements, prend tout son sens.

EarlyBird – Invest in the children you love

Comme l'avait imaginée la Caisse d'Épargne en 2015 avec son « Livret À Connecter » (dont il semble hélas ne plus rester de traces aujourd'hui), l'idée consiste à accompagner chaque compte ouvert d'un environnement, centralisé et sécurisé (par opposition aux plates-formes sociales couramment utilisées dans ce but), où tous les participants pourront enregistrer messages, photos, vidéos… à partager avec le groupe et, surtout, avec le bénéficiaire, laissant à ce dernier une capsule de souvenirs pour le jour de sa majorité, quand il pourra retirer la cagnotte accumulée à son intention.

Des dizaines d'institutions financières ont essayé, au fil des années, de lancer des sites collaboratifs et autres réseaux sociaux destinés à fédérer leur clientèle sur des thématiques qui leur sont chères. Aucune de ces tentatives n'a jamais produit de résultat probant. La priorité (« beyond banking ») est maintenant à la recherche d'opportunités de prendre pied dans des métiers non bancaires et leurs chances de succès paraissent aussi minces. À la croisée de ces deux tendances, et sans préjuger de son destin, EarlyBird donne au moins l'exemple d'une stratégie centrée sur les attentes de ses clients.

mardi 25 juillet 2023

Un scénario catastrophe pour l'IA

SEC
Tout le monde a désormais entendu parler de l'alerte lancée par quelques gourous des technologies à propos du risque d'extinction de l'humanité causée par l'intelligence artificielle. Moins retentissante, il faut également évoquer celle du président de la SEC (qui affirme parler en son nom propre) craignant une catastrophe pour les marchés.

Le scénario présenté par Gary Gensler lors d'une conférence combine deux hypothèses successives. Dans un premier temps, les technologies d'IA générative seraient progressivement monopolisées par un petit groupe d'entreprises – voire une seule – disposant des immenses moyens nécessaires à la mise au point de modèles performants et dont la puissance croîtrait automatiquement grâce à l'accès à des sources de données toujours plus vastes… fournies par ses utilisateurs ne disposant d'aucune alternative.

Une fois cette domination assise, dans une seconde phase, les investisseurs et autres spéculateurs de tout poil, perpétuellement désireux d'exploiter les meilleurs outils du moment afin de maximiser leurs profits, se retrouveraient donc tous à interroger les mêmes plates-formes… et à obtenir les même réponses… engendrant les mêmes réactions. Le danger serait alors un effet de boule de neige incontrôlable et potentiellement dévastateur, déclenché par une inspiration unique et uniforme.

Le récit est propre à faire peur, gage de succès immédiat auprès d'un auditoire généraliste. Malheureusement pour les amateurs de grands frissons, il est largement farfelu, comme nous l'enseigne l'histoire. La théorie de la concentration, d'abord, même si elle recouvre une certaine réalité à court terme, ignore totalement les cycles constants d'évolution de l'informatique. Imaginer que l'IA d'aujourd'hui marque une fin est absurde. D'autres approches émergeront et bouleverseront sans cesse les rapports de force.

Quant à l'argument des acteurs moutonniers, il paraît ridicule non parce qu'il ne peut naître mais au contraire parce qu'il existe depuis longtemps et que l'ajout d'un instrument supplémentaire susceptible de l'entretenir n'a guère de raisons de le rendre plus sensible qu'autrefois. Oui, des crises peuvent surgir quand tout le monde succombe aux mêmes illusions… mais ce sont les mêmes depuis des siècles. Et tant que tout n'est pas automatisé, des intervenants créatifs continueront à se distinguer et à éviter le pire.

De nombreuses légendes circulent sur les capacités prétendument magiques de l'intelligence artificielle et il faut impérativement les éradiquer afin d'empêcher des déconvenues coûteuses à l'issue d'expérimentations sans perspective. Cependant, il faut tout autant se garder de prédictions alarmistes reposant sur des prémisses bancales ou biaisées. Hélas, la popularité fulgurante que rencontrent à notre époque des nouvelles technologies prometteuses et mystérieuses, véritablement maîtrisées par une infime minorité de spécialistes, est propice aux mythologies et à leur propagation.

SEC Chair Gary Gensler

lundi 24 juillet 2023

Le bac à sable britannique devient permanent

FCA
Pionnier du concept de bac à sable depuis 2016, le régulateur de la finance britannique n'a jamais cessé d'adapter son dispositif au fil du temps, de manière à le rendre plus accessible et plus performant. Dernière évolution en date, son incarnation « digitale » devient permanente après trois ans d'existence expérimentale par vacations.

En effet, depuis ses premiers pas dans le domaine, la FCA privilégiait une approche plus propice à son rôle de surveillance et probablement plus facile à animer, consistant à organiser, sur des périodes prédéterminées, des cohortes d'une vingtaine – en moyenne – de participants, sélectionnés via un processus d'appel à candidatures, fréquemment thématique (par exemple avec sa session dédiée aux problématiques liées à la crise sanitaire, en 2020). Cette contrainte disparaît donc à partir du mois prochain.

