Jeudi dernier, 1er décembre 2016, j'étais invité par les organisateurs du premier MOOC FinTech français à participer à une table ronde autour de la question « Londres est-elle vouée à rester la capitale européenne de la FinTech ? ». Voici, en synthèse, les raisons pour lesquelles je crois que la réponse sera « oui » pour encore quelque temps…
Naturellement, l'intitulé de l'intervention ne trompe personne : le sujet qui figurait réellement au cœur du débat était de savoir si Paris avait une quelconque chance de prendre la place de Londres dans le cœur des entrepreneurs, à la faveur du Brexit à venir. Joëlle Durieux, directrice générale du Pôle Finance Innovation, était d'ailleurs là pour défendre becs et ongles cette idée et présenter tous les avantages de la France dans la bataille qui se joue actuellement dans toutes les métropoles européennes.
Alors, puisqu'il s'agit d'une bataille, la première règle pour un bon stratège est de connaître parfaitement son adversaire principal, et, surtout, ses forces et ses faiblesses. Pas la peine de s'étendre sur ces dernières, la faille qui a créé l'opportunité de mettre en cause la position jusque alors inébranlable du Royaume-Uni est sa sortie programmée de l'Union Européenne et sa conséquence directe, à savoir la perte probable, pour les entreprises qui y résident, d'un accès simplifié au reste du continent.
Attardons-nous donc sur ce qui attire et retient les startups de la FinTech à Londres. Logiquement, les premiers critères qui viennent à l'esprit sont la fiscalité – universellement considérée comme plus légère, pour les entreprises et pour les entrepreneurs – et la réglementation, avec les multiples efforts engagés par les autorités de supervision afin de créer des conditions favorables à l'innovation dans le secteur financier (sans pour autant compromettre la protection des consommateurs).
Mais ces deux facteurs ne sont que la partie émergée d'un iceberg. La présence d'investisseurs internationaux, susceptibles de couvrir toutes les phases de levées de fonds (de l'amorçage au développement), est également un atout incontestable de la place britannique. En outre, leur rôle est important à un second titre : ils participent plus ou moins directement (quand ce sont des banques, par exemple) à la définition des problématiques que cherche à résoudre la FinTech et constituent de la sorte un riche écosystème de partenaires potentiels.
Ce privilège se traduit notamment par le nombre incroyable d'incubateurs et d'accélérateurs londoniens dédiés à la FinTech, dont beaucoup sont portés ou soutenus par des institutions financières issues de tous horizons (mais pas uniquement, loin de là). Ces structures contribuent à l'attractivité de la City, non seulement en proposant des capacités d'accueil et d'accompagnement d'excellence, mais aussi en créant une émulation contagieuse qui anime et stimule l'entrepreneuriat dans la FinTech.
Enfin, la dernière grande force de Londres est sa capacité à attirer des talents étrangers, européens d'abord, mais aussi du reste de la planète. En dépit d'un ralentissement juste après le référendum du Brexit et grâce à un régime favorable, les demandes de visas pour venir travailler dans l'industrie technologique (en général, et dans la FinTech en particulier, selon une responsable de Starling Bank interviewée par Share Radio) sont maintenant à nouveau reparties à la hausse, de manière exponentielle.
Naturellement, l'intitulé de l'intervention ne trompe personne : le sujet qui figurait réellement au cœur du débat était de savoir si Paris avait une quelconque chance de prendre la place de Londres dans le cœur des entrepreneurs, à la faveur du Brexit à venir. Joëlle Durieux, directrice générale du Pôle Finance Innovation, était d'ailleurs là pour défendre becs et ongles cette idée et présenter tous les avantages de la France dans la bataille qui se joue actuellement dans toutes les métropoles européennes.
