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C'est pas mon idée !

dimanche 31 août 2025

Leçons d'un incident bancaire

Crédit Mutuel
Fin de journée, samedi 30 août 2025, dernier week-end avant la rentrée scolaire. Catastrophe pour le Crédit Mutuel - CIC et ses millions de clients qui voient leurs tentatives de paiements et de retraits échouer sans aucune explication. Si les pannes sont inévitables, la banque souffre des récriminations des consommateurs pour une autre raison.

Quelles que soient les mesures prises afin d'assurer la robustesse des systèmes informatiques, depuis les infrastructures physiques jusqu'aux logiciels, en passant par les réseaux, il est impossible de garantir qu'aucun incident ne se produira jamais. Le délai, plutôt honorable, de remise en route dans le cas qui nous intéresse – bien que certains estiment qu'il a dépassé les deux heures officielles – tend d'ailleurs à prouver que les équipes techniques sont préparées à réagir à ce genre de circonstances.

S'il faut en croire les commentaires publiés sur les plates-formes sociales, le grand public, désormais familier des aléas de l'économie « digitale », semble relativement compréhensif vis-à-vis de l'événement lui-même. En revanche, et, là aussi, parce qu'ils ont acquis une certaine expérience sur les capacités des entreprises dans le monde contemporain, les victimes expriment leur mécontentement avec véhémence quant au manque de communication de leur banque durant la période d'indisponibilité.

Concrètement, ils se plaignent, entre autres, d'avoir dû laisser leurs courses à la caisse des supermarchés après avoir perdu leur temps dans les rayons, d'avoir dû subir le jugement implicite des autres clients et des vendeurs qui ne pouvaient enregistrer leurs paiements… sans avoir la moindre information sur la source de leur problème, ni en amont ni a posteriori (jusqu'à résolution). Alors qu'ils doivent régulièrement supporter des messages commerciaux qu'ils exècrent, transmis par toutes sortes de médias.

Incident au Crédit Mutuel - CIC

Ils ont parfaitement raison d'être furieux ! En 2025, à l'ère des messages instantanés incessants sur nos téléphones, il est absolument indigne pour un établissement dont la mission est critique dans la vie quotidienne de ses clients de ne pas avoir anticipé avec un plan de communication adapté la survenue, aussi exceptionnelle soit-elle, d'une crise les affectant directement. Celui-ci aurait dû être déclenché dès les premières alertes et suivi jusqu'à la fin réelle des difficultés, en tenant compte des « répliques » finales.

Peut-être les responsables du Crédit Mutuel - CIC n'ont-il pas prévu un tel scénario, peut-être n'ont-ils pas identifié à temps les signaux annonciateurs, peut-être ont-ils cru que la réparation serait suffisamment rapide pour éviter tout embarras, peut-être n'ont-ils trouvé personne pour prendre en charge la stratégie éditoriale… Toutes ces hypothèses correspondent aux erreurs qu'il faut impérativement corriger afin de limiter les impacts désastreux et souvent durables d'un incident sur la confiance des clients.

Un plan de gestion de crise – informatique, cybercriminelle ou autre – ne peut se limiter aux interventions techniques : il doit également comprendre un volet de communication transparente. Ses caractéristiques incluent par exemple la désignation de responsables, avec astreintes pour les horaires non ouvrés, la spécification des actions à engager, y compris à travers un canal d'urgence dans les applications web et mobiles (qu'il faut avoir conçu et développé), la définition d'éléments de langage appropriés… et le partage d'une analyse « post mortem », pour la réassurance des clients (je suis curieux de voir ce que la banque strasbourgeoise présentera en la matière).

samedi 30 août 2025

CaixaBank introduit le BNPL dans Apple Pay

CaixaBank
Voilà plus d'un an qu'Apple annonçait l'abandon de sa propre solution de paiement fractionné au profit de partenariats avec divers spécialistes, y compris en dehors des États-Unis. L'implémentation promise avec l'espagnole CaixaBank débarque tout juste et ses limitations risquent de décevoir ceux qui l'attendaient impatiemment.

La perspective est forcément attractive pour n'importe quel établissement financier : au lieu de compter sur les commerçants partenaires, acquis à grands frais, pour proposer leurs offres au moment opportun ou d'intégrer celles-ci au sein de leurs plates-formes mobiles, où elles ont toutes les chances d'être rapidement oubliées, quoi de mieux que de suggérer un plan de financement au niveau de l'instrument de paiement lui-même, toujours visible et potentiellement applicable à toutes les dépenses ?

C'est donc l'approche que déploie désormais CaixaBank à l'intention de tous les porteurs d'une de ses cartes, dans la mesure où ils l'ont installée dans leur porte-monnaie « digital ». Avant de valider un règlement – sur une transaction éligible –, ils disposent sur leur écran de la possibilité de répartir le montant en plusieurs échéances, sur deux à douze mois (selon les conditions de leur contrat), en quelques gestes simples, le coût total et les mensualités étant systématiquement affichés par souci de transparence.

Comme toujours avec son système de paiement et bien qu'elle en soit l'intermédiaire, la marque à la pomme respecte scrupuleusement la vie privée de ses client et n'a, à ce titre, aucun accès aux détails de l'opération. En revanche, ce dont la banque néglige de se vanter, c'est que le marchand non plus n'a aucune connaissance – et n'est en rien impacté par – des particularités du paiement, ce dernier étant pour lui strictement identique à n'importe quel autre règlement par carte dématérialisée.

CaixaBank – Apple Pay BNPL

La nouvelle fonction souffre malheureusement d'un défaut majeur : elle n'est disponible que pour les achats en ligne ou dans les applications mobiles (« in-app »). En soi, cette restriction n'est pas surprenante car il n'est guère évident d'insérer une étape de choix (quelconque) dans une expérience de paiement de proximité via le smartphone. La rupture qui serait introduite dans le parcours constituerait une régression inacceptable. Mais c'est une portion immense de l'opportunité qui échappe ainsi à CaixaBank.

Rétrospectivement, cette faiblesse est peut-être à l'origine de l'échec d'Apple avec son produit, qui aurait conduit à son retrait, laissant à d'autres acteurs le soin de combler le vide laissé. Ce que ne fait pas donc pas réellement l'institution espagnole, qui semble refuser l'obstacle. Il y aurait pourtant quelques pistes à explorer, entre définitions de règles a priori et capacités d'ajustement a posteriori, en imaginant des moyens afin que ces actions « asynchrones » restent présentes à l'esprit des consommateurs.

jeudi 28 août 2025

Menaces sur la banque ouverte

Visa
Il n'y a pas si longtemps, les équipes de Visa proclamaient « l'avenir de la banque est ouvert ». Pourtant, selon Bloomberg, les dernières évolutions réglementaires conduisent l'entreprise à mettre un terme à sa ligne d'activité d'« open banking » aux États-Unis, ce qui devrait résonner comme une alerte pour l'industrie et surtout pour la FinTech.

C'est encore une perturbation majeure de l'économie qu'il faut porter au passif de l'administration Trump : la directive toute récente (elle datait d'octobre 2024) qui imposaient aux institutions financières de permettre à leurs clients de partager les données de leurs comptes avec les intermédiaires qu'ils choisissent a été annulée, déclenchant immédiatement un vent d'incertitude massif et, plus grave peut-être, un mouvement offensif de la part de plusieurs grandes banques du pays.