Les entreprises, de toutes tailles, désireuses de tester une idée originale dans un environnement opérationnel protégé peuvent désormais déposer un dossier à tout moment, sans attendre l'ouverture d'un créneau ad hoc, avec la garantie d'une réponse sous 4 semaines, basée sur des critères d'innovation, de bénéfice pour le consommateur, de préparation… Aucune limitation (ou presque) n'est opposée sur les thématiques abordées : banque du quotidien, investissement, prêt, paiement, assurance, retraite…

Le contenu de la plate-forme proposée aux heureuses élues ne change pas fondamentalement. Il comprend notamment plus de 200 jeux de données – historiques de transactions, informations de crédit, statistiques de marché… – synthétiques ou issus de sources publiques, un millier d'API, un socle de développement intégré, un espace collaboratif… Notons que les fournisseurs sont aussi invités à partager leurs ressources, dont ils ont la possibilité de suivre les usages via un plateau d'observation.

Bac à Sable FCA

La FCA justifie cette transition par le succès enregistré jusqu'à maintenant avec son bac à sable, même avec les restrictions qui s'y appliquent. Plus de la moitié des petites et moyennes structures enrôlées dans les divers « TechSprints » et pilotes programmés au fil des ans ont ainsi obtenu un retour positif, matérialisé par le lancement d'un produit (le résultat le plus espéré, naturellement), la conclusion d'un partenariat, la sécurisation d'un financement ou l'attribution d'une distinction ou autre récompense.

Sept ans plus tard, l'initiative britannique continue à démontrer toute sa valeur, y compris après le Brexit, que certains voyaient comme une excellente opportunité de prendre à Londres sa position de première place d'innovation financière… Malheureusement, ceux-là n'ont pas compris ce qui faisait l'attrait du Royaume-Uni. La création d'un bac à sable, qui contribue à simultanément faciliter et sécuriser (à tous points de vue) les expérimentations en fait partie…, mais les réticents ne sont toujours pas convaincus.

dimanche 23 juillet 2023

3 banques espagnoles se liguent contre la fraude

BBVA
En quelques mois, les réticences historiques du secteur financier à coopérer dans la lutte contre la fraude semblent s'évaporer, probablement, hélas, en raison des difficultés à enrayer une croissance apparemment inexorable des incidents. Après celles, entre autres, de l'industrie australienne, de Plaid, de Mastercard…, trois des principales banques espagnoles lancent maintenant une initiative conjointe.

Celle-ci prend la forme d'une co-entreprise autonome, baptisée FrauDfense, placée sous une gouvernance répartie entre ses fondatrices, BBVA, CaixaBank et Santander. Sa mission consistera, sans grande surprise, à concevoir et mettre en œuvre les moyens pour ses contributrices de partager avec leurs consœurs, dans le respect scrupuleux de la confidentialité et de la sécurité, les informations utiles à la répression de la fraude, à travers toutes ses dimensions – identité, paiements, services en ligne…

À la différence des approches habituelles de mise en commun de données brutes destinées à, par exemple, entraîner des modèles d'apprentissage automatique pour la détection des malversations, les premiers outils qu'il est prévu de déployer viseront à permettre aux banques de mettre en commun leur connaissance des pratiques frauduleuses qu'elles ont repérées et les mesures de protection qu'elles ont élaborées afin de les repousser. C'est donc leur expertise interne qu'il est ici question de mutualiser.

Au-delà de sa configuration actuelle, la participation à FrauDfense se veut résolument ouverte, à terme (?), non seulement aux autres institutions financières intéressées mais également aux organisations de tous domaines désireuses d'échanger leurs compétences et leurs expériences en matière de fraude. Et, parce qu'il faut bien rassurer les fâcheux qui craignent les accusations de collusion – et justifient de la sorte leur immobilisme –, le projet a été présenté par anticipation aux régulateurs concernés.

FrauDfense

Progressivement, face à un phénomène qui paraît impossible à freiner et qui coûte de plus en plus cher, à la fois aux victimes et aux banques, ces dernières prennent conscience qu'il n'est plus raisonnable de jouer chacune dans sa cour, en croyant que leurs capacités de défense constituent un facteur de compétitivité. Elles admettent enfin que la seule solution réaliste pour optimiser la résistance au déferlement d'attaques, dont le traitement peut rapidement devenir onéreux, est l'union de leurs forces.

Enfin, alors que les démarches similaires sont généralement orchestrées par pays, y compris quand elles émanent d'entités globales (quitte à être répliquées), les trois établissements espagnols insinuent que FrauDfense pourrait adopter une perspective internationale. Il est vrai que son modèle focalisé sur le partage d'expertise, plus facile à transposer que des données à analyser, se prête particulièrement à une telle extension. Il s'agit aussi d'un facteur important en vue de maximiser la valeur des collaborations.

samedi 22 juillet 2023

La banque investit la rénovation énergétique

Halifax
Comme l'automobile, l'immobilier fait partie des premiers domaines extra-financiers dans lesquels de nombreux établissements tentent de prendre pied avec leurs stratégies « beyond banking ». Après l'acquisition de bien, les travaux de rénovation énergétique semblent commencer à trouver une place privilégiée dans leurs panoplies.