Alors, puisqu'il s'agit d'une bataille, la première règle pour un bon stratège est de connaître parfaitement son adversaire principal, et, surtout, ses forces et ses faiblesses. Pas la peine de s'étendre sur ces dernières, la faille qui a créé l'opportunité de mettre en cause la position jusque alors inébranlable du Royaume-Uni est sa sortie programmée de l'Union Européenne et sa conséquence directe, à savoir la perte probable, pour les entreprises qui y résident, d'un accès simplifié au reste du continent.
Attardons-nous donc sur ce qui attire et retient les startups de la FinTech à Londres. Logiquement, les premiers critères qui viennent à l'esprit sont la fiscalité – universellement considérée comme plus légère, pour les entreprises et pour les entrepreneurs – et la réglementation, avec les multiples efforts engagés par les autorités de supervision afin de créer des conditions favorables à l'innovation dans le secteur financier (sans pour autant compromettre la protection des consommateurs).
Mais ces deux facteurs ne sont que la partie émergée d'un iceberg. La présence d'investisseurs internationaux, susceptibles de couvrir toutes les phases de levées de fonds (de l'amorçage au développement), est également un atout incontestable de la place britannique. En outre, leur rôle est important à un second titre : ils participent plus ou moins directement (quand ce sont des banques, par exemple) à la définition des problématiques que cherche à résoudre la FinTech et constituent de la sorte un riche écosystème de partenaires potentiels.
Ce privilège se traduit notamment par le nombre incroyable d'incubateurs et d'accélérateurs londoniens dédiés à la FinTech, dont beaucoup sont portés ou soutenus par des institutions financières issues de tous horizons (mais pas uniquement, loin de là). Ces structures contribuent à l'attractivité de la City, non seulement en proposant des capacités d'accueil et d'accompagnement d'excellence, mais aussi en créant une émulation contagieuse qui anime et stimule l'entrepreneuriat dans la FinTech.
Enfin, la dernière grande force de Londres est sa capacité à attirer des talents étrangers, européens d'abord, mais aussi du reste de la planète. En dépit d'un ralentissement juste après le référendum du Brexit et grâce à un régime favorable, les demandes de visas pour venir travailler dans l'industrie technologique (en général, et dans la FinTech en particulier, selon une responsable de Starling Bank interviewée par Share Radio) sont maintenant à nouveau reparties à la hausse, de manière exponentielle.
La réalité commence ainsi à prendre forme : la puissance de la FinTech britannique n'est pas due au hasard ni à une ou deux conditions spécifiques, c'est un environnement global et cohérent qui la façonne. À y regarder de près, on peut même retrouver dans cet assemblage la sorte d'alchimie qui fait de la Silicon Valley le siège de l'innovation technologique mondiale, indétrônable malgré les tentatives répétées de différents pays au cours des ans. Prendre la place de Londres ne sera donc pas tâche aisée.
Maintenant, observons les caractéristiques de Paris en comparaison de sa concurrente. Le côté réglementaire – bien que le gouverneur de la banque de France ait récemment réitéré son opposition à la création d'un bac à sable – n'est pas le plus problématique. En effet, si les promesses du guichet unique et de l'accompagnement des jeunes pousses sont tenues, la différence avec la situation britannique ne sera pas si importante qu'il y paraît (la « sandbox » londonienne n'étant pas si libérale qu'on le croit généralement).
La fiscalité représente probablement un frein beaucoup plus sensible. Paris Europlace a beau présenter un rapport selon lequel Paris serait la mieux positionnée pour attirer les entreprises, il faut malheureusement tempérer ce bel optimisme, pour au moins deux raisons. En premier lieu, les chiffres de l'étude ne concernent que l'Europe continentale et ignorent donc la concurrente numéro 1. D'autre part, comme l'explique Philippe Gélis, co-fondateur de Kantox (basée à Londres), les faits ne sont pas suffisants, c'est une réputation exécrable qu'il faudrait combattre, en priorité.
