Depuis longtemps, la croissance de la consommation énergétique des centres de production informatiques génère des inquiétudes quant à la capacité des fournisseurs d'électricité à suivre la demande. Une étude de Bloomberg révèle une autre dimension des impacts de la prolifération de ces infrastructures, engendrée en particulier par le récent développement exponentiel de l'intelligence artificielle.
Les conséquences environnementales de la prolifération des usages numériques, surtout quand les centrales électriques exploitent des énergies fossiles, restent au centre des enjeux. Mais elles ne sont pas les seules. Déjà, quelques incidents ponctuels ont montré comment l'installation de « data centers » – introduisant des besoins massifs de puissance à une vitesse incompatible avec la planification à long terme que privilégient les industriels – pouvait perturber l'alimentation des foyers riverains.
Or il pourrait y avoir des effets plus insidieux. L'équipe de Bloomberg a en effet analysé les données collectées par les 770 000 capteurs Ting de Whisker Labs présents sur l'ensemble du territoire des États-Unis – les mêmes que quelques assureurs déploient en prévention des sinistres domestiques d'origine électrique – et il en ressort que la qualité du courant parvenant aux habitations semble sensiblement dégradée à proximité des zones où se concentrent les plus grandes installations informatiques.
Concrètement, la seule mesure de distorsions harmoniques – c'est-à-dire les déformations par rapport à la forme sinusoïdale idéale – révèle une corrélation significative : environ trois quarts des cas de détérioration importante (c'est-à-dire au-delà du seuil de tolérance officiel) sont identifiés dans un rayon de 80 kilomètres autour d'un pôle d'activité informatique majeure (définie par une consommation de 10 MW ou plus), et ce sans distinction entre les aires urbaines et rurales, incidemment.
Ce genre d'irrégularités peut paraître anodin aux yeux du profane. Pourtant, les spécialistes de Whisker Labs estiment qu'elles peuvent créer des anomalies sur les équipements de la maison, depuis des bruits gênants issus des climatiseurs ou des réfrigérateurs jusqu'à une surchauffe d'appareils électroniques. Surtout, elles constituent fréquemment les signes avant-coureurs de problèmes plus graves, dysfonctionnements et pannes prématurés, voire déclenchement d'incendies à partir d'étincelles. Les divers dégâts dérivés pourraient se compter en milliards de dollars.
Certains observateurs comparent aujourd'hui la révolution de l'intelligence artificielle à celles qu'ont provoqué la naissance d'internet ou l'émergence du smartphone. Je crois cependant que, si elle se matérialise, il s'agira de la première rupture technologique de l'histoire récente pour laquelle des impacts négatifs d'ampleur sont anticipés. Et force est de constater que, malheureusement, les acteurs directement concernés ne prennent guère le temps de s'en préoccuper… et encore moins de les prévenir…
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