Ainsi, pour ne prendre que deux exemples récents, le Crédit Agricole, en France, présentait il y a quelques semaines sa plate-forme « j'écorénove mon logement » tandis que, ces jours-ci, Halifax entame une expérimentation autour de l'installation de panneaux solaires. Dans les deux cas, comme pour les autres du même genre, l'objectif est de rendre le sujet plus accessible pour les consommateurs, de manière à les encourager à améliorer leur empreinte environnementale sur un poste particulièrement critique.

Pour la banque verte, le point d'entrée est un simulateur – étonnamment pertinent, d'après mes tests – permettant, à partir de quelques questions simples sur le logement et sur la situation personnelle de ses résidents, de suggérer des scénarios de travaux à effectuer, assortis d'estimations des coûts, des aides disponibles et des bénéfices possibles (budgétaires et écologiques). Grâce à cet outil abordable, les visiteurs peuvent mieux appréhender, de manière pragmatique, les opportunités qui s'offrent à eux.

Si le Crédit Agricole se contente de conclure son parcours avec un annuaire d'entreprises labellisées, la filiale dédiée au crédit hypothécaire de Lloyds choisit pour sa part de centrer son approche sur l'exécution des chantiers photovoltaïques, à travers une collaboration avec le spécialiste « Effective Home ». Son raisonnement suit toutefois une logique similaire : il s'agit de lutter contre la méconnaissance, voire la mythologie, dont est victime l'énergie solaire en proposant une étude préalable gratuite, à distance.

Effective Home x Halifax

Inévitablement, les deux institutions mettent en avant leurs solutions de financement en appoint de leur démarche. Il serait pourtant hasardeux d'y voir une justification – et encore moins une légitimation – de leur positionnement sur un terrain étranger à leurs métiers originels. Quand la britannique mentionne son commissionnement (à hauteur de 6%) sur les références transmises à son partenaire, il faut également en conclure que la vente additionnelle de crédits n'assure pas un modèle économique viable (et que l'engagement contre le réchauffement climatique n'est pas un argument suffisant).

Pour terminer sur ma question favorite du succès des aventures des banques loin de leurs bases (ou « pourquoi un individu lambda achèterait ce produit via sa banque ? »), je ne peux que reconnaître que la rénovation énergétique de l'habitation possède un potentiel intéressant, au moins à court et moyen terme. Entre les incertitudes qui entourent le domaine, l'absence d'interlocuteur de confiance « naturel » sur l'ensemble du périmètre (technologies, travaux, subventions…) et l'enjeu financier important de tout projet, l'accompagnement d'un acteur a priori sérieux peut emporter la décision.

jeudi 20 juillet 2023

Nous met l'IA au service du consommateur

Nous
Comme tant d'autres entreprises, petites ou grandes, disruptives ou traditionnelles, la britannique Nous adopte l'intelligence artificielle générative (en l'occurrence, celle d'OpenAI)… afin de mieux accompagner ses utilisateurs. Voilà une excellente occasion de se pencher sur les cibles privilégiées de cette technologie en vogue.

Que ce soit pour l'assistance aux clients – directement par tchat ou en support des opérateurs humains –, pour la personnalisation des campagnes marketing, voire pour la lutte contre la fraude ou la cybersécurité, l'immense majorité des usages de l'IA dans le secteur financier est principalement centrée sur la performance de l'organisation, dans une perspective de réduction des coûts ou de développement des ventes. Bien loin des discours et des promesses de « centricité client », qui devraient être prioritaires.

Pour Nous, qui aide les consommateurs à optimiser leurs abonnements, c'est une évidence et sa mise en œuvre de GPT, en complément de ses propres algorithmes, s'inscrit donc directement dans sa mission. Il suffit ainsi de transmettre ses factures à l'assistant virtuel ou, plus simplement, d'ouvrir un accès à sa boîte aux lettres électronique (d'où elles seront extraites automatiquement) pour obtenir des explications claires sur leur contenu, des alertes en cas d'abus et des suggestions pour réaliser des économies.

Dans un registre différent, le logiciel est également capable d'extraire toutes les données utiles d'un contrat (d'assurance, dans l'exemple cité par l'article de TechCrunch), de manière à remplir en totale autonomie 90% des informations demandées dans les formulaires de souscription, quand sa proposition de changement de fournisseur a été validée. Tout concourt à améliorer l'expérience de l'utilisateur – pour plus de simplicité, de transparence, de rapidité – et, au bout du compte, son bien-être financier.

Accueil Nous

Le domaine restreint dans lequel Nous décline son approche n'est pas le seul qui pourrait profiter des avantages de l'intelligence artificielle. En réalité, toutes les dimensions du conseil personnalisé, tellement déficient aujourd'hui dans les banques historiques, pourraient être renforcées et donner de la sorte un nouveau souffle à un modèle en pleine dérive : pilotage du budget quotidien, maîtrise de l'endettement, préparation de projets à court ou long terme, épargne et investissement, protection et assurance…

Se contenter d'expérimenter, et parfois déployer, des solutions tournées vers l'interne ne constitue pas seulement un manque de vision et d'ambition, c'est aussi prendre le risque de perdre un peu plus le contact avec les clients. En effet, ces derniers participent à l'engouement pour ChatGPT et ses cousins et ils ne tarderont pas à découvrir comment les exploiter pour recueillir les recommandations pratiques en matière de gestion de finances personnelles… que leur banque ne leur livre plus depuis longtemps.

mercredi 19 juillet 2023

Klarna s'engage contre le surendettement

Klarna
Prise en étau entre des exigences réglementaires qui se précisent et des statistiques peu reluisantes sur les effets délétères du paiement différé sur la santé financière des consommateurs, Klarna s'efforce depuis plusieurs mois de se donner une image de responsabilité. Nouvel épisode aujourd'hui avec une offre d'assistance au désendettement.