Est-il ensuite utile de s'attarder sur la faiblesse de l'investissement dans l'hexagone ? Les initiatives des pouvoirs publics sont loin de pouvoir combler le déficit de capitaux. Il est d'usage de rappeler que 4 banques françaises figurent dans le top 20 mondial mais cela ne suffit visiblement pas non plus à compenser une présence d'établissements étrangers souvent limitée à une représentation commerciale. Ne parlons pas de leur pusillanimité en matière d'innovation (dans un registre proche, aucune n'apparaît au classement des dépenses de R&D parmi 1 000 entreprises européennes)…
Ces carences entraînent automatiquement le quasi-désert parisien en structures d'accompagnement spécialisées (heureusement que l'accélérateur FinTech de l'Atelier BNP Paribas sauve l'honneur !). Quant à capter des talents étrangers… Certes, le système éducatif français forme d'excellents ingénieurs et parvient à attirer les étudiants des quatre coins du monde (autre motif d'auto-satisfaction de Paris Europlace). Hélas bien peu restent en France, après leur cursus, pour créer des entreprises…
En conclusion, s'il n'est pas totalement impossible pour Paris de viser une place de choix dans la FinTech, s'emparer du titre de capitale mondiale exigera un engagement et un plan d'action à la hauteur du défi (en termes d'étendue comme de profondeur) et ne pourra se contenter de simples campagnes de communication… Pour paraphraser un personnage célèbre, « on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant Paris ! Paris ! Paris !… mais cela n'aboutit à rien et cela ne signifie rien ».
Maintenant, observons les caractéristiques de Paris en comparaison de sa concurrente. Le côté réglementaire – bien que le gouverneur de la banque de France ait récemment réitéré son opposition à la création d'un bac à sable – n'est pas le plus problématique. En effet, si les promesses du guichet unique et de l'accompagnement des jeunes pousses sont tenues, la différence avec la situation britannique ne sera pas si importante qu'il y paraît (la « sandbox » londonienne n'étant pas si libérale qu'on le croit généralement).
La fiscalité représente probablement un frein beaucoup plus sensible. Paris Europlace a beau présenter un rapport selon lequel Paris serait la mieux positionnée pour attirer les entreprises, il faut malheureusement tempérer ce bel optimisme, pour au moins deux raisons. En premier lieu, les chiffres de l'étude ne concernent que l'Europe continentale et ignorent donc la concurrente numéro 1. D'autre part, comme l'explique Philippe Gélis, co-fondateur de Kantox (basée à Londres), les faits ne sont pas suffisants, c'est une réputation exécrable qu'il faudrait combattre, en priorité.
Est-il ensuite utile de s'attarder sur la faiblesse de l'investissement dans l'hexagone ? Les initiatives des pouvoirs publics sont loin de pouvoir combler le déficit de capitaux. Il est d'usage de rappeler que 4 banques françaises figurent dans le top 20 mondial mais cela ne suffit visiblement pas non plus à compenser une présence d'établissements étrangers souvent limitée à une représentation commerciale. Ne parlons pas de leur pusillanimité en matière d'innovation (dans un registre proche, aucune n'apparaît au classement des dépenses de R&D parmi 1 000 entreprises européennes)…
Ces carences entraînent automatiquement le quasi-désert parisien en structures d'accompagnement spécialisées (heureusement que l'accélérateur FinTech de l'Atelier BNP Paribas sauve l'honneur !). Quant à capter des talents étrangers… Certes, le système éducatif français forme d'excellents ingénieurs et parvient à attirer les étudiants des quatre coins du monde (autre motif d'auto-satisfaction de Paris Europlace). Hélas bien peu restent en France, après leur cursus, pour créer des entreprises…
En conclusion, s'il n'est pas totalement impossible pour Paris de viser une place de choix dans la FinTech, s'emparer du titre de capitale mondiale exigera un engagement et un plan d'action à la hauteur du défi (en termes d'étendue comme de profondeur) et ne pourra se contenter de simples campagnes de communication… Pour paraphraser un personnage célèbre, « on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant Paris ! Paris ! Paris !… mais cela n'aboutit à rien et cela ne signifie rien ».
Un final aux accents gaulliens bienvenu
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