JP Morgan Chase, d'abord, a rapidement annoncé son intention de facturer la connexion à ses systèmes pour les opérateurs d'agrégation de comptes, allant jusqu'à transmettre à ces derniers sa grille tarifaire. Peu après, PNC lui emboîtait le pas en déclarant envisager de suivre son exemple. Et il ne fait aucun doute que toutes leurs grandes concurrentes sont alignées sur cette stratégie, voyant là une opportunité triviale de créer une source de revenus qui relève essentiellement de la rente de situation.

Confrontée à ce contexte doublement équivoque, entre risque de fermeture des accès chez certains établissements et coûts incontrôlables chez les autres, Visa préfèrerait donc renoncer aux États-Unis et se concentrer sur l'Amérique Latine et l'Europe, pour l'instant plus stables. Précisons tout de même que la décision est probablement influencée, dans une certaine mesure, par la position marginale de la marque sur le marché après l'échec de sa tentative d'acquisition de Plaid au début de la décennie.

Visa – The future of banking is open

Toujours est-il que l'impact du revirement politique peut être dramatique pour tous les acteurs, nombreux, qui ont bâti une solution exploitant l'intégration facile et (relativement) bon marché des historiques de transactions et autres informations bancaires de leurs utilisateurs. La seule augmentation du prix de la collecte de ces données remet en cause de modèles économiques déjà difficiles à équilibrer, fragilisant notamment les jeunes pousses les plus innovantes de la FinTech (telles que celles qui œuvrent sur le bien-être financier pour ne citer qu'un exemple que j'ai vécu).

Nous ne sommes heureusement pas concernés par une menace similaire sur le vieux continent mais l'exemple américain peut néanmoins susciter quelque inquiétude au regard d'une des évolutions envisagées avec les orientations prises pour la future directive FIDA, qui devrait prendre un jour le relais de la DSP2. Je pense précisément à son inclusion d'une faculté pour les fournisseurs de données de facturer leur service – à un niveau « raisonnable ». Espérons que cette provision ne viendra pas totalement désorganiser, voire détruire, un écosystème encore jeune et précaire.

mercredi 27 août 2025

La prochaine vague de fraude arrive avec l'IA

Guardio
La promesse des agents intelligents de réaliser les actions de la vie quotidienne pour le compte de leurs utilisateurs humains commence à se matérialiser dans quelques navigateurs web. Hélas, quand les experts de la sécurité « digitale » de Guardio évaluent leur capacité à résister aux tentatives de fraude, leur échec est retentissant.

L'intelligence artificielle agentique n'est pas tout à fait mûre mais elle progresse à grands pas et ses démonstrations régulières la rendent déjà éminemment attractive pour les consommateurs qui rêvent de se faciliter leurs interactions en ligne en demandant simplement à leur compagnon internet d'exécuter une tâche, en toute autonomie, aussi complexe soit-elle. La question de leur protection contre les arnaques risque donc de devenir rapidement critique, justifiant l'expérimentation conduite par Guardio.

En l'occurrence, alors que plusieurs logiciels du marché intègrent depuis quelques temps leur propre moteur d'IA, les chercheurs ont sélectionné le premier vrai navigateur agentique, à savoir Comet de Perplexity, pour leur test. Ils ont ensuite élaboré trois scénarios d'attaque reflétant des techniques largement connues et auxquelles une majorité d'internautes sont dorénavant sensibilisés (et immunisés) : faux site d'e-commerce, courriel de hameçonnage et page web infectée par du code malicieux.

Première étape, présenté avec une imitation de boutique Walmart, l'agent n'hésite pas à satisfaire à plusieurs reprises – parfois, il lève une alerte – la requête qui lui est soumise d'acheter une Apple Watch, allant jusqu'à fournir l'adresse de livraison et les informations de paiement conservées pour auto-remplissage. Avec le message prétendument en provenance d'une banque, il suit le lien inclus et sollicite la saisie des identifiants de connexion, sans laisser à l'utilisateur l'opportunité de détecter les indices qui émaillent le parcours suivi automatiquement. Le dernier cas montre enfin comment il est possible de manipuler l'IA en glissant des instructions spécifiques à son intention au sein du contenu qui lui est transmis. Là encore, elle se laisse berner comme une débutante.

Guardio – Scamlexity

La conclusion est aussi triviale qu'inquiétante : à ce stade de leur développement, ces systèmes sont conçus exclusivement pour aboutir au résultat exprimé par la demande qui leur est faite, sans aucune précaution par rapport aux dangers les plus fréquents de la toile, y compris ceux que les citoyens ont appris à repérer. Ils comptent sur les mécanismes internes des socles techniques sur lesquels ils s'appuient (par exemple les signalements de sites de Google), qui sont évidemment très insuffisants.

Pour les auteurs, la solution consistera pour les éditeurs de ces dispositifs à leur inculquer les règles de prévention qui leur éviteront de tomber dans les pièges qui leur seront tendus. Mais ils soulignent également l'inévitable escalade de moyens qui va probablement s'enclencher, par laquelle les escrocs exploiteront eux-mêmes l'intelligence artificielle afin de peaufiner leurs offensives et de s'assurer qu'elles restent efficaces, au fur et à mesure que des parades seront adoptées par leurs victimes…

Les conséquences pour les acteurs de la finance – qui seront comme toujours, avec les e-commerçants, les cibles privilégiées des fraudeurs – pourraient s'avérer dramatiques. En effet, avec les méthodes illustrées par Guardio et leurs dérivées, le point faible visé par une attaque n'est plus un groupe d'individus, chacun représentant une victime (potentielle) isolée, mais une IA et ses millions (à terme) d'adeptes : à une telle échelle, c'est la confiance dans l'institution qui pourrait se trouvée menacée.

mardi 26 août 2025

Lydia introduit le paiement anonyme

Lydia
Le leader incontesté des paiements entre pairs en France ajoute aujourd'hui une nouvelle corde à son arc avec une solution, toujours aussi simple d'utilisation, permettant de verser une somme d'argent à quelqu'un sans avoir à révéler la moindre information personnelle (numéro de téléphone, adresse de courriel, identité bancaire…).

Jusqu'à maintenant, « faire un Lydia », pour ses millions d'adeptes, consiste à adresser une somme d'argent depuis l'application mobile éponyme à l'intention d'une connaissance dont il suffit de fournir un critère d'identification élémentaire, qu'elle soit ou non elle-même utilisatrice. Avec la « Page Lydia », le destinataire peut désormais simplement transmettre un lien de paiement, sous forme de texte ou de QR code, qui l'autorise à recevoir l'argent de ses correspondants en respectant son anonymat.

À travers la page web correspondante, le payeur, où qu'il réside en Europe, spécifie le montant de son transfert – la valeur par défaut étant fixée à un euro dans le but de souligner les catégories de cas d'usage visées – et effectue une transaction par carte comme il en a l'habitude sur les plates-formes d'e-commerce. D'autres modes seront disponibles sous peu : le virement bancaire et les porte-monnaie électroniques Apple Pay et Google Pay pour une expérience plus fluide et adaptée à toutes les préférences.

L'option répond à toutes les circonstances dans lesquelles une personne en attente d'un règlement ne souhaite pas pour autant partager des données confidentielles avec un interlocuteur inconnu, pour une opération exceptionnelle. Ce sont toutes les occasions de la vie courante où même les plus « digitaux » des consommateurs se résignent encore à sortir pièces et billets, telles que les achats dans les vide-greniers (ou foire à tout comme on dit dans ma région) ou les petits paiements aux musiciens de rue.