Au Royaume-Uni, le « devoir au consommateur » (« consumer duty »), qui impose à l'ensemble du secteur financier de toujours placer l'intérêt du client en tête des priorités, entre en vigueur à la fin de ce mois de juillet et requiert de sérieux ajustements sur les modes de fonctionnement de nombreux acteurs, institutionnels et trublions, jusqu'à présent focalisés surtout sur leurs performances. Et bien que le géant suédois ne soit pas le plus critiquable, il subit les effets de la mauvaise image de son métier.

Après sa déclinaison d'une option de sevrage pour les accros au BNPL et les restrictions imposées à tous ses utilisateurs ayant connu un retard de paiement (n'est-ce pas une évidence ?), la nouvelle initiative de Klarna destinée à réduire les risques de dérives budgétaires qu'occasionnent ses solutions consiste à mettre en avant au cœur de ces dernières le service d'accompagnement à la maîtrise de l'endettement du Money Adviser Network, mis en place et animé par l'organisme gouvernemental MoneyHelper.

Les personnes traversant une mauvaise passe ou, plus simplement, inquiètes de leur situation et en quête de réassurance peuvent contacter la plate-forme (qui, bien sûr, existe aussi sous forme autonome), en ligne ou par téléphone, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et être orientées directement vers une association partenaire agréée où, très rapidement, elles vont pouvoir échanger, gratuitement, avec un conseiller indépendant, de confiance, capable de répondre à leurs questions et les aider à résoudre leurs difficultés.

Comme toujours, la démarche semble pleine de bon sens et empreinte d'une conscience éthique louable… mais elle laisse tout de même une impression d'opération de communication à bon compte (même si le partenariat avec le réseau de MoneyHelper est probablement assorti d'une contribution pécuniaire), dont l'impact réel sur le bien-être financier des consommateurs sera limité, surtout qu'elle s'adresse en priorité à ceux qui sont déjà sur le chemin de la précarité, ce qui en fait de mauvais clients potentiels.

Je ne jetterai cependant pas (immédiatement) la pierre à Klarna, puisqu'elle évoque également ses expérimentations avec de nouvelles méthodes d'évaluation de la capacité d'emprunt des demandeurs de financement, à base d'interfaces de « banque ouverte ». Ses algorithmes prendront alors peut-être mieux en compte les facteurs actuellement oubliés ou négligés dans les décisions. Par ailleurs, elle se vante de taux de défaut inférieur de 30 à 40% à ceux des cartes de crédit, ce qui tend à valider sa sincérité.

Klarna

mardi 18 juillet 2023

L'IA évalue les dommages aux habitations

WeatherMind
Après quelques années de développement, les solutions d'analyse automatique d'image pour l'évaluation des dommages aux véhicules se multiplient et sont en voie de généralisation dans les compagnies d'assurance. L'avenir s'ouvre désormais, avec des acteurs tels que Tractable ou WeatherMind, à sa déclinaison sur l'habitation.

Les deux jeunes pousses ne sont pas du tout au même stade de maturité – la britannique distribue son produit depuis plus de deux ans, tandis que la française est encore en phase émergente – mais leurs approches sont similaires. Il s'agit d'utiliser la puissance de l'intelligence artificielle, appliquée à des photographies d'un bien immobilier (prises par l'assuré guidé par le logiciel), dans le but d'estimer, à distance et sans autre intervention humaine, l'étendue des dégâts qu'il a subis : fissures, toit détérioré, fenêtres cassées…

Si la technologie est fondamentalement identique à celle mise en œuvre sur les voitures, avec toutefois un entraînement spécifique des algorithmes, qui doit s'adapter à des configurations de propriétés toutes différentes, ce nouvel usage répond tout de même à une problématique particulière. En effet, une majorité des sinistres survenant sur les premières comportent un volet matériel, faisant de l'expertise une composante presque systématique de leur traitement. Au contraire, l'enjeu sur l'habitation est ponctuel, ressortant des impacts des catastrophes naturelles, comme le confirme, incidemment, la forte croissance de Tractable au Japon… avec son risque sismique.

Accueil WeatherMind

La dynamique de ce marché et les motivations potentielles des assureurs sont donc probablement uniques. Les demandes d'indemnisation ont tendance à arriver par vagues simultanées (par opposition à un flux quasiment constant d'accidents de la route) et la capacité à gérer automatiquement une partie des dossiers constitue alors un facteur de réactivité, essentiel pour les clients, qui s'ajoute aux arguments classiques d'efficacité opérationnelle, entre réduction des coûts et optimisation des résolutions proposées.

Au-delà de la seule appréciation des dommages pour le compte de l'assurance, Tractable esquisse une autre dimension dans l'exploitation de ses services. Une fois déterminés les options de réparation ou de remplacement, les matériaux et la main d'œuvre nécessaires aux travaux à réaliser…, l'intelligence artificielle, alimentée avec les sources ad hoc, pourrait également offrir aux professionnels des recommandations pratiques sur la meilleure manière d'aborder le chantier, dans l'optique de, par exemple, réduire les délais, améliorer la sécurité, limiter les désagréments pour les résidents…

La complexité des modèles d'analyse requis pour remplacer un expert en chair et en os, au moins dans des cas relativement simples, aurait certainement écarté toute hypothèse de viabilité jusqu'à récemment. Aujourd'hui, les conséquences sur les bâtiments du dérèglement climatique – des épisodes de sécheresse sévère aux inondations à répétition, en passant par les tornades et autres orages brutaux – les rendront bientôt indispensables… si les risques correspondants continuent à être pris en charge.

lundi 17 juillet 2023

HSBC partage son expertise d'accessibilité

HSBC
Malgré des efforts incessants de sensibilisation et quelques contraintes réglementaires, les outils web et mobiles s'avèrent encore souvent difficiles à utiliser par les millions de personnes affectées de petits ou grands handicaps. Le secteur bancaire étant particulièrement concerné, HSBC a acquis une expertise en la matière… qu'elle veut partager.

Entre pression sociale croissante, depuis au moins deux décennies, et montée en puissance des services en ligne, jusqu'à devenir essentiels pour la vie quotidienne, on pourrait aisément croire que l'accessibilité est dorénavant entrée dans les mœurs. Malheureusement, il n'en est rien et, en France, pour ne prendre que cet exemple, même certains sites critiques de la fonction publique, pourtant soumis à des obligations légales strictes, continuent à faire l'objet de signalements et, parfois, de sanctions.

Ces défaillances sont d'autant plus inexcusables que les règles et recommandations permettant de lutter contre l'exclusion des utilisateurs concernés – qui, dans des contextes commerciaux, sont autant de clients à satisfaire – sont pour la plupart extrêmement faciles à appréhender, surtout avec les outils modernes, qui en automatisent ou, a minima, en simplifient la mise en œuvre. En réalité, le cœur du problème réside plutôt dans la formation des concepteurs et des développeurs.

HSBC Accessibility

Selon cette perspective, l'initiative de HSBC est donc bienvenue, en dépit de son apparente incongruité. Son principe est trivial, puisqu'il s'agit d'inviter des participants extérieurs à l'organisation à des cours mis au point originellement pour les collaborateurs. Un millier de places, en présentiel ou par visioconférence, seront ainsi ouvertes au cours de l'année à venir pour des sessions couvrant tous les métiers impliqués dans la création de sites, applications et autre contenus « digitaux ».

L'inscription étant entièrement gratuite, la démarche se veut désintéressée. Le raisonnement sous-jacent de la banque consiste à considérer que l'accessibilité n'est pas un facteur concurrentiel et que la priorité, à laquelle elle contribue, est de favoriser l'inclusion numérique de toutes les populations. Naturellement, elle s'offre de la sorte une communication positive à peu de frais (que lui coûtent quelques élèves supplémentaires assistant à ses formations ?), mais l'enjeu global, réel, le mérite bien.

samedi 15 juillet 2023

Après les autos, U.S. Bank vend des bateaux

U.S. Bank
Dans le monde entier, les banques, désireuses à la fois de diversifier leurs activités et de garder la main sur les parcours de leurs clients, sont de plus en plus nombreuses à s'infiltrer dans le marché de l'automobile. Afin de renforcer sa différence, U.S. Bank décline maintenant le modèle sur les véhicules récréatifs et… les bateaux.

Sans prendre la peine d'évoquer les résultats observés sur son initiative précédente, ce qui m'incite à penser qu'elle n'a pas déclenché un engouement massif, l'établissement américain reprend exactement la même recette, assise sur les mêmes raisonnements, pour le lancement, un peu tardif pour cette saison estivale, d'une nouvelle place de marché, où ses partenaires concessionnaires (et équipementiers) sont invités à exposer et commercialiser leurs caravanes, camping-cars et bateaux de plaisance.

Développée en collaboration avec Rollick, entreprise de technologie spécialiste du secteur, la solution s'appuie donc sur la double conviction que les consommateurs, de plus en plus accoutumés à effectuer leurs recherches et leurs achats en ligne, sont désormais prêts à y recourir pour toutes les catégories de produits, y compris les plus importants, et que la banque jouit d'un capital de confiance qui lui procure une légitimité incomparable pour devenir un intermédiaire de référence dans ces transactions.

Le discours s'adresse aussi directement aux vendeurs, pour lesquels l'accès à la plate-forme est entièrement gratuit, seuls ceux qui distribuent les solutions de crédit d'U.S. Bank étant éligibles, toutefois. Il s'accompagne naturellement de la promesse habituelle d'exposition immédiate à une audience étendue et rassurée par l'enseigne, qui, pour le coup, ne se limite pas aux seuls clients existants. Et la valeur pour la banque réside comme toujours dans son espoir de financer les acquisitions conclues via le site.