Page Lydia

Pour Lydia, l'objectif est de couvrir un pan supplémentaire des paiements entre individus, en dépassant officiellement le seul contexte d'échanges entre amis et proches qui représentait son modèle d'origine. La nouveauté suscite d'ailleurs une question pour l'avenir : si l'histoire nous enseigne quelque chose (celle de PingIt, au Royaume-Uni, notamment), c'est que les clients sont prompts à décliner les outils de paiement qu'ils aiment de l'univers personnel vers le contexte professionnel, entre autres chez les artisans et petits commerçants. Comment une telle évolution sera-t-elle abordée ?

En attendant la « Page Lydia » constituera un instrument de conquête pour la jeune pousse, encouragée par l'absence de commission pour ceux qui y accèdent depuis son application (contre 2,5% pour les autres), et promeut son développement hors de l'hexagone, son approche étant totalement agnostique des frontières (au moins à l'intérieur de l'UE). Mais il faut surtout noter que Lydia est sans véritable concurrence sur son marché et que ce nouvel ajout lui permet d'accentuer encore son avance.

lundi 25 août 2025

L'open banking s'étend aux IA génératives

Grasshopper
Alors que l'industrie financière américaine est actuellement en pleine régression vis-à-vis de l'ouverture des données des clients (j'y reviendrai peut-être prochainement), une néo-banque pour les PME déploie ce qui semble être la première implémentation opérationnelle d'un serveur MCP, permettant à ses utilisateurs de partager les informations de leurs comptes avec les plates-formes d'IA générative.

Loin d'être une lubie technologiste, l'initiative est née d'un constat objectif : les responsables d'entreprises sont déjà nombreux à alimenter les moteurs d'intelligence artificielle, ChatGPT et consorts, avec leurs données bancaires dans le but d'obtenir, dans une conversation en langage naturel, des réponses simples et directes aux questions qu'ils se posent sur, entre autres, leur trésorerie et les tendances qui la concernent, voire des recommandations d'optimisation sur leur gestion financière.

Plutôt que de laisser ses clients se débrouiller avec la transmission de leurs relevés bancaires aux outils publics, avec tous les risques de sécurité que cela implique, Grasshopper leur offre une connexion native, grâce au standard de fait MCP, autorisant une intégration transparente depuis les interfaces d'IA dûment habilitées (la première à être validée est Claude d'Anthropic). Le spécialiste Narmi assure l'intermédiation technique afin de garantir un haut niveau de protection et d'intégrité sur toute la chaîne.

Actuellement mis à la disposition d'une sélection de clients, en mode expérimental, le système a vocation à devenir une sorte d'assistant intelligent à l'analyse des comptes. Depuis les interrogations les plus simples, telles que le solde du compte courant ou une liste des 10 fournisseurs les plus importants (en montant de dépenses), jusqu'aux plus complexes, par exemple comparer les revenus avec les dépenses de marketing, Claude restitue le résultat instantanément sans avoir à construire une feuille de calcul.

Grasshopper

Ces quelques scénarios illustrent parfaitement l'objectif visé : il s'agit pour une petite structure de proposer à ses clients un niveau de service digne d'une grande institution, en termes d'accès à la connaissance que recèlent les données qu'elle détient, sans engager les investissements que cette dernière consent pour créer sa propre infrastructure et développer ses propres modèles. Une interface ouverte et un partenariat avec un acteur ad hoc sont capables de délivrer la même valeur.

La démarche laisse toutefois une question en suspens : la réelle sécurité d'un partage d'information sensible avec une plate-forme généraliste, même si celle-ci est auditée avant toute mise en place. Outre le danger d'une faille ou d'une erreur chez Narmi, qui se trouve dans une position de sous-traitant particulièrement critique, il ne faut pas négliger les dangers auxquels peuvent s'exposer les utilisateurs eux-mêmes (moindres, il est vrai, que quand ils transmettent manuellement leurs relevés de compte).

dimanche 24 août 2025

BlackRock surveille l'IA de près

BlackRock
Comme le reste de l'industrie financière, le géant BlackRock se jette à corps perdu dans l'intelligence artificielle, par exemple avec son nouveau système AlphaAgents dédié à la recherche pour les investisseurs. Un aspect notable de sa démarche réside dans la manière dont sont abordées la traçabilité et la véracité des résultats.

Que ce soit pour les usages internes (par les collaborateurs) ou pour les applications mises directement entre les mains des clients, la bête noire des entreprises du secteur est le risque d'hallucination (et autres dérives) et ses conséquences potentiellement désastreuses sur la confiance ainsi que celles d'ordre réglementaire. Ces craintes s'avèrent tellement élevées qu'elles constituent aujourd'hui le principal frein au déploiement en production des innombrables expérimentations qu'elles mènent.

Dans le projet de BlackRock, la réponse passe par ce que Bryan Carroll qualifie de détecteur de mensonge, basé sur la technologie, sous licence libre, Arize Phoenix. Grâce à cette dernière, tous les contenus produits par les modèles d'IA mis en œuvre sont soumis à une analyse portant sur deux dimensions complémentaires à travers un score de fidélité, reflétant l'alignement avec les sources citées, et un score de pertinence, validant que les documents retenus sont bien en rapport avec la requête.

À l'aide de ces indicateurs, et en implémentant, je suppose, un mécanisme d'alerte en cas de franchissement de seuils de justesse prédéterminés, BlackRock se vante non seulement d'avoir quasiment éliminé toute anomalie dans les études générées automatiquement, avec un filtrage en temps réel, mais également de disposer de la sorte d'une capacité d'explicabilité native sur l'ensemble de ses applications, qui lui fournit simultanément une piste d'audit à présenter, le cas échéant, au régulateur.

Arize Phoenix

Ces conclusions donnent l'impression que BlackRock a atteint l'objectif suprême avec une intelligence artificielle qui ne se tromperait jamais. Il faut toutefois rester prudent : en recourant à l'IA pour contrôler ce qu'une autre IA a créé, ce qui est restitué est plus digne de confiance que ce qui n'est pas vérifié mais n'est pas infaillible. La nuance doit être gardée en mémoire afin de ne pas tomber dans une illusion dangereuse qui, parce que les erreurs se font très rares, conduirait à abandonner tout esprit critique.

Enfin, il est un sujet rarement évoqué dans ces approches de surveillance : le coût. Il est notoire que l'entraînement et le fonctionnement des modèles d'IA sont extrêmement gourmands en puissance de calcul. Or l'utilisation d'une seconde IA pour évaluer la sortie d'une autre revient à doubler (en termes d'échelle) cette consommation, et ses impacts économiques et environnementaux. Voilà un argument supplémentaire pour questionner systématiquement la valeur d'un cas d'usage avant son développement…

Un pansement sur l'hémorragie d'agences

Lloyds Bank
Alors que Lloyds poursuit sans relâche sa stratégie agressive de fermeture de ses agences, le groupe annonce en parallèle un partenariat avec PayPoint afin de renforcer ses capacités de dépôt d'espèces sur l'ensemble du territoire britannique. Mais la démarche répond-elle aux besoins des clients qui se sentent abandonnés ?

Au début de l'année, l'institution affichait son intention de baisser le rideau sur 136 implantations supplémentaires (au travers de ses trois enseignes, Lloyds, Halifax et Bank of Scotland) d'ici le début de 2026, soit 15% d'un réseau déjà considérablement réduit au cours de la décennie écoulée. En guise de justification, elle cite inévitablement la baisse de fréquentation (de presque moitié sur 5 ans) et se veut rassurante en mentionnant la possibilité d'obtenir une partie des services de banque du quotidien dans les bureaux de poste ou dans les « hubs » partagés avec ses consœurs.