U.S. Bank RV & Boat Marketplace

Si je persiste à exprimer des réserves sur les prémices de la démarche, en particulier vis-à-vis de sa perception par le grand public (comment ne pas être perturbé par l'idée d'une banque engagée dans la vente de bateaux ?), celle-ci bénéficie tout de même d'un effet d'originalité susceptible de lui profiter : si aucune offre équivalente ne s'est imposée à ce jour, la capacité à la promouvoir largement peut s'avérer payante, y compris lorsqu'il s'agira de séduire les fournisseurs, pour lesquels l'effort requis est modéré.

Toujours est-il qu'il devient difficile d'imaginer où s'arrêtera cette tendance des banques à déployer des places de marché dans toutes sortes de domaines, en comptant sur leur notoriété pour en faire un succès. Ce dernier semble pourtant fugace, les premières expériences en la matière n'ayant pas, jusqu'à présent, été si performantes qu'elles suscitent des communications triomphantes. Et même s'il est possible de générer un emballement initial, il faudrait encore travailler à assurer leur viabilité à long terme.

vendredi 14 juillet 2023

IA et évolution du travail

Citizens
Tandis que, simultanément, les débats font rage sur l'impact prévisible de l'intelligence artificielle sur le monde du travail et les tensions sur le recrutement atteignent des sommets (comme en témoigne, entre autres, l'annonce du recrutement de 2 600 experts des technologies par BBVA), l'américaine Citizens adapte ses méthodes avec pragmatisme.

Quand il devient quasiment impossible de dénicher et séduire les talents dont la banque a besoin pour continuer à servir ses clients et, surtout, répondre à leurs attentes en constante évolution, la meilleure solution consiste à se retourner vers l'organisation existante et évaluer comment il serait possible de la réaligner avec les nouvelles exigences. Pour Citizens, dans le contexte présent, la démarche est évidemment parsemée d'IA, à la fois comme outil de transition et en termes de lacunes à combler.

Sur le premier volet, il s'agit d'exploiter les opportunités des outils disponibles aujourd'hui dans le but de faire progresser rapidement les collaborateurs en place vers des activités – généralement plus sophistiquées – où les manques sont les plus criants. Un exemple typique serait la conversion d'un opérateur de guichet (un rôle encore très vivace aux États-Unis, quoique en déclin) en conseiller, grâce au support d'un assistant virtuel capable de le guider dans l'écoute des demandes et les réponses à proposer.

Sur le second aspect, c'est une manœuvre classique de reclassement qui est mise au goût du jour. Les postes à pourvoir, majoritairement dans les domaines informatique et de l'analyse de données, sont offerts à des employés issus de tous les départements, y compris du réseau d'agences (visiblement en sureffectif, ce qui n'est pas surprenant), en particulier ceux qui ont fait des études dans ces disciplines mais s'en sont détournés par la suite ou bien ceux qui ont démontré une aptitude et sont susceptibles d'être formés.

Naturellement, Citizens ne fait qu'ajuster ses processus de gestion des ressources humaines à des contraintes externes et elle est probablement consciente que son approche n'est pas idéale. Se pose notamment la question critique du niveau de qualification des salariés concernés. Ils sont en effet débutants dans leur nouvelles fonctions et ne seront productifs et performants qu'à la condition d'être soigneusement accompagnés : l'entreprise a-t-elle pris la mesure des efforts nécessaires ?

Il n'en reste pas moins que ces initiatives illustrent de manière très concrète la perspective que dessinent depuis quelques temps de nombreux observateurs évoquant les conséquences sur l'emploi de l'irruption de l'intelligence artificielle : certaines professions sont vouées à disparaître, d'autres émergeront et deviendront primordiales pour la compétitivité… Selon ce scénario, l'enjeu pour les individus sera alors de trouver leur place dans la redistribution qui surviendra inévitablement, à court ou moyen terme.

Citizens

jeudi 13 juillet 2023

Cardif connecte l'assurance à la sécurité sociale

BNP Paribas
Préfigurant ce qu'apporteront, d'ici quelques années, les plates-formes d'identité « digitale » telles que nous les concoctent les décideurs européens, BNP Paribas Cardif propose désormais aux bénéficiaires de ses contrats d'assurance emprunteur de simplifier leur parcours d'indemnisation via un accès direct à leur compte de sécurité sociale.

À l'ère numérique, le principe retenu est trivial et sa mise en œuvre est à peine plus complexe : quand le détenteur d'une police (pour un prêt immobilier ou à la consommation) subit un arrêt de travail éligible à une prise en charge, il a maintenant la possibilité d'autoriser, via le service national d'identification FranceConnect, l'accès direct aux informations des prestations versées par la CNAM (Caisse Nationale d'Assurance Maladie) et éviter ainsi de transmettre lui-même les justificatifs nécessaires.

Les avantages pour les assurés, mis en exergue, sont évidents : leurs démarches sont facilitées et ne prennent que quelques secondes, le traitement de leur dossier est accéléré (jusqu'à l'instantanéité ?) et les risques d'erreur sont éliminés. Plus discrètement, mais tout aussi important, le dispositif devrait également permettre de réduire la fraude, ou aider à sa détection, au fur et à mesure de sa généralisation et de celle de FranceConnect+, la déclinaison qualifiée, et donc mieux sécurisée, du système.

Naturellement, autant par souci de conformité réglementaire que de respect des préférences individuelles, le recours à l'interface avec son compte personnel reste entièrement sous le contrôle du déclarant. Dans un domaine toujours aussi sensible, l'expérience méritera d'être suivie attentivement afin de vérifier si le gain de commodité proposé est suffisant pour convaincre de l'adoption ou, au contraire, et au pire, si la perception d'une intrusion dans la vie privée ne conduit pas à un rejet massif.

BNPP Cardif x FranceConnect x CNAM

Selon les résultats de cette première avancée, peut-être la compagnie pourrait-elle ensuite envisager de passer à la vitesse supérieure. En effet, il est aisé d'imaginer de s'affranchir totalement de la phase de déclaration de sinistre et de basculer vers une offre paramétrique, au moins sur une grande partie des événements déclencheurs : il « suffirait » pour ce faire d'instaurer une connexion avec la CPAM dès la souscription, grâce à laquelle leur identification et leur traitement s'opéreraient spontanément.

Quelles qu'en soient les évolutions futures, l'initiative de Cardif devrait servir de référence à toutes les institutions financières, et quelques autres entreprises, qui persistent, par habitude paresseuse, à exiger de leurs clients qu'ils leur fournissent des quantités toujours plus considérables d'informations et de documents… dont la plupart – sinon tous – pourraient être collectés à la source, non seulement pour améliorer leur expérience et, par conséquent, leur satisfaction mais aussi pour plus d'efficacité et de sécurité.

mercredi 12 juillet 2023

Un fonds de capital risque piloté par l'IA ?

Connetic
L'intelligence artificielle est désormais partout, alors pourquoi pas dans les processus de sélection de startups d'un fonds de capital-risque ? C'est exactement ce que fait Connetic, basé dans le midwest américain, qui vante la transparence et l'impartialité dérivées de son parti pris original. Mais est-il compatible avec la nature même de sa mission ?

Loin des centres névralgiques de l'innovation que sont notamment New York et la Silicon Valley, l'entreprise répond d'abord à une contrainte géographique en proposant aux entrepreneurs, où qu'ils soient localisés en Amérique du Nord, de soumettre à distance les demandes de financement de leur projet. Dans le prolongement de ces prémices, sa deuxième idée consiste à filtrer les candidats via une approche scientifique des données… qui présente l'avantage de pouvoir être totalement automatisée.

Concrètement, le processus, qui cible exclusivement des rondes d'amorçage (pour des montants compris entre 250 000 et 500 000 dollars), commence par une conversation avec un chatbot, baptisé Wendal, destinée à analyser le profil du ou des fondateurs – considéré comme le critère le plus important pour le succès – ainsi que les contours du dossier qu'ils portent (technologie, marché, conditions d'investissement…). Le logiciel prend alors, instantanément, la décision de poursuivre ou non et, dans l'affirmative, un humain prend le relais pour les vérifications finales (« due diligence »).

Parce que le robot se concentre sur l'essentiel de l'opportunité qu'il évalue et, en particulier, ne pose jamais de questions inopportunes, il évite les biais classiques (et tragiques) des acteurs traditionnels : pas de copinage, pas de racisme, pas de sexisme… ce qui lui permet d'afficher un taux d'inclusion (des femmes et des minorités) 8 fois supérieur à la moyenne de l'industrie. Cerise sur le gâteau, il explique son raisonnement et offre des recommandations pratiques pour l'optimisation des projets qu'il examine.

Accueil Connetic

Wendal serait-il donc l'investisseur idéal ? Croire à sa perfection reviendrait à ignorer un défaut majeur de la technologie sous-jacente, qui ne fait que reproduire des mécanismes existants sans aucune créativité ou imagination. L'IA mise en œuvre se contente en effet de catégoriser les entrepreneurs selon leur caractère (schématisé sur 16 cadrans), en ajoutant un soupçon du même traitement sur leur solution, et ne retient que ceux qui correspondent aux meilleurs résultats observés sur les opérations antérieures.

Cette mécanisation est peut-être adaptée à un fonds institutionnel tel que Connetic, désireux de limiter au maximum les risques qu'il prend… mais elle écarte implicitement une bonne part de l'aventure dans le « venture capital », dont toutes les jeunes pousses atypiques qui font les légendes ou, à tout le moins, les succès retentissants susceptibles de stimuler les performances globales. Au pire, si une telle approche se généralisait, c'en serait fini des ascensions fulgurantes d'idées géniales sorties du néant.

Bien qu'il reste possible que, en l'occurrence, il ne s'agisse que d'un positionnement délibéré, le cas de Connetic illustre une des pires erreurs a commettre avec l'intelligence artificielle, en croyant qu'elle est capable de remplacer son modèle humain sur tous les plans : si, ici, elle peut combler un certain nombre des faiblesses de notre cerveau, son fonctionnement fondamentalement algorithmique lui interdit, pour l'instant, d'intégrer la dose de fantaisie (ou d'irrationalité) qui fait émerger les changements si nécessaires.

mardi 11 juillet 2023

CaixaBank facilite le partage de factures

CaixaBank
Le partage des dépenses – entre colocataires, entre partenaires de vie (séparés ou maintenant des comptes distincts), à l'occasion de vacances entre amis… – fait partie des sujets qui suscitent le plus d'idées de la part d'institutions financières comme de jeunes pousses. CaixaBank ajoute désormais une telle option sur les prélèvements.