Le nouveau dispositif déployé avec le spécialiste des paiements de proximité PayPoint étend largement la couverture de ces derniers. Ce sont ainsi 30 000 points de vente affiliés (dont 94% ouvert 7 jours sur 7), à moins de 1 mile de 99,5% de la population, dans lesquels les clients de Lloyds pourront désormais déposer jusqu'à 300 livres par jour (et 600 par mois) via un code-barre généré dans leur application mobile qu'il suffit de présenter au commerçant, le crédit étant porté instantanément sur leur compte.

Accueil PayPoint

Dans une certaine mesure, la démarche globale répond aux demandes pressantes des autorités – inquiètes de la disparition des distributeurs comme des agences – de maintenir un accès au cash pour des consommateurs dont une minorité importante continue à le préférer aux instruments électroniques, dans le but, entre autres, de mieux maîtriser leurs dépenses et leur budget, grâce à sa matérialité. Mais elle constitue aussi une priorité logique dans la perspective transactionnelle de l'industrie.

En effet, en dépit de leurs déclarations emphatiques sur leur prise en compte de la demande de leurs clients de pouvoir compter à tout moment et non loin de chez eux sur un conseiller capable de les écouter, de comprendre leurs attentes et de leur prodiguer des recommandations personnalisés, les banques sont bien toujours focalisées sur leur faculté à exécuter les opérations techniques impossibles à dématérialiser. Et elles oublient donc totalement de combler le vide laissé par les fermetures d'agences.

Elles n'ont rien à proposer face à la principale raison pour laquelle une partie de la clientèle persiste à préférer les établissements à réseau, à savoir le désir de savoir qu'il sera toujours possible de trouver un interlocuteur humain en bas de chez soi, pour traiter des urgences ou pour échanger sur un grand projet de vie. En comparaison des néo-banques (sérieuses), qui recourent aux mêmes solutions pour les problèmes de cash, elles n'ont hélas pas intégré le conseil dans leurs approches « digitales ».

vendredi 22 août 2025

Le vote des porteurs de fonds s'impose

Tumelo
Selon une enquête de Tumelo, un des fournisseurs de solution du domaine, l'attribution des droits de vote aux porteurs indirects de titres – par l'intermédiaire de fonds, en général – prend de l'ampleur et révèle un engagement marqué de la part des intéressés, alors que le principe n'a véritablement émergé que depuis quelques mois.

On peut dire que la tendance a réellement pris quand, après quelques initiatives lancées par des startups, notamment sur des préoccupations environnementales, BlackRock s'en est emparé sur un de ses fonds indiciels (ETF) au début de 2024. Il s'agit de redonner leur voix aux détenteurs de parts de ces instruments collectifs lors des assemblées générales des entreprises dont ils sont en réalité les « vrais » actionnaires plutôt que de laisser le gérant agir en leur nom, souvent en totale opacité.

Aujourd'hui la phase expérimentale semble laisser la place à un début de démocratisation. Selon Tumelo, les grands acteurs de l'investissement déploient le mécanisme sur un nombre de plus en plus élevé de supports, avec une adoption large, tandis que leurs clients sont sensibilisés et seraient déjà une majorité à affirmer leur préférence pour les fonds qui leur donnent la possibilité de voter, un tiers se déclarant même prêts à changer de fournisseur de manière à bénéficier de ce genre d'option.

Autre résultat notable de l'étude, les votes exprimés de la sorte exercent potentiellement un impact important sur la gouvernance des entreprises. Ainsi, dans 90% des assemblées que Tumelo a l'occasion d'observer via ses services, les porteurs de fonds ont pris une position différente de leur gérant sur au moins un des points de l'ordre du jour. Certains grands noms se félicitent en outre d'avoir pu faire avancer concrètement des thématiques figurant au cœur de leur stratégie grâce à leur voix retrouvée.

Tumelo – Proxy Season 2025

Il faut tout de même préciser que, a priori, les conclusions de l'analyse concernent exclusivement les investisseurs institutionnels, disposant automatiquement d'une influence conséquente par le volume de leurs portefeuilles. Il n'est donc pas certain que les particuliers soient aussi bien traités (dans la mise à disposition de moyens de prendre part aux décisions) ni que, dans l'affirmative, leur implication soit du même niveau. Pour eux, le modèle mériterait peut-être d'être proposé à travers des sortes d'associations autour d'un but commun, un peu à la manière de Tulipshare.

Dans un contexte où un des aspects sur lesquels le grand public paraît le plus susceptible de vouloir se faire entendre au niveau des choix des entreprises – je pense évidemment à la responsabilité sociale et environnementale – est en train de disparaître des scrutins (pour raisons politiques ou autres), la démarche de restitution du pouvoir à ceux qui engagent leurs économies sur des produits financiers pourrait constituer une excellente opportunité de contrer des orientations impopulaires de ce type.

jeudi 21 août 2025

Un agent IA pour enregistrer une entreprise

ANNA
Si les promesses des agents intelligents sont alléchantes, elles peinent, pour l'instant, à se matérialiser, hormis sur quelques scénarios simples. La démonstration par ANNA Money de la faculté d'une IA de piloter de bout en bout le processus d'enregistrement légal d'une entreprise au Royaume-Uni représente donc une avancée notable.

La valeur de l'intelligence artificielle est directement proportionnelle aux efforts qu'elle est susceptible d'épargner à ses utilisateurs, ce qui la rend donc particulièrement appropriée, si elle sait les prendre en charge, dans les cas de démarches administratives lourdes et consommatrices de temps. En ce sens, la création d'une société, entre formulaires à remplir, justificatifs à fournir (y compris les contrôles d'identité) et paiement des frais, offre un exemple représentatif d'un besoin réel.

Cette capacité faisant justement partie du catalogue des services commercialisés par ANNA – avec le compte bancaire, la facturation, la gestion comptable… –, c'est tout naturellement que la jeune pousse a voulu expérimenter la possibilité de piloter l'ensemble des opérations concernées avec un minimum d'intervention humaine grâce à un grand modèle de langage (LLM) interagissant directement avec son espace web.

Le test est présenté comme un succès… bien qu'il faille rester prudent car, en particulier, il n'a probablement pas traité toutes les hypothèses et leurs complexités spécifiques (notamment les différentes erreurs qui peuvent se produire dans le parcours). L'objectif est désormais d'industrialiser le concept de manière à permettre à des partenaires d'orchestrer l'enregistrement d'entreprise et l'ouverture de son compte bancaire (ANNA) via leurs propres agents IA, à travers une expérience utilisateur optimisée.

ANNA & AI

Il reste à voir si le déploiement se déroule correctement – il subsiste beaucoup d'inconnues dans l'approche : la maîtrise des risques (surtout face à des clients), l'adoption effective de la solution (par des tiers potentiellement timorés)… – mais le principe d'automatisation flexible des processus complexes, dont le secteur financier est une source quasiment infinie, est évidemment une opportunité majeure pour les applications de l'intelligence artificielle agentique. ANNA lui procure une occasion de faire ses preuves, il en faudra bien d'autres avant une éventuelle généralisation.

Incidemment, l'initiative soulève des questions perturbantes sur les modèles économiques de certains acteurs. En l'espèce, la néo-banque (et elle n'est pas la seule) bâtit sa réussite sur son assemblage de multiples fonctions utiles aux professionnels, y compris extra-financières, et leur intégration simplifiée. Mais si chaque brique propose demain sa propre interface avec les agents (par exemple l'organisme de gestion des entreprises dans le cas présent), son avantage risque de s'estomper rapidement…

mercredi 20 août 2025

Santander protège son app du partage d'écran

Santander
Dans l'arsenal des escrocs, notamment pour les spécialistes de l'ingénierie sociale, le recours aux solutions de partage d'écran sur les smartphones représente aujourd'hui une menace relativement marginale mais néanmoins réelle. L'application mobile de Santander, au Royaume-Uni, introduit donc désormais une parade spécifique.

La technique est éprouvée, simple variante de toutes les arnaques dans lesquelles une personne se fait passer, en général au téléphone, pour un collaborateur d'un service d'assistance ou d'un fournisseur quelconque. Dans ce cas précis, il s'agit de convaincre la victime de télécharger un logiciel de partage d'écran, sous prétexte de résolution d'un problème, dont l'utilisation va ensuite permettre, au fil d'une navigation téléguidée, de capturer un ensemble d'informations sensibles. Les clients britanniques de la banque auraient perdu 1,8 millions de livres en 2024 grâce à ce procédé.

Depuis quelque temps, Santander avait mis en place un message d'alerte dédié à ces situations, signalant l'activation d'un outil dangereux lors de l'accès aux services bancaires, avec des incitations à la prudence (dont le rappel que l'entreprise ne fait aucun usage de ces méthodes, ni les autorités) et des recommandations concrètes. Avec la nouvelle version de son application, la protection prend une autre dimension : à partir du moment où le partage d'écran est détecté, l'écran est entièrement flouté et l'utilisateur n'est plus alors en mesure d'exécuter la moindre action sur ses comptes.

Santander – Screen Sharing Protection

En regard du volume global de la fraude affectant les porte-monnaie des consommateurs, qui se mesure en milliards, les sommes relevant de ces attaques particulières peuvent paraître dérisoires. Cependant, l'approche déployée par Santander est suffisamment triviale – pour qui maîtrise le développement logiciel – pour que son coût ne constitue pas un obstacle. Il est même probablement invisible dans le budget du département informatique, par rapport aux autres investissements de sécurité.

En réalité, c'est l'absence de défense de ce genre qui est choquante, dans le groupe espagnol jusqu'à maintenant et dans les autres établissements concernés, s'il en reste (ce qui est à craindre). En effet, l'intégration de garde-fous contre toutes les méthodes autorisant l'accès aux informations affichées sur un écran de téléphone fait partie depuis très longtemps des bonnes pratiques universelles de conception sécurisée : que ces dernières ne soient pas systématiquement appliquées est extrêmement inquiétant.

mardi 19 août 2025

Un usage raisonnable de l'IA pour le trading

Robinhood
Alors que la popularité de l'intelligence artificielle commence à faire émerger des promesses de prédiction des tendances sur les marchés – dignes de martingales et relevant donc du charlatanisme – chez des acteurs peu scrupuleux, Robinhood en développe un usage plus raisonnable et réellement utile, au service de l'éducation financière.

Le phénomène était déjà apparu, avec un certain retentissement médiatique, derrière la vogue des réseaux sociaux : grâce à l'analyse de sentiments, quelques startups déclaraient pouvoir identifier des orientations futures sur des titres de bourse et procurer ainsi un avantage exclusif à leurs utilisateurs. Aujourd'hui, l'IA reprend évidemment le flambeau des illusions, à travers des suggestions plus ou moins explicites d'enrichissement rapide, flirtant parfois dangereusement avec l'illégalité.

Point d'ambiguïté de ce genre pour Robinhood, en dépit de sa propension à user d'artifices contestables, à l'occasion. Sa nouvelle solution, déployée depuis quelque temps aux États-Unis et désormais disponible au Royaume-Uni, consiste à produire des documents de synthèse sur les actions grâce à l'intelligence artificielle générative appliquée à diverses sources d'information : actualité (en temps réel), rapports d'analystes, données propriétaires détenues par la jeune pousse elle-même…

L'objectif est de fournir aux clients, sur chaque page détaillant un support financier au sein de leur espace personnel, sans frais supplémentaires (pour l'instant), un résumé explicatif clair et lisible des mouvements qui affectent son prix, de manière à les aider à prendre des décisions éclairées avec confiance… bien que, par précaution, les conditions d'utilisation précisent que les commentaires élaborés de la sorte ont un but informatif et ne doivent en aucun cas être interprétés comme des recommandations.

Digests by Robinhood

Officiellement, des centaines de milliers d'américains, des novices aux plus expérimentés, auraient déjà profité du service depuis son ouverture au cours de l'été et s'en déclareraient extrêmement satisfaits (95% des répondants à une enquête disent l'adorer). Ils confirment notamment que le contenu des communications correspond à leurs attentes, qu'ils y trouvent facilement ce qu'ils cherchent et, facteur de confiance primordial, qu'ils estiment que les références retenues sont pertinentes et à jour.

Ces « Digests » constituent la première mise en œuvre de Cortex, l'assistant intelligent – et propulsé par l'IA – d'investissement de Robinhood, et l'entreprise indique qu'elle compte poursuivre ses efforts pour en faire un véritable appui pédagogique à l'intention de ses clients. Naturellement, l'ambition sous-jacente reste d'encourager l'activité de trading, afin de soutenir la croissance, mais l'approche par l'éducation paraît louable, y compris dans une logique de développement sain et durable. Elle pourrait d'ailleurs être affinée, pour plus d'efficacité, par exemple à travers une personnalisation des informations délivrées à chaque individu, en fonction de son niveau de compétence.

dimanche 17 août 2025

Qu'attendent les clients de leur banque ?

Westpac
Quand une banque s'intéresse à ce que ses clients attendent réellement de sa part, sans se focaliser uniquement sur ses produits, elle ouvre une porte sur un monde d'opportunités. Malheureusement, Westpac, qui est à l'origine de cette enquête originale, n'en retire pas tous les enseignements qui lui permettraient de se différencier.

La gestion de leurs finances figure au cœur des préoccupations des australiens et leurs difficultés ressortent rapidement de leurs réponses : la moitié des personnes interrogées révèlent ainsi prendre leurs décisions dans l'instant, sans véritable planification, deux sur trois se trouvent confrontées à des priorités contradictoires les empêchant d'atteindre leurs objectifs et une minorité non négligeable se sent débordée par l'excès de tâches à assumer simultanément ou par des agendas surchargés.

Or, face à cette perception généralisée de submersion, ils sont 80% à considérer que leur banque devrait les aider concrètement à reprendre le contrôle… mais en arrière-plan, sans leur demander un engagement spécifique ou de prendre des mesures de manière proactive. Ce qu'ils souhaitent (ou ce qu'ils « espèrent », selon la formulation de Westpac) est un support implicite personnalisé, grâce auquel ils parviendront à ajuster leur comportement par petites touches discrètes, inscrites dans leur quotidien.

Quelle est la réponse de l'institution financière à ce besoin fondamental, qui se rattache directement aux enjeux de bien-être financier ? Une campagne de communication, assortie d'un slogan commercial : « cela prend un peu de Westpac » (« it takes a little Westpac »). Tout au plus celle-ci s'appuie-t-elle sur deux services existants, à savoir les conditions flexibles offertes sur le crédit hypothécaire et, plus proche du sujet, la recherche d'économies possibles à travers la détection des abonnements superflus.