L'obsession de l'industrie pour ce genre de fonctions n'est pas en soi une véritable surprise tant les répartitions de frais entre individus génèrent de frictions et de querelles inutiles. Mais, en observant les solutions disponibles, la banque espagnole a pris conscience que, dans leur immense majorité, elles opèrent de manière autonome, généralement à travers une application dédiée, ce qui lui laissait donc une opportunité d'optimisation, grâce à l'intégration directe dans ses propres services en ligne.

Concrètement, il suffit à l'utilisateur de sélectionner dans sa liste des factures en cours de règlement celle qu'il souhaite répartir sur un ou plusieurs tiers. À partir de là, le fonctionnement est trivial puisque l'opération est simplement préparée, automatiquement, dans le porte-monnaie mobile interbancaire Bizum. Il ne lui reste alors qu'à indiquer le payeur et la fraction du montant total (rappelé pour plus de commodité) à lui demander.

De toute évidence, il n'est pas vraiment question de diviser le paiement en lui-même (ce qui s'avèrerait relativement complexe sur la base d'un prélèvement SEPA standard) mais d'appeler les contributions des co-débiteurs au plus tôt, en quelques gestes. Le choix de recourir à un échange via Bizum (plutôt qu'un virement instantané) facilite encore l'interaction tout en garantissant son universalité (avec ses 20 millions d'adeptes).

CaixaBankNow

L'initiative de CaixaBank entre ainsi dans la catégorie des « innovations minimalistes », précisément focalisées sur la réponse à une petite gêne du quotidien – quasiment invisible (et perçue comme inévitable), affectant des milliers de personnes – et dont la mise en œuvre ne demande guère d'efforts, de ressources, de budget… Aussi modestes soient-elles, elles sont le signe d'une profonde attention aux besoins, explicites et implicites, des clients et du soin extrême pris à améliorer leur expérience dans ses moindres détails, dont tellement d'entreprises se vantent à tort et à travers.

lundi 10 juillet 2023

L'expérience client selon ING ?

ING
Encore récemment, ING figurait incontestablement parmi les institutions financières les plus en pointe de l'innovation en Europe. Puis son directeur général est parti et, comme il arrive trop souvent, sa stratégie a radicalement changé. En quelques mois, elle semble avoir totalement perdu ses repères comme l'illustrent les propos lunaires de son responsable de la banque de détail dans un entretien avec Finextra.

Interrogé sur les attentes « digitales » des consommateurs et les moyens de leur offrir une expérience à la hauteur de celles-ci, Matteo Pomoni s'appuie pourtant sur un point de départ incontestable, à savoir l'impératif pour les institutions financières d'aligner leurs pratiques sur celles des géants de l'internet, qui définissent le standard incontournable des interactions web et mobile. Notons cependant d'emblée cette étrange idée de qualifier de super-app les solutions d'Amazon ou de Booking.com citées en exemple.

Après ce premier écart, le raisonnement prend une tournure quasiment absurde. Ainsi, la priorité pour les établissements qui souhaitent maintenir et renforcer leur relation avec leurs clients consisterait à affirmer leur présence dès l'origine des transactions, sur ces plates-formes leaders, de manière à accompagner leurs décisions. À ce stade, on imagine qu'il fait référence à des options personnalisées de financement. Pas du tout ! Il pense d'abord au « cashback » distribué par ING Belgique sur les achats Amazon.

Décrite comme un instrument de différenciation et d'adéquation aux besoins des individus, cette méthode préhistorique résumerait donc la vision de la banque pour son succès au XXIème siècle ? Je me permets d'en douter. S'il est indéniable que des promotions sont susceptibles de séduire ponctuellement, elles sont coûteuses, faciles à répliquer par la concurrence et ne garantissent pas la fidélité, surtout si l'expérience utilisateur, qui n'a décidément rien à voir avec ce genre de gadget, n'est pas au rendez-vous.

En revanche, M. Pomoni n'évoque jamais le véritable enjeu. Placer le client au centre des préoccupations de l'entreprise, s'assurer qu'il bénéficie en permanence de recommandations personnalisées, mettre à sa disposition des processus simples, rapides, transparents et sans frictions… sont les vraies leçons à apprendre des acteurs qu'il érige en modèle. Malheureusement, elles n'apparaissent pas dans sa perspective, même quand il est question de l'exploitation des gisements de données disponibles.

En moins de trois ans, en considérant que l'ignorance d'un dirigeant reflète une dérive générale, ING donne l'impression d'avoir non seulement perdu son esprit d'innovation mais également, et c'est bien plus grave, sa culture « digitale ». Quand on sait combien il est, en principe, long et difficile de faire évoluer les comportements et les mentalités dans une grande organisation, il faut en conclure que la greffe initiale était bien fragile et loin d'être aboutie. Les banques historiques peinent résolument à se moderniser.

Chute