It Takes a Little Westpac

Alors que la plupart des acteurs historiques du secteur se désintéressent des attentes profondes des consommateurs, en estimant que leur rôle se limite essentiellement à leur vendre des produits, l'étude menée par Westpac semblait prendre une direction propice, susceptible, idéalement, de redéfinir sa mission. Las, il n'est évidemment pas question d'investir dans une telle stratégie, probablement coûteuse et certainement délicate à mettre en œuvre, une couche de vernis marketing suffira à faire illusion !

Voilà une belle occasion manquée ! Après la prise de conscience de l'importance pour ses clients de se positionner comme un soutien constant et invisible dans la réalisation de leurs projets – qu'il s'agisse de se sortir d'une situation difficile, de mettre un peu d'argent de côté pour des vacances de rêve, d'envisager un futur achat immobilier ou de préparer la retraite –, on attendrait de la banque qu'elle se mette en marche sur toutes les dimensions de la problématique avant de se vanter de les avoir compris…

vendredi 15 août 2025

De l'efficacité de la lutte contre la fraude

CommBank
La lutte contre la fraude, sous toutes ses formes, donne parfois l'impression d'être désespérée tellement la sophistication croissante des attaques semble difficile à suivre. C'est donc une note d'optimisme qu'apporte CommBank quand elle révèle qu'elle observe une baisse de 76% en deux ans des pertes de ses clients pour cause d'arnaque.

Bien qu'il n'englobe pas l'ensemble de la criminalité dont les consommateurs sont victimes au jour le jour, ce résultat est d'autant plus intéressant qu'il concerne un domaine dans lequel une des principales armes mises en œuvre aujourd'hui porte exclusivement sur la sensibilisation et l'éducation : contrairement aux campagnes de communication génériques (et ponctuelles) telles que celle des banques françaises, il démontre qu'une approche multi-facettes parvient à prouver son efficacité.

Voilà justement pourquoi l'institution australienne ne relâche pas ses efforts et ajoute une corde à son arc. Intégrée dans l'application Truyu – émanation de sa branche de capital-risque x15ventures – dédiée jusqu'à maintenant à la surveillance des menaces d'usurpation d'identité, la nouvelle fonction invite ses utilisateurs à transmettre une capture d'écran des SMS suspects qu'ils reçoivent : en quelques secondes, l'intelligence artificielle qui la propulse analyse l'image et détermine la probabilité qu'il s'agisse effectivement d'une escroquerie (financière ou autre, incidemment).

En France, le principe rappellera à ceux qui le connaissent le service 33700 ou la « phishing initiative », qui tous deux permettent de dénoncer des tentatives frauduleuses (via SMS pour le premier, via des sites de hameçonnage pour le second)… mais souffrent de lacunes rédhibitoires : outre leur faible notoriété, l'un n'apporte aucune confirmation de la qualification et l'autre est soumis à des délais parfois longs de traitement manuel, correspondant à sa mission primaire de prise de mesures coercitives contre les auteurs (ce que Truyu intègre également dans son modèle opérationnel).

CommBank Scam Checker

Naturellement, la solution australienne ne justifiera sa valeur que si elle est largement adoptée. Son inclusion dans une application existante, qui a apparemment conquis une audience conséquente depuis son lancement, lui donne un avantage immédiat de ce point de vue. Il laisse d'ailleurs imaginer l'intérêt de rassembler toutes les options de lutte contre les malversations au sein d'un titre unique, distinct de la plate-forme bancaire, dont ce n'est pas le rôle, quand bien même l'enseigne peut apporter sa crédibilité.

Il reste tout de même un point noir dans ce panorama : CommBank affirme investir plus de 900 millions de dollars, pour la seule année 2025, dans la protection de ses clients. Ces derniers seront rassurés de constater qu'ils font l'objet d'une telle attention… mais la facture paraît extrêmement salée et soulève de graves questions de viabilité de la démarche, sachant que la défense contre la fraude est une lutte permanente, qui demandera des efforts constants, probablement de plus en plus coûteux.

La communication de l'établissement dévoile enfin un autre mécanisme récemment introduit pour la validation des transactions de paiement en ligne, via son application plutôt que par un code à usage unique envoyé par SMS (exposé à des risques de fuite), tel qu'il existe depuis longtemps chez nous. Ce « retard » souligne combien il serait critique pour l'industrie, surtout dans le domaine de la sécurité, de surveiller les progrès enregistrés dans le monde entier, de manière à les répliquer au plus vite.

jeudi 14 août 2025

Tide déploie des cartes muettes

Tide
Au premier abord, l'annonce par la néo-banque Tide qu'elle distribue dorénavant des cartes de paiement sans aucune autre information que le nom du porteur me laisse de marbre : après tout, Apple a popularisé le principe depuis 2019. Mais comment se fait-il alors qu'elle soit la première à l'implémenter pour les entreprises britanniques ?

Historiquement, le numéro et le mois d'expiration étaient imprimés, en relief, sur les cartes afin d'en permettre la reproduction physique sur les reçus délivrés par les appareils de « lecture » de l'époque (les anciens parmi vous se souviennent probablement de ce qu'on qualifiait de « fer à repasser »). Avec l'avènement de la puce électronique, qui a totalement supplanté cet ancien système, ces données n'avaient plus aucune utilité puisqu'elles étaient transmises par voie informatique.

Hélas, au début de ce siècle, est né l'e-commerce et son adaptation aux moyens de paiement en vigueur à ce moment-là, qui a remis au goût du jour l'usage des identifiants de la carte, de manière à les transmettre, après saisie manuelle, lors du règlement du panier. Depuis, ils sont donc restés présents sur les supports distribués… jusqu'à ce que la banque mobile offre une solution plus sûre, en invitant les clients à rechercher les références nécessaires dans leur application et non plus sur un bout de plastique.

Sans surprise, Tide brandit toujours le même argument de sécurité pour expliquer son initiative : parce qu'il est tellement facile pour une personne indélicate de capturer d'un coup d'œil les données avec lesquelles elle pourra effectuer des achats frauduleux, sans même avoir à dérober la carte, il est préférable de les déplacer dans un espace protégé sur le téléphone du client. En outre, dans une large mesure, l'expérience utilisateur gagne au changement pour ceux qui ont toujours leur appareil sous la main.

Tide Strips Card Numbers

Dans une période où les institutions financières déploient des moyens considérables afin de lutter contre les malversations en tout genre – y compris avec des dispositifs relativement complexes et fragiles tels que le code de validation (CVV) dynamique, qu'elle facturent sans vergogne au détriment de la protection de ceux qui refusent une ponction abusive –, pourquoi n'ont-elles pas déjà généralisé le mécanisme trivial que représente la transition de l'ensemble de ces fonctions vers leur application mobile ?

Bien sûr, pour les établissements traditionnels, intervient la question de l'adoption des outils « digitaux », qui n'est pas, à ce jour, universelle bien que fortement majoritaire. Mais la sécurité ne devrait-elle pas passer avant tout autre critère – comme le proclament d'ailleurs fréquemment les acteurs de l'industrie – et donc justifier la distribution de cartes muettes par défaut, avec une version « classique » en option, pour les individus refusant l'application mobile et désirant faire des emplettes sur internet ?

mercredi 13 août 2025

Flagrant délit d'IA-blanchiment chez Santander

Santander
Avec chaque grande tendance, technologique ou autre, Santander nous a habitués à ses fanfaronnades. Il n'est donc guère surprenant de la retrouver aujourd'hui en pleine opération d'IA-blanchiment (ou « AI-washing »), avec laquelle elle atteint des sommets en évoquant, entre autres, son ambition d'inscrire l'intelligence artificielle dans ses gènes.

Bien que les déclarations à l'emporte-pièce ne manquent pas sur cette thématique tellement à la mode, je ne crois pas avoir, à ce jour, identifié une autre institution financière prétendre comme le groupe espagnol, par la voix de son directeur des données et de l'IA, devenir « AI-first » ou, encore mieux, « AI-native », suggérant à travers ces expressions que l'intelligence artificielle a vocation à s'infiltrer au cœur de l'ensemble de ses activités, au point d'en devenir le moteur principal.

Plus précisément, les modèles et les agents seront appelés, à terme, à piloter chaque décision, chaque processus, chaque interaction (hyper-personnalisée) avec les clients… Cette vision hégémonique s'appuie sur trois piliers : l'intégration de l'IA dans toutes les métiers – de la gestion de produit au marketing, en passant par le crédit, par exemple –, sa mise en œuvre dans les fondations de ses systèmes informatiques, la participation à l'écosystème (avec les grands fournisseurs) comme levier de croissance.

Naturellement, la transformation devra se dérouler dans une approche transparente et responsable, particulièrement importante pour l'industrie bancaire. Les actions entreprises seront ainsi encadrées par des protocoles extrêmement stricts en matière d'éthique, de sécurité et de conformité (notamment sur la protection des informations sensibles, qui restent toujours sous contrôle), de manière à garantir, à travers une explicabilité absolue, le traitement impartial de toutes les demandes des clients.

Santander – AI-Native

Jusque-là, les objectifs mentionnés sont identiques à ceux de toutes les consœurs de Santander… Peut-être a-t-elle des projets spécifiques qui justifient la grandiloquence de sa communication ? D'emblée, il ne faut pas chercher d'originalité dans le passé : ses seuls faits d'arme concernent des usages classiques au point de nous lasser, à savoir la lutte contre la fraude, la génération de résumé des échanges avec les clients (mais sont-ils exploités ?), l'automatisation de processus, l'aide aux développeurs…

Et pour l'avenir ? Ce sera une collaboration renforcée avec OpenAI, portant la promesse de stimuler la création d'assistants capables de suggérer des options stratégiques, de promouvoir la personnalisation de la relation avec les clients, de fluidifier la gestion des back-offices… Pourtant, il ne s'agit, du moins à ce stade et pour les deux prochaines années, que de mettre ChatGPT entre les mains des collaborateurs – 15 000 initialement, le double d'ici le mois de décembre, soit 15% des effectifs de la société.

Outre le ridicule effort de surenchère sur l'intelligence artificielle, la démarche de Santander est tristement typique de la manière d'aborder une stratégie d'entreprise dans les grands groupes contemporains. Comme s'il suffisait d'énoncer une cible (ambitieuse, qui plus est) et, au mieux, d'en dessiner la première étape pour espérer l'atteindre. En l'occurrence, la banque risque de rapidement se heurter à l'obstacle quasiment insurmontable commun à la plupart des acteurs du secteur : les difficultés d'accès aux données, indispensables à l'IA, verrouillées dans des silos historiques.

mardi 12 août 2025

Des paiements plus transparents avec Google

Google
Comme les autres géants technologiques, Google veut prendre une place en propre dans les paiements. Mais cela ne l'empêche pas, en parallèle, de continuer à enrichir les possibilités proposées avec les instruments traditionnels, carte en tête. L'introduction de nouvelles options dans son navigateur Chrome offre un cas intéressant.

Passons rapidement sur les informations additionnelles qui seront fournies aux internautes utilisant le moteur de recherche de l'entreprise ou son porte-monnaie en ligne lors de leurs interrogations sur les taux de change : dans un mode pour l'instant expérimental, les résultats habituels seront complétés par l'affichage direct des conditions – frais compris – pratiquées par quelques spécialistes tels que Ria et Wise. Un transfert pourra ensuite être exécuté sur ces plates-formes en quelques gestes.

La suite concerne la fonction de remplissage automatique des données de paiement incluse dans le navigateur web. Un premier ajout s'inscrit dans une tendance majeure, qui vient donc désormais s'immiscer au plus profond de l'expérience e-commerce : outre le choix d'un des supports préalablement enregistrés, le consommateur pourra également régler ses achats (éligibles) en plusieurs fois grâce aux solutions de BNPL d'un éventail de partenaires (Affirm et Zip initialement, Klarna et d'autres à venir).

Enfin, dernière évolution, particulièrement notable pour le marché américain (seul visé à ce stade), l'outil connaît maintenant les détails des programmes de récompense qui accompagnent plus de 100 cartes de crédit parmi les plus populaires. Ainsi armé, il devient capable d'afficher automatiquement, lors de la demande de sélection d'un moyen de paiement, les primes et autres avantages auxquels peut prétendre le porteur sur son achat en cours avec chacune de ses cartes, afin d'éclairer sa décision.

Paiement dans Chrome

L'approche devrait facilement séduire les consommateurs, qui n'hésitent pas à adopter de multiples cartes, en grande partie sur la base de leurs promesses d'économies et/ou de cadeaux, mais qui ne savent plus, au moment opportun, laquelle leur procurera le bénéfice optimal pour chaque transaction à finaliser, et se résolvent alors généralement à recourir à la plus familière d'entre elles, effaçant de la sorte toutes les opportunités qui les avaient conduit d'abord à accumuler une vaste collection dans leur portefeuille.

En revanche, les émetteurs seront peut-être moins enthousiastes, entre ceux qui profitent, par exemple en raison de leur notoriété, de l'effet de carte préférée à défaut de maîtriser toutes les caractéristiques des autres, et ceux qui vantent des avantages extravagants en comptant sur la mémoire courte de leurs clients pour en limiter le coût. Quoi qu'il en soit, Google donne ici une leçon magistrale sur la manière dont les outils modernes peuvent contribuer à mettre plus de transparence dans les actes du quotidien, avec une information contextuelle qui aide à prendre de meilleures décisions.

lundi 11 août 2025

Quel est votre rapport à l'argent ?

My Life – BIL
Je profite de la trêve estivale et du calme plat qui règne sur l'actualité de l'innovation pour m'attarder sur un thème qui me tient à cœur – le bien-être financier – en rebondissant sur un (ancien) article de la banque luxembourgeoise BIL et sa question de titre un brin provocante et néanmoins essentielle : avez-vous l'argent heureux ?

Bien que la plupart d'entre nous exprimons facilement notre scepticisme vis-à-vis de l'adage populaire « l'argent ne fait pas le bonheur », il s'avère que celui-ci comporte un fond de vérité indiscutable : sans remettre en cause les difficultés particulières qu'entraîne fréquemment la pauvreté, l'observation scientifique permet de vérifier que le stress financier peut tout autant affecter les plus aisés. L'interrogation posée par BIL devient alors infiniment plus importante que le niveau de ressources ou de patrimoine.

Sur la base d'un livre écrit par Ken Honda, l'établissement suggère un test simple afin de mesurer son état d'esprit : parcourez l'historique de vos transactions bancaires et évaluez votre ressenti à la lecture de vos rentrées d'argent et de vos dépenses. Quelle que soit votre situation, si vous percevez une frustration durant cette consultation, il faut agir. Vous ne pouvez être en harmonie avec votre budget que si vos opérations évoquent un plaisir ou, à tout le moins, un sentiment d'accomplissement.

L'autrice souligne un des principaux facteurs constitutifs d'une dissonance cognitive synonyme de préoccupation, voire d'angoisse, qui nuisent à un bon équilibre de vie. Pour de nombreuses personnes, la pression sociale exerce une influence excessive sur les choix du quotidien… qui ne répondent pas à des besoins ou des envies réels. Un cas caricatural mais parfaitement représentatif est celui de la voiture ou la maison achetée dans le but d'affirmer son statut parmi ses pairs et non par préférence intime.

Avez-Vous l'Argent Heureux ?

Comment corriger le tir ? Le premier réflexe consisterait certainement à identifier ce biais spécifique, qui perturbe les décisions et mène à l'irrationalité, et tenter de l'éradiquer. Mais la réalité n'est souvent pas si simple. L'analyse des motivations profondes des individus révèle que, pour une partie d'entre eux, l'affichage de la position sociale est la plus puissante : ceux-là ne verront évidemment pas leurs excès sous un angle négatif, ils contribuent au contraire à la satisfaction de leurs désirs.

La seule solution viable consiste donc plutôt à commencer par une introspection, à travers laquelle on découvrira le moteur de son bonheur (la liberté, la générosité, l'accumulation…). Dès lors, il faudra le traduire en actions concrètes sur les mouvements d'argent, en privilégiant ceux qui sont alignés avec le critère retenu et en écartant autant que possible les autres (quitte à renverser de manière artificielle la perspective intellectuelle sur les paiements impossibles à éviter qui ne lui correspondent pas).

Toutes les personnes possédant les moyens suffisants pour satisfaire leurs besoins essentiels peuvent espérer améliorer leur bien-être financier. Pour ce faire, la priorité ne sera pas de gagner plus mais, avant tout, de changer de comportement avec l'argent, en accordant celui-ci avec les ressorts psychologiques qui régissent sa perception. Ils sont encore rares aujourd'hui, mais des outils qui intègrent ces différentes dimensions commencent à émerger et peuvent offrir une aide précieuse en la matière.

dimanche 10 août 2025

La finance participative française s'essouffle

France FinTech
En attendant le baromètre de l'association France FinTech, le marché français de la finance participative tendrait, selon L'Agefi, à poursuivre le déclin entamé à partir de 2023, après le bond enregistré durant les années post-COVID. Le mouvement atteint un tel niveau qu'il semble nécessaire de repenser les stratégies de fond en comble.

Après avoir perdu plus d'un quart de son volume d'activité au cours des deux années précédentes, ce premier semestre serait donc sur la voie d'une baisse supplémentaire de 10 à 15%. Celle-ci serait principalement due au secteur immobilier, qui représente environ la moitié des collectes et continue à subir la crise générale du domaine. Les énergies renouvelables, cumulant presque 25% des fonds recueillis, parviendraient en revanche à limiter la casse, sans toutefois afficher une santé brillante.

Outre quelques fermetures de plates-formes, le coup de frein serait dû, pour l'essentiel, à une plus grande sélectivité des dossiers acceptés. Il s'agit d'un revirement par rapport à une période de forte croissance… qui n'était pas toujours bien maîtrisée, entraînant un inévitable renchérissement des taux de défaut, dangereux à la fois pour l'équilibre financier des intermédiaires concernés et pour la confiance de leurs clients.

Cette situation de risque, renforcée par la conjoncture économique peu favorable, conduit certains acteurs à envisager de réclamer une contribution à leurs investisseurs, soit pour leur faire bénéficier des meilleures opportunités, soit pour partager les coûts des contentieux. Dans tous les cas, la fin de la gratuité (faciale) paraît être à l'ordre du jour… ce qui pourrait s'avérer contre-productif pour des participants déjà réticents.

France FinTech – Finance Participative

Face à la dépression qui affecte la finance participative en France, une réinvention complète des approches en vigueur serait probablement indispensable. Je soupçonne qu'elle souffre d'un manque d'attrait pour les personnes qui disposent de fonds à faire fructifier. Entre autres faiblesses : l'offre est relativement limitée (les opérations en cours à un moment donné sont peu nombreuses), le modèle requiert un engagement soutenu… et les crypto-actifs créent une concurrence dans les instruments alternatifs.

Naturellement, dans une illustration parfaite du dilemme classique des solutions de mise en relation entre deux typologies de clientèle, l'autre catégorie de partie prenante, constituée par les entités en recherche de financement, est elle-même frileuse en raison de l'audience réduite qu'elle est susceptible de toucher. La clé pour débloquer cette impasse imposera de développer la notoriété du concept, auprès des demandeurs comme des bailleurs de fonds, en défendant ses caractéristiques distinctives.

Je reste un fervent enthousiaste de la finance participative et de ses possibilités de rendre l'investissement ou le crédit plus concret, plus transparent et plus engagé. Mais il ne pourra pas progresser tant qu'il ne sera pas démocratisé très largement. Peut-être faut-il user des méthodes d'influence qui réussissent aux cryptomonnaies (en les attaquant sur leurs points faibles ?), peut-être faut-il rechercher des partenariats avec des acteurs présents en première ligne (les banques)… Une certitude : sans prise de mesures drastiques, le crowdfunding restera une anecdote dans le paysage.

samedi 9 août 2025

La modernisation des agences n'en finit pas

NAB
Dans le monde entier, les banques traditionnelles se répartissent en deux catégories : celles qui visent à glisser vers une relation essentiellement « digitale », complétée par quelques points d'accueil pour des besoins spécifiques, et celles, de plus en plus rares, qui refusent d'abandonner leur modèle historique reposant sur leur réseau d'agences. NAB est de ces dernières et elle réaffirme son choix depuis quelques mois à travers une vaste campagne de modernisation de ses implantations.

Le chantier, qui représentera un investissement de 55 millions de dollars, a déjà permis de rénover une centaine de succursales dans tous le pays – y compris dans les zones rurales, dans un but explicite de maintenir son ancrage dans les communautés locales – et presque cinquante supplémentaires sont planifiées avant la fin de l'année.

Il est question d'un véritable changement de format pour les agences, qui voient leur organisation historique repensée pour présenter un visage plus hospitalier, avec un aménagement soigné, une prise en compte des exigences d'accessibilité et une division de l'espace conçue en priorité pour les conversations avec les clients.

L'objectif est d'abord de répondre aux attentes de tous ceux qui privilégient des interactions en face à face pour parler de leurs préoccupations financières, en leur offrant un lieu ouvert, facile d'accès, personnalisé et où ils se sentent bienvenus. Les efforts de transformation leur transmettent en outre un message plus ou moins subliminal : la banque est présente à proximité de chez moi pour longtemps. Si ces arguments vous donnent une impression de déjà-vu, ce n'est pas un hasard.

NAB – Branch Network

Depuis deux décennies, les institutions financières ont multiplié les initiatives de ce genre, dont les « agences du futur », destinées à tester des concepts relativement avancés, furent une émanation populaire durant quelques années. Or, au-delà de l'impératif immobilier de rafraîchir des espaces commerciaux qui, comme tous les autres, deviennent vétustes au fil du temps, aucune de ces tentatives n'a produit de résultats extraordinaires… par exemple face à la baisse de fréquentation généralisée.

Rien d'étonnant à cela, à mon avis : les promesses de renforcement de la relation avec les clients qui motivent officiellement les travaux ne peuvent assurément pas être tenues par une simple opération cosmétique sur les locaux. En revanche, le facteur le plus important, qui consisterait à proposer une expertise de qualité – à l'écoute, empathique, orientée sur le conseil et l'accompagnement – grâce à des équipes de collaborateurs de haut niveau, ne fait jamais l'objet de programmes de la même ampleur…